À Montréal, Anna Chif a cofondé la société québécoise Dialogue, qui fournit des services virtuels en santé, dont des consultations en ligne avec du personnel infirmier et des médecins. Après avoir conquis le pays, Dialogue a l'oeil sur le monde.

En janvier 2016, Anna Chif était au chevet de sa grand-mère, Aelita, dont l'état de santé se dégradait. Celle-ci vivait encore à la maison. « Après une nuit particulièrement agitée, j'ai contacté notre infirmière. Elle m'a recommandé de l'emmener à l'urgence parce qu'elle devait être vue par un médecin. »

Incapable de transporter sa grand-mère, Anna savait surtout que ce transfert allait gravement fragiliser son état. « J'étais désespérée, se rappelle-t-elle. On n'était pas en 1980! Mes parents pouvaient communiquer par Skype avec l'Ouzbékistan, d'où ils sont originaires, mais on ne pouvait pas mettre cette même technologie au service d'un malade et de son médecin. Cela m'était inacceptable. »

La jeune femme, alors âgée de 26 ans, a donc commencé à rêver d'une réponse technologique à un problème d'accès aux soins de santé. À la fin de l'hiver, la grand-mère d'Anna est décédée. En mai, Dialogue est née.

Du rêve à la réalité

La spécialiste en optimisation des opérations a ainsi mis sur pied une plateforme de télémédecine avec deux partenaires, Cherif Habib et Alexis Smirnov. Les cofondateurs se sont inspirés de services similaires déjà offerts dans différents pays, comme l'Angleterre, la Suède et les États-Unis, pour créer cette clinique virtuelle au service exclusif des entreprises. À ce jour, quelque 200 employeurs canadiens, dont une majorité au Québec, offrent à leurs employés et à leur famille un accès à des soins de santé comme avantage social.

Depuis sa création, il y a deux ans et demi, Dialogue connaît une croissance fulgurante. La plateforme permet à des milliers d'employés et leur famille d'avoir accès à des soins de santé en clavardant avec une infirmière, d'assister à un rendez-vous par vidéoconférence avec un médecin ou un thérapeute, ou de communiquer avec du personnel capable de les diriger vers l'urgence la moins achalandée, au besoin. Près d'une centaine d'employés et tout autant de professionnels contractuels y prodiguent soins et conseils.

« On ne veut pas remplacer le système de santé actuel. On veut offrir quelque chose de radicalement différent, qui vient bonifier l'offre avec des services intégrés. » - Anna Chif, cofondatrice de Dialogue

« Actuellement, on s'absente en moyenne de 6 à 10 jours par an pour régler nos besoins familiaux en santé. Et on ne parle pas du présentéisme; lorsqu'un employé laisse un membre de sa famille malade à la maison, son esprit n'est jamais tout à fait au travail », note Anna Chif.

Tout le monde y gagne

Nouvellement maman, Anna Chif n'est pas peu fière d'avoir aidé à créer un service qui évite aux familles de gaspiller leur temps et leur énergie. « Un acte médical comme un renouvellement d'ordonnance ou une référence pour aller voir un spécialiste peut se faire en 10 minutes. On s'absentera pourtant du travail pendant deux ou trois heures pour obtenir un tel service auprès de son médecin de famille », lance la gestionnaire.

La télémédecine contribue au désengorgement et à une meilleure répartition des patients dans le système de santé traditionnel. « Sur une base quotidienne, nous évitons des centaines de visites à l'urgence ou en clinique », affirme la chef d'exploitation.

Dans le coeur d'Anna Chif, il y a un espoir : en mémoire d'Aelita, qu'on parvienne à vivre dans un monde où la médecine peut se rendre jusqu'aux gens immobilisés. Et dans une perspective plus large, qu'on soigne rapidement les petits bobos du quotidien.

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