(Montréal) À moins de neuf mois du coup d’envoi des Jeux olympiques de Tokyo, les athlètes se donnent corps et âme pour se préparer à un évènement dont la tenue demeure incertaine. La pandémie de la COVID-19 qui perdure fait donc peser un stress supplémentaire sur les Olympiens.

« Nous vivons une période avec beaucoup d’ambiguïté, on ne sait pas de quoi vont avoir l’air les Jeux. Nous avons 50 % d’athlètes qui n’ont même pas eu encore leurs compétitions de qualification. On ne connaît pas encore le calendrier pour 2021. C’est ça qui est difficile à gérer pour les athlètes », explique Amélie Soulard, préparatrice mentale pour l’Institut national du sport du Québec (INS).

S’entraîner malgré la COVID-19

Madame Soulard explique que les athlètes sont non seulement stressés face à cette incertitude qui plane sur la tenue des Jeux, mais également à propos du retour à l’entraînement.

« Le retour à l’entraînement implique devoir sortir, prendre le métro, venir s’entraîner, il y a toujours un doute pour les Olympiens : est-ce que mes coéquipiers font aussi attention que moi ? Est-ce qu’ils pourraient me transmettre le virus ? Est-ce que je pourrais leur transmettre la maladie ? C’est une inquiétude présentement », mentionne-t-elle.

Les Olympiens, à l’aide de préparateurs mentaux, se donnent des trucs pour surmonter un stress aussi grand. Pierre-Alexandre Rousseau, ancien Olympien des Jeux de Vancouver, où il avait terminé cinquième dans l’épreuve des bosses en ski acrobatique, combattait le stress à l’aide d’un mécanisme de blocage.

« Je me faisais ce que j’appelle un lavage de cerveau. Tout ce à quoi je pensais et qui n’était pas lié à l’activité ou à ma performance, donc susceptible de me nuire, je l’éliminais. Le stress des Olympiques était énergisant, le fun à vivre, car j’étais en parfait contrôle de moi », explique-t-il.

Selon Nathalie Lambert, cheffe de mission de l’équipe canadienne à Vancouver en 2010, Marnie McBean, qui remplira ce rôle à Tokyo, aura un mandat similaire au sien.

Le chef de mission devra « être en mode gestion de crise et trouver des solutions avant même que le problème n’arrive. Si les Jeux ont lieu, ils vont s’assurer que c’est un environnement sécuritaire et acceptable pour les athlètes », énonce Lambert.

Contrôler ce qui est contrôlable

Si Jeux devaient être annulés, les athlètes seront les victimes de circonstances hors de leur contrôle. Lambert a vécu une expérience similaire. Elle avait raté ce qui devait être ses derniers Jeux olympiques, soit ceux de Nagano en 1998, en raison d’une blessure.

« J’avais l’impression d’avoir perdu trois années d’investissement, mentionne-t-elle. Cette journée-là [celle où je m’étais cassé la cheville] a été catastrophique pour moi. »

Pierre-Alexandre Rousseau a lui aussi subi une blessure, dans son cas une fracture cervicale qui l’avait mis sur la touche pendant plus d’un an. Il détaille le chemin de la rédemption.

« Il faut que tu acceptes que ça arrive. Une fois que c’est accepté, il faut ensuite que tu te dises : OK, il y avait des choses que je voulais changer dans ma vie, c’est le moment. »

De l’espoir, aussi

Le Canada a été le premier pays à annoncer sa décision de ne pas envoyer ses athlètes si les Jeux avaient eu lieu comme prévu l’été dernier. Ce n’était pas la première fois que le Canada n’envoyait pas ses athlètes à des Jeux. Il l’avait fait aux Jeux de Moscou de 1980 en raison de l’invasion de l’Afghanistan par l’Union soviétique.

« Ça va être une expérience fort probablement très différente, les Jeux de l’été prochain, mais ça va être une expérience extraordinaire : les émotions, les bonheurs et les tristesses extrêmes, le sentiment de valorisation vont être comme à n’importe quels Jeux olympiques », conclut Lambert.