La décision de Google de censurer de son moteur de recherche certains sites et contenus interdits en Chine ne fait pas l'unanimité.

La décision de Google de censurer de son moteur de recherche certains sites et contenus interdits en Chine ne fait pas l'unanimité.

Google a annoncé aujourd'hui que certains contenus seraient retirés de son moteur Google.cn. Ainsi, la BBC rapporte que taper les caractères chinois pour «Falun Gong» sur Google.cn mène à l'organe de presse officiel chinois qui traite de la campagne «Critiquer le Falun Gong». Idem pour les sites qui traitent de l'indépendance de Taiwan ou du massacre de la Place Tiananmen.

Chez Reporters sans frontières (RSF), on se dit «dégoûté» et surpris de la décision de Google.

«C'est une entreprise qui se présentait sous un autre visage, une autre réputation: jeune, dynamique, voulant revoir les méthodes de recherche sur Internet. C'était devenu un modèle que plusieurs gens regardaient avec admiration», dit François Bugingo, président de la section canadienne de RSF.

En acceptant de se plier aux exigences du gouvernement chinois, Google suit les deux grands de la recherche sur Internet que sont Yahoo! et Microsoft, qui ont eux aussi censuré certains résultats de leurs moteurs de recherche.

Reporters sans frontières Canada qualifie la décision de Google de déplorable. «Avec les revenus qu'ils font, je ne crois pas qu'ils puissent vraiment dire: c'était une décision désespérée, on avait le choix entre faire ça ou fermer boutique», dit François Bugingo.

Professeur de gestion internationale à l'Université Laval, Gérard Verna ne condamne pas Google et juge qu'il s'agit d'une décision «pragmatique».

«La question est de savoir quel est le rôle des entreprises et pourquoi elles font des affaires. Elles font des affaires pour gagner de l'argent. On leur demande aussi, et en particulier chez elles, d'être de bons citoyens. Mais on ne leur demande pas de faire des excès de zèle.»

Pour ce professeur spécialisé en éthique, ne pas aller en Chine aurait constitué pour Google un tel excès de zèle, qui aurait pu faire perdre des emplois ici.

«Il y a des choses que je condamne en permanence dans le comportement des entreprises. Mais Google offre aux Chinois la possibilité de s'ouvrir sur le monde. L'ouverture n'est que partielle, mais c'est infiniment plus que ce qu'ils avaient avant», dit Gérard Verna.

Chez Reporters sans frontières, on ne croit pas que faire des affaires en Chine aidera la cause des droits de l'Homme.

«Ça fait plusieurs années qu'on sort ce questionnement et la réponse qu'on obtient des autorités américaines c'est: vous allez voir, le business, ça change les gens. Et a contrario, on se rend compte que c'est l'Occident qui est en train de céder à toutes les attentes des autorités chinoises.»

Gérard Verna prédit que la décision de Google de censurer son site chinois ne fera pas mal à l'image de la compagnie puisque de toute façon, dit-il, les «gens s'en foutent».

«Mais qu'est-ce qu'on reproche à Google? D'avoir accepté de ne pas diffuser la totalité de l'Internet? Mais en faisant ça avec un nombre limité de sites, il donne accès aux Chinois à tout le reste de l'Internet, dit le professeur de gestion. Qu'est-ce qui vaut mieux? Les priver de tout, ou les priver d'une partie de l'Internet?»

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