De la neige, des glaciers et des montagnes à perte de vue. Dans ce paysage polaire truffé de pics et de crevasses, la cinéaste d'aventure Caroline Côté a découvert le sens profond de la solidarité : « C'est dans l'adversité qu'on apprend à se connaître. Le froid, ça crée des liens ! »

La genèse d'une aventure

Trente jours dans la péninsule antarctique à découvrir l'une des dernières régions inexplorées du monde. L'occasion rêvée pour cette photographe-aventurière, qui faisait ses premiers pas dans le documentaire. C'était il y a cinq ans. Et pourtant, c'est comme si c'était hier. « Je savais qu'une équipe partait dans le but de réaliser un documentaire sur le pôle Sud et d'inspirer les jeunes à sortir de leur zone de confort. Je me suis jointe à l'expédition XP Antarctik pour la capter en images », raconte Caroline de sa voix posée.

Les préparatifs

À l'époque, elle avait 28ans, n'avait jamais fait d'escalade ni même dormi sous une tente. Elle a dû tout apprendre, jusqu'aux premiers soins en terre éloignée. L'entraînement aura duré six mois. Pour apprivoiser l'hiver, elle plante sa tente dans la cour de ses parents. Elle respire l'odeur des sapins, entend frémir les branches. « Dehors, on se sent tellement plus proche de notre environnement », observe-t-elle. La jeune femme affronte ensuite le froid mordant du mont Washington. Puis escalade un glacier dans l'Ouest canadien, d'où se détachent des blocs de sérac qui vont ensuite s'écraser dans la mer...

Le grand départ

En février 2014, la petite équipe de six explorateurs entame sa grande odyssée. Chacun doit avaler quatre fois plus de nourriture qu'à l'habitude pour conserver son indice de masse corporelle et avoir suffisamment de forces pour évoluer dans ce désert blanc. « On déplaçait chaque jour notre campement au rythme de notre progression à la conquête de sommets vierges », se remémore-t-elle. Entre les sorties, la troupe s'occupe à aménager l'abri pour oublier le froid.

L'ascension

Plus les jours passent, plus ça monte en altitude et plus le mercure dégringole. Le matin, il faut enfiler des bottes gelées. Le froid fait perdre l'odorat et le vent est assourdissant. Toute cette blancheur donne l'impression d'être pris dans une balle de ping-pong. « On était aveuglés en raison du trou dans la couche d'ozone, évoque Caroline. On ne distinguait plus le ciel et le sol. On avançait reliés les uns aux autres en cordée. »

Froid extrême, chaleur humaine

Au jour 10, toujours à la recherche du « catwalk » - étroit chemin menant au plateau qui surplombe le continent-, le plus costaud du groupe disparaît dans une crevasse. « Il criait pour nous guider, se rappelle Caroline. Au bout de trois heures de manoeuvres avec un système de poulies, on a pu le remonter. Il n'était pas blessé, mais il a eu très peur. » De cet événement, elle retiendra surtout l'incroyable élan de solidarité qui les a soudés les uns aux autres. Le sentiment de communauté qui aide à surmonter les épreuves. 

« Le fait de se retrouver ensemble dans des conditions extrêmes nous reconnecte à notre humanité. L'hiver m'a fait gagner en confiance et en endurance. »

- Caroline Côté

C'est rien qu'un début

Cette aventure, caméra au poing, allait en appeler bien d'autres - le Yukon en canot, la toundra arctique à la rencontre de femmes inuites, le Québec en solo, de Natashquan à Montréal. « Je me disais qu'après le pôle Sud, le Québec, ce serait facile, explique Caroline. Erreur ! Dans certaines régions comme la Côte-Nord, il fait très froid. J'étais toute seule. C'est plus facile de garder le moral à plusieurs. » Et c'est justement cette expérience de groupe qu'elle s'apprête à revivre en prenant part à l'expédition Seato Ice Antarctique, en trek et en voilier. « Je n'ai pas fini de flirter avec l'hiver ! » lance-t-elle.

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