(Paris) « Aucune considération du risque », « irresponsable » : plusieurs figures du sport mondial sont montées mercredi au créneau, au lendemain de la décision du Comité international olympique (CIO) de maintenir les Jeux olympiques 2020 en dépit de la pandémie de nouveau coronavirus.

« Le CIO nous demande de continuer à mettre en danger notre santé, celle de nos familles et des gens, juste pour s’entraîner chaque jour ? » a accusé sur Twitter la perchiste grecque Katerina Stefanidi. « Il n’y a aucune considération du risque qu’ils nous imposent », a fulminé la championne olympique 2016.

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La perchiste grecque Katerina Stefanidi.

Mardi, la Commission exécutive du CIO a jugé lors d’une réunion téléphonique « pas nécessaire de prendre des décisions radicales » au sujet des JO, prévus du 24 juillet au 9 août à Tokyo. « Toute spéculation à ce stade serait contre-productive », a-t-elle encore averti.

La décision du CIO a surpris, alors que le même jour étaient annoncée l’annulation d’évènements phares du sport mondial comme l’Euro et la Copa America de football, Roland-Garros en tennis ou encore Paris-Roubaix en cyclisme.

« Je pense que l’insistance du CIO à maintenir sa ligne, avec tant de conviction, est insensible et irresponsable », a estimé de son côté l’ancienne hockeyeuse Hayley Wickenheiser, quadruple médaillée d’or aux JO et membre du CIO.

« Du point de vue des athlètes, je ne peux qu’essayer de compatir en imaginant l’anxiété et le déchirement que ressentent les athlètes à l’heure actuelle », a affirmé la Canadienne dans un communiqué publié sur Twitter.  

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Hayley Wickenheiser lors de son intronisation au Temple de la renommée du hockey canadien l'automne dernier.

« Je ne vois pas pourquoi les Jeux ne pourraient pas être reculés de quelques mois », a de son côté estimé dans le journal Le Soir un autre membre du CIO, le Belge Pierre-Olivier Beckers.

« Situation exceptionnelle »

Face au torrent de critiques, l’instance faîtière de l’olympisme a réagi mercredi en affirmant qu’il n’existait « pas de solution idéale dans cette situation ».

« C’est une situation exceptionnelle qui appelle des solutions exceptionnelles », a déclaré un porte-parole du CIO, alors que des réunions se poursuivent entre le président de l’instance, les comités nationaux olympiques et des représentants des sportifs.

« Il faut faire confiance au CIO », a assuré à l’AFP Guy Drut, ancien ministre français des Sports et membre de l’instance. « Pour l’instant, ils font le maximum pour que les Jeux aient lieu au moment prévu. »

Signe de cette volonté de temporiser, les tournois de qualification olympique (TQO) ont d’ailleurs tardé à se mettre en pause, celui de boxe pour l’Europe à Londres n’étant arrêté qu’au troisième jour de compétition, lundi.

Mercredi, un TQO de gymnastique prévu à Tokyo les 4 et 5 avril a été annulé en raison de la pandémie de coronavirus. À l’heure actuelle, seuls 57 % des quelque 11 000 sportifs qui doivent participer sont déjà qualifiés pour la grand-messe olympique.

Le scepticisme grandit au Japon

« Laissons-nous le temps de voir comment la situation évolue, on n’est pas à deux semaines ou un mois près pour annuler », a temporisé auprès de l’AFP le quintuple champion olympique de biathlon Martin Fourcade, tout juste retraité.  

« Aujourd’hui, ça ne sert à rien de spéculer, on est encore loin des Jeux », a-t-il ajouté, président de la commission des athlètes de Paris-2024 et candidat pour intégrer la commission des athlètes du Comité international olympique (CIO) en 2022.  

Rien à faire : même au Japon, le scepticisme grandit quant à la tenue des Jeux : un sondage publié lundi par l’agence de presse Kyodo montre que 69,9 % des personnes interrogées ne croient pas que Tokyo pourra accueillir comme prévu les JO.

Une autre enquête de la chaîne de télévision publique NHK, réalisée du 6 au 9 mars, soulignait que 45 % des Japonais étaient désormais opposés au maintien des JO comme prévu, et 40 % pour.

Mercredi, plus de 194 000 cas d’infection à la COVID-19 avaient été dénombrés dans 150 pays et territoires depuis le début de l’épidémie. Près de 8000 décès ont été enregistrés.