Les Jeux olympiques de Tokyo ont été reportés il y a un mois. Mais il y a encore plus de questions que de réponses au sujet de la nouvelle date du 23 juillet 2021 et sur la forme que prendront ces jeux.

Face à la pandémie de coronavirus, les Jeux olympiques vont-ils vraiment s’ouvrir dans 15 mois ? Si oui, sous quelle forme ? Devant des spectateurs ? Sans spectateurs ? Peuvent-ils avoir lieu si un vaccin n’est pas disponible ? Les télédiffuseurs et les commanditaires assurent 91 % des revenus du Comité international olympique. Quelle pression exerceront-ils sur la forme que prendront ces Jeux olympiques ? Qu’en est-il des Jeux olympiques d’hiver de Pékin, qui s’ouvriront en février 2022. C’est en Chine que le coronavirus a frappé pour la première fois et le gouvernement autoritaire a été draconien en termes de confinement et de restrictions de voyage.

PHOTO EUGENE HOSHIKO, AP

Une gare de Tokyo où circulent des passagers tous masqués le 27 avril 2020. Les Jeux de Tokyo ont été remis à 2021, mais un mois après cette décision, il demeure plus de questions que de réponses sur la forme que prendront les Jeux d’été de 2021.

Le président du CIO, Thomas Bach, a déjà déclaré qu’il n’y avait « aucun modèle » pour planifier ce qu’il a qualifié de « gigantesque casse-tête ».

« Je ne peux pas promettre de solutions idéales, a-t-il dit. Mais je peux promettre que nous ferons tout pour avoir les meilleurs jeux possible pour tout le monde.

Q : Certains scientifiques sont sceptiques quant à l’ouverture des Jeux olympiques de Tokyo dans 15 mois. Quelles sont les perspectives ?

R : De nombreux scientifiques pensent que des Jeux olympiques avec la présence de spectateurs ne peuvent être envisagés tant qu’un vaccin n’est pas trouvé. Il faudra probablement patienter de 12 à 18 mois, disent les experts, et ensuite il y aura des questions sur l’efficacité, la distribution et qui l’obtiendra en premier. Kentaro Iwata, professeur japonais des maladies infectieuses, a affirmé la semaine dernière : « Je suis très pessimiste quant à la tenue des Jeux olympiques l’été prochain, à moins que vous ne teniez les Jeux olympiques dans une structure totalement différente, comme sans aucun public ou une participation très limitée. » Yoshitake Yokokura, président de l’Association médicale du Japon, est arrivé à la même conclusion lors d’une récente entrevue. Des Jeux olympiques à huis clos semblent plus probables, ce qui est le scénario dans de nombreux sports. Les partisans avides d’action pourraient s’être habitués à cette nouvelle réalité au moment de la tenue des Jeux olympiques.

Q ; Le report des Jeux olympiques coûtera cher. Qui prendra en charge les dépenses ?

R : En deux mots : les contribuables japonais. Les organisateurs japonais et le CIO ont déclaré qu’ils « évaluaient » les coûts supplémentaires. Ils n’ont pas osé une estimation — du moins pas publiquement. Les estimations au Japon varient de 2 à 6 milliards US. Le Japon en tant que pays hôte est lié par le contrat signé en 2013 à payer la plupart des factures. Le CIO a déjà déclaré que ce retard lui coûterait « plusieurs centaines de millions de dollars ». Le membre du CIO John Coates, qui supervise les préparatifs de Tokyo, a déclaré que cet argent irait aux fédérations internationales et aux comités nationaux olympiques en difficulté, et non aux organisateurs japonais. Le Japon a initialement déclaré que les Jeux olympiques coûteraient 7,3 milliards. Officiellement, le budget est maintenant de 12,6 milliards, bien qu’un comité d’audit national l’évalue au double. Tout sauf 5,6 milliards est de l’argent public. Et maintenant viennent les coûts du retard. Les organisateurs de Tokyo ont été contrariés la semaine dernière par un communiqué du CIO. Sur son site Internet, l’organisme a affirmé que le premier ministre Shinzo Abe avait assuré que le Japon prendrait en charge les coûts supplémentaires. Le CIO a supprimé cette déclaration, même si, en principe, elle est exacte.

