Félix Auger-Aliassime n’avait jamais joué sur le gazon dans des tournois professionnels avant cette saison. Pas sûr qu’il ait maintenant envie de jouer sur une autre surface !

Le Canadien a remporté hier à Londres deux victoires significatives contre des adversaires de fort calibre, l’Australien Nick Kyrgios et le Bulgare Grigor Dimitrov, pour se qualifier en quarts de finale du tournoi du Queen’s. Il y retrouvera le favori Stéfanos Tsitsipás, sixième mondial, qu’il a battu lors de leur seul duel en carrière, plus tôt cette saison.

En deux semaines, Auger-Aliassime a compilé une fiche de 6-1 sur le gazon. Finaliste à Stuttgart pour son premier tournoi, il a vite ajusté son jeu à une surface qui met en valeur la puissance de ses services et de ses coups droits. Et depuis trois jours, le joueur de 18 ans a aussi fait preuve d’une remarquable maturité en composant avec un horaire compliqué par la pluie.

Obligé, comme plusieurs de ses rivaux, de disputer deux matchs hier, Auger-Aliassime a d’abord réussi à se débarrasser de Dimitrov en deux manches de 6-4, 6-4, et ce, en tout juste 1 heure 15 minutes. Le Bulgare (45e) était 3e mondial il y a à peine un an, mais il n’a pas toujours la même motivation que son jeune rival. Auger-Aliassime ne lui a laissé aucune ouverture et il n’a eu qu’à convertir deux des trois balles de bris qu’il a eues pour filer avec la victoire.

Rester calme

Deux heures plus tard, les choses ont été un peu plus compliquées dans une victoire de 6-7 (4), 7-6 (3), 7-5 devant Kyrgios. L’Australien est une curieuse « bibitte », capable du meilleur comme du pire. Il l’a encore montré hier avec des coups spectaculaires, mais aussi un manque flagrant d’effort sur certains points et des crises monstrueuses pour des vétilles.

Kyrgios y est notamment allé d’une violente sortie contre les décisions des juges de ligne et de l’arbitre, qu’il a accusés de « truquer le jeu ». En conférence de presse, il a en a remis une couche : « L’arbitre savait que j’allais réagir. Tous les arbitres le savent, ils en parlent, bien sûr. Ils savent que je ne serai jamais le genre de joueur qui reçoit une mauvaise décision et la laisse passer […] Et [l’arbitre] sait que je vais devenir fou. […] Si vous êtes assis sur la chaise et que vous ne changez pas [la décision], c’est que vous ne faites pas votre travail correctement. »

Sifflé par le public, Kyrgios a insisté.

« Je joue avec mon cœur et je dois faire face à des arbitres idiots et à des idiots dans la foule. Qu’est-ce que je dois faire ? Bien sûr que je vais riposter ! » — Nick Kyrgios

Auger-Aliassime, et c’est tout à son honneur, a su garder sa concentration tout au long d’un match au cours duquel il a eu droit à tout l’éventail des coups et des divagations verbales de Kyrgios.

Tout de même doté d’un excellent service, l’Australien n’a cédé que deux balles de bris et ce n’est que dans le dernier jeu qu’il a finalement subi le seul bris de tout le match. De son côté, Auger-Aliassime n’a jamais été en position d’être brisé et, après avoir laissé filer le jeu décisif de la première manche, il a facilement enlevé celui de la seconde.

La dernière manche a encore été très disputée, mais on sentait que Kyrgios avait de plus en plus de difficulté à maîtriser ses émotions. Il a ainsi tenté quelques coups discutables – un service par-dessous, notamment – dans des situations critiques, et cela a fini par le rattraper.

Le match a quand même duré près de 2 heures 15 minutes, assez longtemps pour éviter à Auger-Aliassime d’avoir à disputer un troisième match, en double celui-là, avec l’Australien Alex de Minaur. Ce n’est que partie remise, puisque le duo pourrait devoir jouer deux matchs demain, après le simple de Félix contre Tsitsipás.

Ce serait toutefois étonnant qu’il ne déclare pas forfait en double s’il se qualifie pour les demi-finales du simple. Même à 18 ans, il faut quand même ménager ses efforts !

Raonic tiendra-t-il le coup ?

Tout de même dommage que Milos Raonic soit continuellement gêné par des problèmes de santé. Finaliste à Wimbledon en 2016, le Canadien est l’un des maîtres du jeu sur le gazon et il s’est qualifié hier pour les quarts de finale du tournoi du Queen’s avec une victoire de 6-3, 7-6 (3) sur le Slovène Aljaž Bedene.

PHOTO TONY O’BRIEN, REUTERS

Milos Raonic

Il affrontera aujourd’hui l’Espagnol Feliciano López (113e), qui a profité du malheureux forfait de l’Argentin Juan Martin del Potro (gravement blessé au genou droit) pour accéder aux quarts de finale. Une victoire de Raonic pourrait lui valoir un rendez-vous avec son compatriote Auger-Aliassime si ce dernier a le dessus sur Stéfanos Tsitsipás.

Les deux Canadiens devaient justement s’affronter en demi-finale, la semaine dernière à Stuttgart, mais Raonic avait dû déclarer forfait en raison d’une blessure. En proie à des malaises récurrents au dos, le joueur de 28 ans tente visiblement de s’économiser avant le tournoi de Wimbledon, tout en s’assurant d’avoir retrouvé tous ses repères sur l’herbe.

Raonic a réussi 40 as en deux matchs au Queen’s et il s’est assuré jusqu’ici de raccourcir les échanges, quitte à s’exposer un peu au filet. C’est de cette façon qu’il pourrait aller loin à Wimbledon, si son corps tient le coup…

Shapovalov attend son heure

C’est sur le gazon que Denis Shapovalov a remporté son plus grand titre chez les juniors, à Wimbledon en 2016, mais cette surface ne lui a pas encore souri chez les professionnels.

Le joueur de 20 ans n’a remporté que deux de ses dix derniers matchs et il vient d’être éliminé au premier tour des deux tournois préparatoires pour Wimbledon. Le Torontois n’a pas les mêmes atouts physiques que Félix Auger-Aliassime et il a parfois de la difficulté à s’imposer devant les joueurs plus costauds, qui sont légion sur le circuit ATP.

Soyons toutefois patients avec Shapovalov. Comme le soulignait récemment Louis Borgifa, le directeur du développement à Tennis Canada, il n’est sans doute qu’à une victoire ou deux d’un gros déclic.