Les Américaines auraient bien voulu venger l'affront que leur avaient infligé les Canadiennes en leur soufflant la médaille d'or sur leur territoire aux Jeux de Salt Lake City. Mais une recrue québécoise et une gardienne de but sensationnelle se sont chargées de contrecarrer leurs plans.

La jeune attaquante Marie-Philip Poulin et la gardienne Shannon Szabados ont été les héroïnes incontestables de la victoire de 2-0 du Canada en finale du tournoi de hockey féminin, devant une foule en délire à la Place hockey du Canada. Leurs efforts ont donné au Canada un troisième titre olympique consécutif et une huitième médaille d'or depuis le début des Jeux, une nouvelle marque nationale pour les Jeux d'hiver.

Quelques heures avant la finale, le président du Comité international olympique, Jacques Rogge, avait servi un avertissement aux dirigeants du hockey international: le hockey féminin doit atteindre une meilleure parité ou il risque d'être expulsé des Jeux olympiques. «Nous ne pouvons continuer sans amélioration», avait-il dit.

Le manque de profondeur du hockey féminin est une réalité aussi évidente à Vancouver qu'elle l'était à Turin, à Salt Lake ou à Nagano. Mais les joueuses américaines et canadiennes ne sauraient être blâmées pour le retard des autres nations. Une fois de plus, ces éternelles rivales se sont livré un match relevé et équilibré, dont l'issue aurait pu être différente sans le brio de Szabados et les prouesses offensives de Poulin.

Cadette de l'équipe, Poulin, 18 ans, a marqué les deux buts du match en fin de première période à l'aide de tirs aussi vifs que précis en provenance de l'enclave. Quant à Szabados, elle a repoussé les 28 tirs des Américaines avec le calme d'un vétéran, faisant taire les critiques de l'entraîneuse Melody Davidson, qui avait flirté avec la controverse en préférant la gardienne de 23 ans à l'expérimentée Kim St-Pierre.

Un peu décontenancée par la forêt de micros tendus vers elle, Poulin, le cou ceint du collier de perles qu'elle porte toujours quand elle joue, exultait en regardant sa médaille. «C'est un des plus beaux matchs de ma vie. On a fait un travail d'équipe incroyable ce soir et Shannon a vraiment bien joué dans les buts. C'est vraiment incroyable.»

Établie à Calgary avec le reste de l'équipe depuis le mois d'août, la native de Beauceville, une des sept québécoises de la formation, a vécu toute l'année avec St-Pierre, la gardienne Charline Labonté et l'attaquante Caroline Ouellette. «Je suis tellement fière de Marie-Philip, a dit Ouellette. Je crois vraiment que les bonnes choses arrivent aux bonnes personnes. Elle a marqué deux buts magnifiques. Elle va être une des meilleures joueuses du monde pour les années à venir.»

Le Canada a ouvert la porte aux États-Unis en début de deuxième, Jayna Hefford et Becky Kellar écopant coup sur coup de punitions pour avoir retardé la partie. Mais les Américaines ont été incapables de capitaliser à cinq contre trois, plusieurs de leurs tirs ne parvenant même pas à Szabados.

«L'équipe a vraiment bien joué devant moi, les filles ont bloqué beaucoup de rondelles. La rondelle collait sur moi aujourd'hui et quand je donnais un retour, les filles étaient là pour reprendre le disque», a dit Szabados, dont la mitaine agile et les rapides déplacements latéraux ont à plusieurs reprises frustré les joueuses américaines.

«Shannon a été vraiment solide ce soir, a dit l'attaquante Gina Kingsbury, de Rouyn-Noranda, qui partage sa chambre avec la gardienne d'Edmonton pendant les Jeux. Elle était prête pour chaque lancer. Elle faisait toujours face aux rondelles. Elle était dans sa zone. En me levant ce matin, j'ai vu qu'elle était concentrée et pas nerveuse, et je savais qu'elle allait avoir un match extraordinaire.»