La Commission, qui a condamné Microsoft en 2004 pour abus de position dominante, a relativisé jeudi les nouvelles concessions du groupe, jugeant que la divulgation à ses concurrents du code source de Windows n'était peut-être pas la meilleure réponse à ses exigences.

La Commission, qui a condamné Microsoft en 2004 pour abus de position dominante, a relativisé jeudi les nouvelles concessions du groupe, jugeant que la divulgation à ses concurrents du code source de Windows n'était peut-être pas la meilleure réponse à ses exigences.

Au lendemain de la grand-messe médiatique organisée par Microsoft à deux pas de ses bureaux, la Commission a abandonné ses prudences de la veille.

«Le code source n'est la documentation ultime de rien du tout, et c'est précisément la raison pour laquelle les programmeurs doivent fournir une documentation compréhensible en parallèle avec leur code source», a estimé jeudi au Forum de Davos la commissaire à la Concurrence Neelie Kroes, citée par son porte-parole.

«C'est la qualité de l'information qui importe et non la quantité», a renchéri Jonathan Todd.

Souvent comparé à un secret de fabrication, le code source «offert» mercredi par Microsoft est un ensemble d'instructions écrites dans un langage de programmation informatique.

Pour assurer, comme la Commission européenne l'a exigé il y a 2 ans, le fonctionnement harmonieux et efficace de Windows avec les ordinateurs utilisant d'autres systèmes d'exploitation, et donc permettre le jeu de la concurrence, Microsoft avait jusqu'à présent transmis 12.000 pages de documentation et offert 500 heures d'aide technique.

«Ils pourraient nous donner un demi-million de pages mais si ce n'est pas l'information appropriée pour que les concurrents puissent élaborer des logiciels compatibles avec Windows, alors cela signifie qu'ils ne se conforment pas à nos exigences», a réagi jeudi M. Todd.

Pas question pour Bruxelles de céder si vite, après sept années de bras de fer. Même si Microsoft affirme aller «bien au-delà des exigences de la Commission», pour cette dernière, «il est encore prématuré de conclure que l'accès au code source résoudrait le problème de manque de conformité à la décision de mars 2004».

D'autant qu'il y a encore un mois, Neelie Kroes jugeait la documentation fournie par Microsoft aussi «inadéquate» qu'»incomplète» et le sommait de se conformer une fois pour toutes à ses exigences, sous peine d'amendes pouvant aller jusqu'à 2 millions par jour.

Alors que Microsoft avait jusqu'au 15 février pour répondre à la commissaire, le groupe a créé la surprise mercredi, en annonçant qu'il allait communiquer aux éditeurs de logiciels certaines parties du sacro-saint code source de Windows, soit beaucoup plus d'informations que ce qui lui était demandé.

Selon son porte-parole, la commissaire Kroes n'a été avertie que dix minutes avant le début de cette annonce par un fax du patron de Microsoft Steve Ballmer.

Pour les opposants à Microsoft, ce code source est «inutilisable» car trop complexe. Selon eux, ce torrent de données techniques doit être accompagné d'une «feuille de route» pour être véritablement approprié.

Le ton n'était pas plus élogieux jeudi du côté des éditeurs de logiciels libres, qui accusent Microsoft de leur tendre «une pomme empoisonnée».

«Jamais personne ne leur a demandé de publier leur code source», a stigmatisé jeudi le président de la Fondation européenne du logiciel libre (FSFE), Georg Greve.

Pour la FSFE, cette montagne de données «causera plus de problèmes» qu'elle n'en résoudra. «Dans la mesure où le code source est protégé par des droits d'auteur, les programmeurs qui en auront pris connaissance ne pourront le réutiliser dans leurs logiciels libres» sous peine d'être poursuivis par Microsoft pour violation de droits d'auteur.

Plus qu'une énorme concession de Microsoft, la FSFE voit plutôt «un nouveau complot marketing: Microsoft a agi comme un voleur qui, quand on lui demande de lâcher son arme à feu, en profite pour vous lancer une grenade.»