Les organisateurs du tournoi de Wimbledon ont certainement dû se mordre les doigts en regardant les derniers Internationaux d’Australie.

Sept mois après le fiasco britannique, les choix de l’All England Club et du gouvernement anglais ont toujours des répercussions sur l’ATP et la WTA.

Novak Djokovic, Aryna Sabalenka et Elena Rybakina se sont vengés par la bouche de leur raquette du traitement controversé, encore à ce jour, subi l’été dernier à l’occasion du troisième tournoi du Grand Chelem de la saison.

Djokovic a été intouchable, comme prévu, du début à la fin. Sa victoire contre Stéfanos Tsitsipás en finale lui a permis de remporter un dixième titre à Melbourne.

Avec ce triomphe, il a retrouvé lundi matin le premier rang mondial. Là où il aurait dû terminer l’année 2022.

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Novak Djokovic

En juin dernier, les organisateurs du tournoi de Wimbledon ont choisi d’interdire la participation des joueurs russes et biélorusses en réponse à l’invasion de l’armée russe en Ukraine.

Cette décision avait fait grandement réagir. D’une part, les athlètes russes ou biélorusses n’étaient pas responsables de la guerre. D’autre part, parce qu’à Wimbledon, les joueurs ne représentent pas leur pays. Il ne s’agit pas d’une compétition internationale comme les Jeux olympiques ou la Coupe Davis. La couleur du drapeau n’a donc aucune importance dans ce contexte.

Les deux associations de tennis professionnel ont condamné cette décision du plus prestigieux tournoi de l’histoire. Ainsi, pour éviter de pénaliser les joueurs bannis au classement, l’ATP et la WTA ont choisi d’un commun accord de lever l’attribution de points pour tous les participants.

En 2023, les effets de ce chaos se font encore ressentir.

Djokovic a amorcé les Internationaux d’Australie comme quatrième tête de série. Avec les 2000 points qu’il aurait dû recevoir à Wimbledon, il aurait été le favori. A priori, ce ne sont que trois places de classement. Toutefois, la première tête de série est avantagée dans chacun des tournois en affrontant des joueurs moins bien classés.

Djokovic aurait pu se faire prendre au piège, mais son jeu est trop juste. Il est passé à travers tous ses adversaires comme un bulldozer sur la rue principale.

En quête de reconnaissance

Du côté féminin, les effets ont été plus considérables.

La gagnante de Wimbledon, la sous-estimée Rybakina, a été impeccable en Australie. Elle s’est inclinée en finale, mais la qualité de son jeu et sa capacité à maintenir des échanges même en difficulté ont confirmé la valeur de son triomphe à Wimbledon. Ce titre n’était pas un hasard et son ascension n’est pas un feu de paille.

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Elena Rybakina

Les choses auraient cependant pu mal tourner pour la Kazakhe d’origine russe. Puisqu’elle a aussi été privée des 2000 points, elle est arrivée en Australie en 25e place au classement mondial. En réalité, elle aurait dû être huitième et profiter d’un tableau beaucoup plus avantageux.

Au quatrième tour, elle était confrontée à la favorite Iga Świątek. Jamais un affrontement en première semaine n’aurait mis aux prises deux joueuses du top 10. Rybakina a eu le meilleur parce qu’elle est parvenue à rivaliser en fond de terrain et à limiter Świątek. La Polonaise a perdu au change. Si elle avait vraiment affronté une joueuse à l’extérieur du top 20, elle aurait sûrement eu son billet pour la deuxième semaine. Avec une joueuse de calibre top 10 dans les pattes, elle a été évincée trop rapidement.

Rybakina a fait un saut de 15 places au classement. Elle pointe au dixième rang mondial. Jusqu’en juin, cependant, il faudra ajouter 2000 points imaginaires à son positionnement pour connaître sa réelle valeur. Si les choses avaient été faites dans les règles de l’art, elle serait cinquième mondiale.

Sabalenka, enfin

Sabalenka, de retour au deuxième rang mondial, n’a pas volé son titre en Australie. Elle était, jusqu’à la semaine dernière, la meilleure joueuse au monde sans titre majeur.

Par le passé, l’athlète de 24 ans avait disputé trois demi-finales. Si Sabalenka a enfin pu s’imposer, c’est grâce à sa maturité et à sa nouvelle manière de gérer ses matchs.

Féroce et délicate dans ses frappes et son allure, Sabalenka est l’une des compétitrices les plus affamées du circuit. Elle est aussi l’une des plus exigeantes envers elle-même. En demi-finale des Internationaux des États-Unis contre Leylah Fernandez, en 2021, Sabalenka avait laissé échapper le match parce qu’elle avait été incapable de gérer ses émotions. Fernandez avait exploité cette faiblesse.

La Sabalenka victorieuse à Melbourne est aux antipodes de la joueuse qu’elle était par le passé.

Dans la première manche de la finale, la Biélorusse était incapable d’imposer son service. Rien ne fonctionnait. Au lieu de broyer du noir et de se laisser emporter par sa frustration, elle souriait. Parce qu’elle savait qu’elle avait ce qu’il fallait pour en faire fi et remonter la pente.

À partir de la deuxième manche, Sabalenka s’est exprimée comme jamais elle ne l’avait fait auparavant. Son jeu était troublant de beauté. Elle a terminé le match en sanglots, sur le dos, entourée de flashes de caméras, avec le titre le plus important de sa carrière.

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