Le député européen Alain Lamassoure ne risque pas de se faire beaucoup d'amis avec son projet de taxation des courriels et des SMS au profit du budget de l'Europe...

Le député européen Alain Lamassoure ne risque pas de se faire beaucoup d'amis avec son projet de taxation des courriels et des SMS au profit du budget de l'Europe...

«Si le développement des échanges crée de la richesse nouvelle dans le cadre national, européen ou mondial, tout en suscitant des problèmes nouveaux, n'y a-t-il pas une logique à prélever une petite partie de ce supplément de richesses pour financer la solution à ces problèmes ?»

André Lamassoure, député UMP membre du parlement européen, exprime ainsi la motivation de son projet, qui a pris place dans un rapport au Parlement européen sur la réforme du financement du budget de l'Union.

Le rapport propose de taxer les messageries, à hauteur de 1,5 cent pour un SMS et 0,00001 cent par courriel expédié sur le territoire européen.

Certes, les sommes ne sont pas extravagantes, mais lorsqu'en particulier le prix des SMS demandé par les opérateurs de téléphonie mobile est jugé encore trop élevé, surtout par les consommateurs, une taxe supplémentaire ne sera pas des plus populaires.

Idem pour les courriels, avec une difficulté supplémentaire qui proviendra de la gestion et de la collecte de la taxe. Comment l'intégrer dans un forfait ? Comment seront traitées les messageries instantanées ? Et comment récolter la taxe si la messagerie est hébergée hors du territoire européen ?

Quant au 'financement de la solution des problèmes nouveaux' évoqué par le député, on peut légitimement s'inquiéter de ce qui se cache derrière ce vocable ? Si c'est pour adopter un système de surveillance des conversations et messages 'à l'américaine', on s'en passerait bien !

«L'explosion des nouveaux moyens de télécommunication devrait conduire les grands argentiers impécunieux à s'intéresser à cette création de valeur, aujourd'hui largement épargnée.»

L'idée n'est cependant pas nouvelle, qu'elle provienne du député ou d'autres sources, nationales ou européennes. Le succès de l'Internet et des médias de communication attire l'intérêt des politiques et des argentiers du monde, qui souhaiteraient appliquer au numérique le principe du «droit de timbre» sur les communications. Sauf que pour expédier une lettre - timbrée - nul n'est nécessaire de s'abonner à un service postal, ce qui n'est pas le cas pour la téléphonie mobile et l'Internet.

André Lamassoure prend l'exemple des SMS expédiés lors du nouvel an 2005 : «Plus d'un milliard de textos ont été échangés entre Européens. En France, les opérateurs les facturaient alors 15 cents, pour un prix de revient quatre fois inférieur. Un prélèvement d'un demi-centime aurait rapporté 5 millions d'euros en un jour. En faisant jouer à plein régime la concurrence, il est possible de réduire le coût d'un tel service pour les usagers, tout en appliquant l'équivalent moderne d'un droit de timbre.»

Il n'est pas certains non plus que les opérateurs télécoms apprécient le discours…

L'idée de taxer les messages est loin de faire l'unanimité. Ils font partie d'un coût que paie l'utilisateur, intégré au prix de la prestation. Mais le plus grand danger provient des risques de dérive : pourquoi ne pas envisager d'aller plus loin, taxer au mot contenu dans le message, taxer les blogues, taxer les pages vues, etc. ? Mettre place une taxe sur les messages impliquera de développer les outils de mesure de la consommation, et donc de disposer à partir de cette étape d'un outil pour multiplier les taxations.

L'intérêt des gouvernants étant souvent bien éloigné de celui du consommateur et de l'électeur, l'idée pourrait suivre son chemin. Encore faut-il que le projet obtienne le vote unanime des 25 représentants des États européens avant de passer devant le parlement.