En septembre, tous les employés de l'Université de Sherbrooke qui utilisent un ordinateur verront apparaître à leur écran, plusieurs fois par jour, une fenêtre qui les invite à prendre une pause de 20 secondes.

En septembre, tous les employés de l'Université de Sherbrooke qui utilisent un ordinateur verront apparaître à leur écran, plusieurs fois par jour, une fenêtre qui les invite à prendre une pause de 20 secondes.

Ils seront alors incités à effectuer des exercices tels des flexions de la tête et des étirements du bas du dos, des épaules ou des poignets.

À d'autres moments, il s'agira, par exemple, de marcher pendant 20 secondes, de cligner des yeux ou de regarder au loin.

Ces appels à bouger viennent du logiciel Isoflex, développé par Patrick Ménard dans le cadre de son mémoire de maîtrise en biomécanique à l'Université de Sherbrooke.

Isoflex compte déjà quelque 2000 adeptes au Québec et en France. Il peut être téléchargé sur le site www.isosante.com, pour une période d'essai gratuit de cinq jours.

Un aide-mémoireLors de l'entrée massive des ordinateurs dans les milieux de travail, les ergonomes se sont surtout intéressés à l'aménagement de postes de travail.

Ces mesures n'ont pas réussi à éradiquer les tendinites, les épicondylites (tendinite du coude) et autres maux de l'ère informatique.

«Un poste informatique a beau être conçu dans les règles de l'art, il y aura malgré tout des problèmes si on l'utilise mal, par exemple en adoptant une mauvaise posture, ou lorsqu'on fait un travail répétitif pendant de longues périodes», explique M. Ménard.

Les résultats de ses recherches, effectuées en 2004, l'on convaincu que les micro-pauses accompagnées d'exercices sont un outil de prévention efficace des malaises de l'ordinateur.

M. Ménard a alors testé pendant cinq semaines de logiciel Isoflex auprès de 30 employés de la firme sherbrookoise CCH Canadienne, qui produit des documents d'information et des logiciels destinés aux fiscalistes, aux avocats et aux comptables.

Leur condition physique et psychologique a ensuite été comparée à celle de 30 autres employés de CCH effectuant des tâches similaires et ne disposant pas du logiciel.

«Quatre utilisateurs d'Isoflex sur cinq ont noté une diminution de leurs tensions musculo-squelettiques. Aucun dans l'autre groupe. De plus, 60% des employés qui avaient le logiciel ont noté une diminution de leur niveau de stress, contre 13% dans l'autre groupe», dit M. Ménard.

«Bien que tous les mérites de la diminution du stress ne puissent être attribués à Isoflex, l'écart qui sépare les deux groupes demeure important. Il faut aussi noter que la productivité du groupe expérimental a été maintenu», ajoute-t-il.

M. Ménard croit fermement que l'utilisation d'un logiciel apporte des résultats supérieurs à ceux d'un dépliant qui conseillerait aux travailleurs de prendre régulièrement de courts moments d'arrêt.

«Quand nous faisons des conférences sur les micro-pauses, les gens ressortent très enthousiastes. Ils retournent à leur poste de travail et ils oublient. Un logiciel comme Isoflex leur sert d'aide-mémoire», explique-t-il.

Les micro-pauses avec exercices ont malgré tout leur limites. «Elles sont un complément aux pauses normales. Elles ne les remplacent pas», souligne M. Ménard.

Organisation du travailL'ergonome Marie St-Vincent est responsable des travaux sur les troubles musculo-squelettiques à l'Institut de recherche Robert-Sauvé en santé et sécurité du travail (IRSST).

Elle confirme un constat de M. Ménard.

«Même lorsque l'aménagement du poste de travail est optimal, on risque d'avoir des problèmes si l'on reste toujours dans la même posture», dit-elle.

Selon Mme St-Vincent, les programmes d'exercice ont leurs limites.

«L'organisation du travail joue un rôle très important dans les problèmes musculo-squelettiques. La meilleure prévention est de permettre au travailleur de varier ses tâches et ses façons de faire», insiste-t-elle.

Des recherches ont montré que l'utilisation de la souris est une des grandes causes des maux du travail à l'ordinateur.

«On améliore la situation en plaçant la souris à gauche. Cette utilisation permet une meilleure posture de l'épaule. Mais à long terme, on peut quand même subir des dommages si les tâches ne varient pas», dit-elle.

L'avocate en droit du travail Sophie Cloutier, du bureau de Québec du cabinet Grondin, Poudrier, Bernier, représente régulièrement des travailleurs devant la Commission de la Santé et Sécurité du travail et la Commission des lésions professionnelles.

«Ces instances exigent une preuve béton pour reconnaître les maux de l'ordinateur comme maladie professionnelle ou un accident de travail. Plusieurs experts sont sollicités et leurs avis sont souvent contradictoires», constate-t-elle.

Selon Me Cloutier, les problèmes liés à de mauvais aménagements des postes de travail sont moins importants qu'au moment de l'arrivée des premiers ordinateurs.

Par contre, elle observe des séquelles chez les travailleurs soumis à des cadences rapides mesurées par l'employeur.