(Paris) Quarante contrôles antidopage positifs « dissimulés » ont été mis au jour par une enquête indépendante visant la Fédération internationale d’haltérophilie (FIH) et son président démissionnaire, le Hongrois Tamas Ajan, selon un rapport publié jeudi.

Cette enquête menée par le juriste canadien Richard McLaren, auteur du rapport qui avait mis en lumière en 2016 un système de dopage institutionnalisé en Russie, fait suite aux accusations de corruption et de dopage venues d’un documentaire de la chaîne allemande ARD diffusé début janvier. Elle est intervenue après que des scandales similaires ont touché les fédérations internationales d’athlétisme et de biathlon dernièrement.

Après ces révélations, M. Ajan, 81 ans, dont vingt à la présidence de la FIH et plus du double à des fonctions dirigeantes de l’organisation sportive, s’était mis provisoirement en retrait. Il a fini par démissionner mi-avril.

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Le juriste canadien Richard McLaren, chargé par l'Agence mondiale antidopage d'enquêter sur divers scandales de dopage.

« Des preuves montrent que le président a interféré dans le travail de la commission antidopage indépendante de la FIH […] L’investigation a mis au jour 40 contrôles positifs dissimulés dans les dossiers de la FIH. »

Quarante sportifs sales auraient dû être suspendus, mais ont pu continuer à concourir, ceci incluant des médaillés d’or et d’argent (lors de compétitions internationales) parce que leurs échantillons n’ont pas été traités

Richard McLaren depuis Toronto au cours d’une vidéoconférence.

Ces éléments ont « été transmis à l’Agence mondiale antidopage (AMA) », a-t-il précisé. Aucune épreuve olympique n’en aurait été « affectée », selon un de ses collaborateurs. Les enquêteurs se sont toutefois concentrés sur la décennie 2009-2019.

Culture de la peur et argent comptant

« Nous avons mis en évidence des failles de gouvernance systémiques et une corruption au plus haut niveau de la FIH », a également expliqué le juriste canadien, en évoquant « une culture de la peur qui a perduré même après la démission de M. Ajan », qualifié de « leader autocratique pendant près d’un demi-siècle ».

M. Ajan établissait son contrôle sans partage sur l’IWF par « une tyrannie de l’argent comptant », dont il était « l’unique percepteur », selon le rapport.

« Il est absolument impossible de déterminer quelle part de l’argent collecté ou retiré a été utilisé pour des dépenses légitimes », mais près de dix millions de dollars « sont introuvables », peut-on y lire.

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Le Hongrois Tamas Ajan a démissionné de son poste de président de la la Fédération internationale d’haltérophilie. Il manque 10 millions de dollars dans les coffres.

Le Comité international olympique (CIO) a qualifié dans un communiqué de « profondément préoccupantes » les conclusions du rapport McLaren et a assuré qu’il allait « continuer à soutenir les efforts de l’IWF et de son président par intérim pour réformer en profondeur sa gouvernance et sa gestion ».

« En outre, le CIO va contacter l’AMA pour déterminer s’il y a des cas de dopage concernant les Jeux olympiques et y donner les suites nécessaires », ajoute le texte du CIO.

L’Agence Mondiale Antidopage (AMA) a elle « accueilli favorablement » jeudi soir la publication du rapport, saluant tout le travail réalisé par l’équipe de McLaren.  

Depuis le début de l’enquête en janvier, le service indépendant d’enquête et de renseignement (I & I) de l’AMA a « assisté » les enquêteurs et va « continuer à le faire », indique l’AMA dans un communiqué transmis à l’AFP.

« L’AMA reste en liaison permanente avec les enquêteurs de l’équipe McLaren qui ont indiqué leur volonté de fournir à l’AMA toutes les preuves significatives qu’ils ont réunies. Quand l’AMA aura eu le temps d’examiner ces preuves et le rapport McLaren complet, elle prendra les mesures appropriées », conclut le texte.