(Londres) Wimbledon a exclu les Russes et les Bélarusses de l’édition 2022 du Majeur sur gazon en raison de la guerre en Ukraine, devenant le premier tournoi de tennis à écarter individuellement ces joueurs, une décision vivement critiquée par l’ATP et la WTA.

Daniil Medvedev, N.2 mondial, Andrey Rublev (8e), Aryna Sabalenka (4e et demi-finaliste l’an dernier), Anastasia Pavlyuchenkova (15e) et Viktoria Azarenka (ex-N. 1 aujourd’hui 18e) ne pourront donc pas défendre leurs chances à Londres.

« Dans les circonstances d’une agression militaire injustifiée et sans précédent, il serait inacceptable que le régime russe tire le moindre bénéfice de la participation de joueurs russes ou biélorusses », explique le tournoi du Grand Chelem britannique dans un communiqué publié mercredi. Cette décision pourrait être revue si les « circonstances changent radicalement d’ici juin », ajoute le texte.

« Nous reconnaissons que cette décision est dure pour les personnes individuellement affectées, et c’est avec tristesse qu’ils vont souffrir des actes des leaders du régime russe », ajoute le président du All England Club qui accueille l’épreuve, Ian Hewitt.

« Discrimination »

Les quatre tournois du Grand Chelem, Open d’Australie, Roland-Garros, Wimbledon et US Open, sont indépendants des circuits hommes et femmes, où Russes et Bélarusses sont toujours autorisés à participer aux tournois, sous bannière neutre.

Du reste, l’ATP a qualifié d’« injuste » la décision prise par Wimbledon, d’autant qu’elle s’étend à l’ensemble des tournois sur gazon de cet été en Grande-Bretagne, notamment le Queen’s et Eastbourne, qui sont sous l’égide de l’ATP.

« La discrimination basée sur la nationalité constitue également une violation de nos accords avec Wimbledon aux termes desquels la participation d’un joueur n’est basée que sur son classement. Nous allons maintenant analyser […] la suite à donner à cette décision », a souligné l’ATP dans un communiqué.

La WTA s’est elle aussi déclarée « très déçue » de l’annonce faite par Wimbledon qu’elle estime « ni juste, ni justifiée », ajoutant qu’elle aussi allait « évaluer les actions qu’elle peut prendre » suite à cette décision.  

De son côté, le N.1 mondial Novak Djokovic a qualifié la décision du tournoi de Wimbledon de « folle », tout en déclarant qu’il « condamnerait toujours la guerre, étant lui même un enfant de la guerre » à l’issue de son premier match au tournoi de Belgrade.

A ce jour, la Fédération française (FFT) qui organise Roland-Garros (22 mai-5 juin) n’a pas prévu d’exclure les joueurs russes et biélorusses.  

La Fédération américaine (USTA), qui organise l’US Open (29 août-11 septembre), a quant à elle indiqué mercredi soir qu’« à l’heure actuelle, (elle) n’a(vait) pas pris de décision concernant la participation de joueurs russes et biélorusses » à l’édition 2022 du Majeur américain.  

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« Il est déchirant de voir combien de personnes innocentes ont été affectées et continuent de l’être par cette violence », a déclaré Victoria Azarenka en mars.

Suivant les recommandations du Comité international olympique (CIO), les sportifs russes et biélorusses ont été bannis de nombreuses compétitions d’athlétisme, de patinage artistique ainsi que des Jeux paralympiques de Pékin, du Mondial de football, des Mondiaux de natation…

Condamnations discrètes

En tennis, les tournois en Russie et en Biélorussie ont été annulés et les deux nations ont été exclues des compétitions par équipes (Coupe Davis et Billie Jean King Cup, toutes deux remportées par la Russie l’an dernier).

« Une nouvelle fois, ils font des sportifs les otages de préjugés politiques, d’intrigues politiques […] C’est inacceptable », avait déclaré le porte-parole du Kremlin Dmitri Peskov, avant même l’annonce officielle de Wimbledon.

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Andrey Rublev

Depuis le début du conflit, les joueurs concernés ont été discrets dans leurs condamnations, bien que le Russe Andrey Rublev ait écrit « Pas de guerre s’il vous plaît » sur une caméra de télévision lors d’une compétition à Dubaï juste après l’invasion. « Je veux la paix dans le monde entier », s’est contenté de dire Medvedev, en convalescence après une opération.

La Bélarusse Azarenka, ancienne N.1 mondiale et sacrée à deux reprises à l’Open d’Australie, s’est montrée plus explicite. « Il est déchirant de voir combien de personnes innocentes ont été affectées et continuent de l’être par cette violence », a déclaré la joueuse en mars.

Ces déclarations sont toutefois jugées insuffisantes par des joueurs ukrainiens, dont Elina Svitolina (ex-N. 5) qui ont demandé mercredi à l’ATP et la WTA d’exclure les Russes et Bélarusses s’ils ne répondaient pas correctement à trois questions énoncées dans un communiqué : « Soutenez-vous l’invasion […], soutenez-vous les activités militaires […], soutenez-vous les régimes de Poutine et Loukachenko ? ».