Les pires craintes du Comité olympique canadien et de ses athlètes pourraient bien se réaliser. Le gouvernement fédéral refuserait d'allouer un sou de plus au programme À nous le podium dans son budget du 4 mars prochain, a rapporté hier The Globe and Mail.

«Les athlètes canadiens ont eu d'excellents résultats ces dernières années dans différentes coupes du monde. Aux Jeux jusqu'à maintenant, on a réussi 17 top 10 de plus qu'à Turin. Si le gouvernement nous abandonne, on va perdre notre élan. Il faut absolument qu'il continue à nous aider», a dit le premier médaillé d'or olympique en sol canadien, Alexandre Bilodeau, hier, en marge d'une conférence de presse où l'athlète de 22 ans annonçait un don de 25 000 $ à une fondation pour la recherche sur la paralysie cérébrale - maladie dont son frère est atteint.

Sans À nous le podium et la fondation sportive B2Dix créée par son entraîneur Dominick Gauthier et le financier montréalais John D. Miller, Bilodeau doute qu'il aurait pu arriver au même résultat. «On a inspiré les enfants canadiens par nos performances durant ces Jeux. On veut continuer à les inspirer», a ajouté l'athlète québécois.

Sa coéquipière Jenn Heil, médaillée d'argent à Vancouver en ski acrobatique, est du même avis. «Je connais l'importance de l'appui du secteur privé dans la carrière d'un athlète. Mais je crois que le gouvernement doit aussi faire sa part. Le secteur privé ne peut pas être le seul à nous aider», a-t-elle souligné.

En entrevue au Globe, le ministre d'État aux sports, Gary Lunn, a déclaré qu'À nous podium - programme créé en 2005 en vue des Jeux de Vancouver - devra compter sur le secteur privé s'il veut maintenir son financement au niveau actuel. «On ne peut pas toujours pelleter ses problèmes dans la cour du gouvernement fédéral», a dit le ministre Lunn.

C'est que le gouvernement fédéral a injecté la moitié des 110 millions de dollars alloués au soutien aux athlètes de haut niveau depuis cinq ans. Le reste a été fourni par les gouvernements provinciaux et le secteur privé par l'entremise du Comité organisateur des Jeux de Vancouver (COVAN). Or, cet apport devrait disparaître après Vancouver. Le Comité olympique canadien comptait donc sur le gouvernement fédéral pour combler ce manque à gagner. Le COC exerce ainsi des pressions pour que le fédéral majore sa contribution de 11 à plus de 30 millions par an.

Comme une maison sans murs

L'ex-entraîneuse de l'équipe canadienne de hockey féminin, Danièle Sauvageau, espère que le gouvernement fédéral changera d'avis. «C'est comme bâtir les fondations de sa maison, puis d'arrêter là, sans jamais construire ni les murs ni le toit», a-t-elle commenté, hier.

«C'est vrai que le contexte économique est difficile, a ajouté le directeur général du COC, Chris Rudge. Mais je suis optimiste que le premier ministre Harper va trouver une solution.»

Le directeur général d'À nous le podium, Roger Jackson, espère que le gouvernement fédéral saura voir les retombées positives de son programme. «(L'argent investi dans ANP) est un investissement énorme pour la promotion du sport auprès de la jeunesse. Il n'y a pas de meilleur véhicule que le succès de nos héros sportifs pour inspirer les jeunes, les clubs et les bénévoles,

a-t-il souligné. Le coût réel de cet investissement est minuscule par rapport à ce que les autres pays fournissent au sport d'élite.»

À nous le podium a suscité son lot de critiques depuis le début des Jeux en raison du lent départ de l'équipe canadienne et d'une série de contre-performances de la part d'espoirs de médaille. Il s'était fixé l'objectif ambitieux d'aider le Canada à remporter le plus de médailles de son histoire aux Jeux d'hiver (record de 24 établi à Turin) et de terminer au premier rang des médailles à Vancouver.

- Avec Jean-François Bégin