(Paris) À 34 ans, Novak Djokovic a remporté son deuxième tournoi de Roland-Garros et son 19e titre du Grand Chelem, dimanche, aux dépens du Grec Stéfanos Tsitsipás, 6-7 (6/8), 2-6, 6-3, 6-2, 6-4, et lancé un message fort aux jeunes qui veulent sa place comme aux anciens : qu’on l’aime ou pas, c’est actuellement lui le plus fort.

Car avec ce nouveau sacre, après 2016, sur les terres de l’Espagnol Rafael Nadal qu’il a éliminé en demi-finale, le Serbe est devenu le seul joueur de l’ère Open (depuis 1968) à avoir remporté au moins deux fois chacun des quatre tournois du Grand Chelem.

Et, déjà vainqueur des internationaux d’Australie cette année, il revient à une longueur du record de 20 titres majeurs codétenu par Nadal et le Suisse Roger Federer. En attendant Wimbledon et les Internationaux des États-Unis, où il sera favori.

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Novak Djokovic

« J’ai joué presque neuf heures au cours des 48 dernières heures contre deux grands champions. C’était vraiment dur physiquement et mentalement, mais j’ai fait confiance en mes capacités et je savais que j’en étais capable », a déclaré Djokovic après sa victoire finale en 4 h 11 min

Djokovic est également devenu le seul joueur à avoir battu Nadal deux fois sur la terre battue parisienne.

La première manche contre Tsitsipás a été accrochée, et au fur et à mesure que le deuxième se développait, on se demandait comment Djokovic pourrait revenir dans le match. Mais après la perte de la deuxième manche, il est sorti se changer. Revenu vêtu de rouge, il a changé le cours de l’histoire.

« C’est un rêve qui se réalise encore une fois », a-t-il déclaré, juste avant de recevoir le trophée des mains de Björn Borg, le Suédois aux six titres sur la terre battue parisienne.

Expérience

Alors que Tsitsipás cédait, physiquement et mentalement, Djokovic a fait jouer son expérience : âgé de 34 ans, il a su garder les idées claires jusqu’au bout, sur un court Philippe-Chatrier rempli à un tiers – 5000 personnes – pour des raisons sanitaires, mais chauffé à blanc.

La balle de match remportée, Djokovic a d’abord affiché une joie intériorisée, bras levés vers le ciel, salut habituel aux quatre tribunes du court, avant de s’avancer vers son box où étaient ses parents et sa femme, et de laisser éclater sa joie dans un hurlement extatique.

Pendant ce temps, Tsitsipás était prostré, la tête sous une serviette. Puis peu après, il retenait ses larmes sur le podium, ayant entre les mains non pas la Coupe des Mousquetaires qu’il a un temps cru à sa portée, mais le plateau du finaliste.

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Stéfanos Tsitsipás

« Novak a démontré quel grand champion il était et j’espère qu’un jour, j’aurai réussi la moitié de ce qu’il a réussi », a commenté le Grec après avoir joué sa première finale dans un tournoi majeur.

J’ai fait de mon mieux. J’ai fait un bon tournoi et je suis content de moi.

Stéfanos Tsitsipás

« Je sais que c’est dur, mais au tennis, il ne peut y avoir deux vainqueurs », lui a dit Borg.

À 22 ans, Tsitsipás était le joueur de la relève à avoir mis le plus de temps à confirmer son potentiel, malgré un titre aux Masters de fin d’année en 2019. Mais cette année, il a remporté son premier Masters 1000, à Monte-Carlo, et se présentait à Roland-Garros en leader du classement de la saison.

Désormais, il est dans la cour des grands. Djokovic, lui, dans celle des géants.

« Le meilleur des trois »

Djokovic a passé dimanche l’obstacle le plus difficile de sa saison : en remportant Roland-Garros, il est désormais en mesure de réaliser le Grand Chelem et de devenir indiscutablement le meilleur joueur de tous les temps.

Au moins statistiquement. Car Federer et Nadal garderont vraisemblablement toujours un avantage dans le cœur des fans.

Pour preuve, Djokovic lui-même a tenu à le souligner comme avec un certain étonnement : durant sa demi-finale d’anthologie contre Nadal, il a été autant soutenu que l’Espagnol par le public.

« L’atmosphère était électrique et le public nous a beaucoup encouragés, tous les deux ! », a répété à plusieurs reprises le Serbe, qui est généralement le champion mal-aimé, à la recherche de la popularité de ses deux grands rivaux.

Depuis la fin de la saison dernière, Djokovic a égalé le record de l’Américain Pete Sampras pour le nombre d’années terminées à la place de numéro un mondial (6). Et depuis mars, il est devenu le joueur ayant passé le plus de semaines à cette place – il débutera sa 324e ce lundi.

Il avait alors annoncé que cet objectif étant atteint, il allait désormais se consacrer entièrement au record de 20 titres du Grand Chelem codétenu par ses deux grands rivaux. Il en a remporté 19 depuis son premier en 2008 (Australie). Sur la même période, Nadal en a décroché 17 et Federer, 8.

Sacré pour la neuvième fois en février aux Internationaux d’Australie, son tournoi majeur préféré en termes de résultat, Djokovic a décroché dimanche son deuxième titre à Roland-Garros, après celui de 2016.

Vainqueur du dernier Wimbledon (en 2019) en battant Federer en finale après un match épique à la fin duquel il a sauvé deux balles de match avant de s’imposer, Djokovic en a déjà gagné cinq et a toutes les qualités pour en gagner encore.

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Novak Djokovic et la Coupe des Mousquetaires

Idem aux Internationaux des États-Unis, où il a été sacré trois fois et où les deux derniers tournois, dont il était favori, lui ont échappé sur abandon en 2019 et disqualification en 2020.

Donc, théoriquement, Djokovic est sur la voie royale pour établir cette année un nouveau record de titres majeurs, il pourrait en avoir 21 au soir des Internationaux des États-Unis, soit un de mieux que Federer et Nadal.

Et surtout, il pourrait devenir le premier joueur depuis Rod Laver en 1969 à réussir le mythique Grand Chelem, soit décrocher les quatre tournois majeurs la même année. Le sien pourrait même être un « Golden Slam » s’il remportait l’or aux Jeux olympiques, ce qu’aucun joueur n’a fait.

On doit commencer à parler du meilleur de tous les temps.

Mats Wilander, consultant pour Eurosport

« Je n’avais jamais vu un plus beau match de tennis sur terre battue », avait commenté le Suédois Mats Wilander, triple vainqueur de Roland-Garros, à l’issue de la demi-finale entre Djokovic et Nadal.

« C’était du tennis sur terre porté à un niveau bien supérieur au mien parce que c’était si rapide, et que Novak mettait tellement de rythme dans ses coups. Les déplacements, le touché au filet, l’aspect athlétique, tout était incroyable », avait-il ajouté.

Une autre statistique plaide en faveur de Djokovic : à ce jour, il a un bilan victoires-défaites positif contre Federer (27-23) et Nadal (30-28).

« Djokovic, c’est le meilleur des trois. Je l’ai toujours dit. Si les trois sont au sommet de leur art, c’est lui qui gagne. L’histoire nous a raconté ça. Pour moi, c’est le plus fort », a estimé dans L’Équipe Patrick Mouratoglou, entraîneur de Tsitsipás.