Les Canadiennes Megan Imrie, Zina Kocher, Rosanna Crawford et Megan Tandy n'ont fait qu'une 15e place mardi au relais féminin 4 x 6 km en biathlon aux Jeux olympiques de Vancouver.

Et malgré tous leurs efforts, tous leurs sacrifices, elles replongeront dans l'oubli presque total pour quatre autres années jusqu'à ce qu'on s'aperçoive soudain que les Jeux de 2014 auront lieu à Sotchi et qu'ils sont à nos portes. On se souviendra alors que le biathlon féminin est un sport olympique et qu'il a déjà rapporté trois médailles au Canada, dont deux d'or, toutes remportées par Myriam Bédard.

Mardi au Parc olympique de Whistler, les Russes Svetlana Sleptsova, Anna Bolaiy-Titovets, Olga Medvedtseva et Olga Zaitseva se sont couvertes d'or en devançant les Françaises Marie-Laure Brunet, Sylvie Becaert, Marie Dorin et Sandrine Bailly dans une course enlevante, comme le sont la plupart du temps les relais en biathlon. Les Russes ont parcouru la distance en une heure, neuf minutes, 36,3 secondes pour l'emporter par 32,8 secondes.

Grandes favorites, mais privées de Magdalena Neuner, gagnante de deux médailles d'or à ces Jeux, les Allemandes Kati Wilhelm, Simone Hauswald, Martina Beck et Andrea Henkel ont terminé troisièmes.

On n'entend parler de biathlon que très peu au Canada. On aurait pu croire que le programme «À nous le podium» allait injecter beaucoup de fonds dans des sports moins connus et moins populaires chez-nous comme le biathlon, mais on a privilégié les sports qui étaient les plus susceptibles de rapporter des médailles.

L'équipe française de biathlon s'est couverte de gloire à ces Jeux. Mais quand on y regarde de près, la lutte entre les Canadiennes et les Françaises ou les Allemandes ou les Russes est tout à fait inégale.

Pour une, Megan Tandy, qui a 21 ans, n'est pas «cartée». Elle se permet de compétitionner sur le circuit de la Coupe du Monde parce qu'elle reçoit des appuis du gouvernement de la Colombie-Britannique et des appuis privés. Elle a dû travailler à temps partiel l'an dernier dans un «Starbuck's» pour financer ses activités.

Les autres filles de l'équipe s'en tirent tant bien que mal, souvent avec les moyens du bord.

C'est difficile de se battre contre d'autres équipes qui sont beaucoup mieux soutenues.

Par exemple, les Françaises sont soit militaires, comme Bailly, ou douanières comme Brunet ou Bécaert. Elles sont soutenues à temps plein par ces institutions nationales.

«Je peux m'entraîner sans souci toute l'année, a dit Brunet, qui est un des grands espoirs du biathlon mondial. C'est beaucoup mieux que de devoir trouver un vrai travail.»

«S'il le fallait, je m'enrôlerait, a dit Rosanna Crawford. Mes parents nous ont toujours soutenues ma soeur Chandra et moi. Mais nous pourrions avoir beaucoup moins de soucis si nous étions mieux soutenues.»

Tandy a suffisamment d'argent en poche pour terminer la saison en Coupe du monde, mais elle n'est sûre de rien par la suite.

«J'ai eu la chance d'avoir de merveilleux commanditaires qui m'ont bien appuyée. Mais au printemps, je devrai renégocier tous les contrats.»

Zina Kocher, vétéran de l'équipe, était déjà de la formation canadienne quand l'armée canadienne subventionnait à sa façon les biathlètes. L'entraîneur Jean Paquet et Steve Cyr, qui ont représenté le Canada lors de quelques Jeux olympiques, étaient par exemple des militaires. Mais l'armée canadienne a abandonné ce programme il y a quelques années déjà. Elle investit ailleurs présentement.

«Cela a fait toute une différence, a dit Kocher. Et pas seulement à notre niveau, mais à la base également. Si on veut progresser, il faut intéresser les jeunes au sport et il faut les aider. Le biathlon coûte cher.»

Tandy ne le sait que trop.

«Quand on est encore d'âge junior et qu'on demande à papa et maman de nous aider, ils font le saut quand on leur dit que le fusil qu'il nous faut absolument ne coûte que 4000 $.»

Comme les autres membres de l'équipe, Tandy a dit par ailleurs qu'elle a appris beaucoup au cours de ces Jeux. Mardi. elle n'a commis aucune faute.

«Toutes les filles de l'équipe ont donné leur maximum, ça j'en suis persuadée. Nous formons une jeune équipe. Nous avons tellement appris ici», a-t-elle dit.

Kocher a elle aussi réussi un tir parfait après avoir commis quatre fautes à son dernier tir l'individuel il y a trois jours.

«J'ai connu des hauts et des bas cette saison. On ne peut condamner un athlète quand il ne réussit pas sa meilleure performance quand cela compte le plus. C'est là beaucoup de pression.»

Crawford a raté trois cibles au tir couché. Elle n'était pas très fière. «J'ai dû effectuer la boucle de la honte, a-t-elle mentionné. Au relais, on a trois balles supplémentaires pour coucher les cinq cibles. Quand on rate, on a l'impression d'avoir laissé tomber les coéquipières.»

Megan Imrie, première Canadienne a prendre le départ, a elle dû utiliser les trois balles supplémentaires pour atteindre les cibles au tir debout.

«J'avais skié tellement vite que j'ai senti beaucoup d'acide lactique m'envahir en arrivant au plateau. Je me suis mise à trembler. En fait, j'en tremble encore.

«Mais je suis très satisfaite de mes Jeux. En arrivant ici ce matin, nous avons reçu un message de (la patineuse de vitesse) Clara Hughes qui nous disait d'apprécier chaque instant de ces Jeux parce rien ne sera comparable à ces quelques jours et vous en garderez des souvenirs pour le reste de votre vie.»

Ce sont là des conseils judicieux. Mais pour que les souvenirs que ces quatre filles pourraient conserver de Sotchi dans quatre ans soient d'or, d'argent et de bronze, il faudra une petite révolution dans le sport canadien et dans les appuis qu'on lui donne.