«Habituellement, je refuse toujours d'assister au tirage au sort, expliquait Roger Federer, vendredi midi, dans la grande salle de conférence de Roland Garros. Mais quand les organisateurs m'ont dit que c'étaient les champions en titre qui avaient l'habitude de le faire, je n'ai pas osé refuser!»

Pour la première fois de sa carrière exceptionnelle, le Suisse est bien le champion défendant à Paris et ce retour à Roland Garros n'est pas sans émotion pour lui. «J'ai retrouvé le court Philippe-Chatrier avec beaucoup de plaisir l'autre jour à l'entraînement. Je me suis rappelé les derniers points de la finale, l'endroit où je me suis agenouillé après le dernier point. C'est comme si mes empreintes étaient maintenant gravées sur ce court pour toujours.»

En 2009, Federer a finalement remporté la seule manche du Grand Chelem qui manquait à son palmarès en disposant en finale du surprenant Suédois Robin Soderling. Ce dernier avait battu plus tôt dans le tournoi le grandissime favori Rafael Nadal, qui avait disposé de Federer dans les trois finales précédentes.

Vainqueur ensuite à Wimbledon, le Suisse est maintenant le champion le plus titré de l'histoire avec 16 titres du Grand Chelem. On pourrait croire qu'il n'a plus rien à gagner, mais il n'entend pas ralentir. Numéro un mondial pendant 284 semaines, il égalerait le record de Pete Sampras (286) en maintenant son rang à la fin du tournoi. Il devra toutefois faire mieux que Nadal, ou perdre la finale contre l'Espagnol, pour conserver le premier rang. Federer pourrait aussi devenir le premier joueur en 18 ans à remporter les deux premiers tournois du Grand Chelem d'une saison.

«Je suis plus détendu, c'est certain, mais la pression est toujours là et c'est bien comme ça, a-t-il estimé. Je me sens bien. Avoir gagné ici me donne une confiance sur cette surface que je n'avais peut-être pas avant, même si j'avais joué de bons matchs.

Battu le week-end dernier à Madrid par Nadal, Federer reconnaît dans l'Espagnol son principal adversaire. «Notre rivalité est la plus importante du tennis, c'est vrai, a-t-il convenu. Chacun de nos matchs est intéressant, quel que soit l'endroit. Nous avons été un an sans nous affronter et cela m'a manqué.

«Peut-être nous affronterons-nous à nouveau dans deux semaines (en finale), peut-être devrons-nous attendre encore un an. On ne sait jamais, le tableau est très relevé et tous les joueurs que nous affrontons rêvent de nous battre.»

Nadal a retrouvé son invincibilité

Malgré son titre de 2009 et son statut de première tête de série, Federer n'est pas le favori du tournoi. Le quadruple champion Rafael Nadal est de retour en pleine forme et il a retrouvé ce printemps son invincibilité sur la terre battue. C'est donc dans ses meilleures dispositions qu'il retrouve Paris.

«C'est l'une des plus belles villes que je connaisse et c'est un grand plaisir de revenir à Roland Garros. J'ai été 11 mois sans gagner, mais là, je viens de gagner trois titres très importants pour moi (Monte-Carlo, Rome et Madrid). Je voulais absolument regagner un tournoi et j'ai été plus détendu après Monte-Carlo.»

Plus serein, Nadal n'entend pas pêcher par excès de confiance, surtout pas contre Federer, même s'il a dominé son rival dans la majorité de leurs derniers affrontements. «Ce n'est qu'en finale que je risque de le rencontrer et je ne suis jamais trop confiant en finale, quel que soit l'adversaire. Et lui est l'un des meilleurs joueurs de l'histoire, le meilleur selon moi. Alors, vous pensez bien que je ne serai pas trop confiant!»

La fiche éblouissante de l'Espagnol à Roland Garros - 31 victoires, une défaite - lui permet quand même d'afficher une certaine assurance. Un cinquième titre l'approcherait du record de six détenu par le Suédois Bjorn Borg.

Nadal a toutefois tenu à rappeler que le tournoi était ouvert et qu'il fallait aussi compter avec les conditions particulières du stade. «La terre battue est vraiment différente ici et il faut s'y habituer avec soin si on veut être à l'aise. Le vent est aussi très important, surtout sur le central. Quand on l'a de face, c'est difficile d'évaluer la longueur de ses coups. Heureusement, j'y ai joué souvent et je commence à m'y sentir bien...»

Les adversaires de Nadal apprécieront sûrement cette pointe d'ironie.