Q : Où en sommes-nous avec les sites et le village olympique ?

R : On n’en sait pas beaucoup jusqu’à présent. Le directeur général du comité organisateur Toshiro Muto a expliqué qu’il faudrait du temps pour voir si tous ces sites pouvaient être utilisés. Bien sûr, certains peuvent nécessiter une renégociation des contrats. Les propriétaires de tous les sites seront soumis à une pression énorme pour coopérer afin que le calendrier de compétition d’origine puisse être maintenu. Le centre des congrès Big Sight de Tokyo devrait demeurer le centre des médias. Muto a déclaré qu’il avait été configuré pour les Jeux olympiques et a laissé entendre qu’il resterait probablement de cette façon. Les Jeux olympiques attirent 11 000 athlètes de 206 nations. Les Jeux paralympiques en ajoutent 4400 de plus.

Q : Qu’en est-il des billets ?

R : Les organisateurs ont dit qu’ils essaieraient d’honorer les billets déjà achetés. Les autorités disent qu’un total de 7,8 millions sont disponibles. Les organisateurs ont prévu 800 millions US de revenus provenant de la vente de billets, et une demande sans précédent a poussé ce chiffre à un milliard. Cela représente environ 15 % des 5,6 milliards de dollars du budget de fonctionnement financé par le secteur privé. Ce montant ne peut pas être sacrifié avec les factures qui s’accumulent. Il en va de même pour les 3,3 milliards dans le cadre de commandites locales. Des problèmes surgiront si les détenteurs de billets ne sont pas autorisés à assister et veulent des remboursements. Les billets comportent une clause de « force majeure » qui pourrait libérer les organisateurs de l’obligation de rembourser. Cependant, il n’est pas clair que la pandémie de la COVID-19 peut servir de justification.

Q : Dans quelle mesure le CIO dépend-il des revenus des diffuseurs et des commanditaires ?

R : 91 % des revenus du CIO proviennent de ces deux sources – les diffuseurs et les commanditaires – et 73 % proviennent des diffuseurs. Bach a soutenu que le CIO n’avait pas de problèmes de « liquidités » et que le comité disposerait d’un fonds de réserve d’environ un milliard. Mais il ne met en scène que deux évènements tous les quatre ans, la quasi-totalité de la source de ses 5,7 milliards de revenus sur un cycle de quatre ans. Ce n’est pas comme une ligue de soccer ou de baseball avec des milliers de matchs. Il a besoin des Jeux olympiques d’été. Le diffuseur américain NBC paie plus d’un milliard pour diffuser chaque Jeux olympiques. Le CIO fera tout pour que les Jeux olympiques se tiennent, sous quelque forme que ce soit.

Q : Où se trouve la flamme olympique, arrivée de Grèce le 26 mars ?

R : Elle a été retirée de l’exposition publique au début du mois dans la préfecture de Fukushima, située à 250 kilomètres au nord-est de Tokyo. Muto a déclaré après l’annulation du relais de la flamme olympique que « la flamme olympique a été placée sous la direction de Tokyo 2020. Il est évident qu’à l’avenir, il est possible qu’elle soit exposée quelque part. Cependant, pour l’instant, elle est sous la direction de Tokyo 2020 et je ne ferai aucun autre commentaire sur la question. » Il est question que le CIO envisage une tournée mondiale de la flamme, dans l’espoir de l’utiliser comme un outil de relations publiques et un symbole de la lutte contre le virus. Cependant, tout projet en ce sens serait impossible jusqu’à ce que les restrictions de voyage soient levées. Retirer la flamme du Japon pourrait également déranger les hôtes. La Chine a utilisé la flamme pour une tournée mondiale en 2008, ce qui a suscité des protestations contre les politiques chinoises en matière des droits de la personne. À l’époque, le président du CIO, Jacques Rogge, a déclaré que la « crise » menaçait les Jeux olympiques. Depuis, aucun tour du monde avec la flamme n’a eu lieu.