Un an tout juste après sa maternité compliquée, Serena Williams est aux portes d'un sacre historique à plus d'un titre, en finale de l'US Open, samedi (16 h) à New York.

Une victoire face à la jeune Japonaise Naomi Osaka (19e), première représentante de son pays à atteindre une finale majeure, à vingt ans, et Serena égalera, avec 24 couronnes, le record absolu de trophées en Grand Chelem détenu par Margaret Court, championne australienne des années 1960-1970.

À 36 ans et 349 jours, elle deviendra la lauréate la plus âgée de l'ère Open en tournoi majeur en repoussant les limites de sa propre longévité : c'est déjà elle qui détient ce record, établi lors de son sacre à l'Open d'Australie en 2017, à 35 ans et 125 jours.

Une victoire et Serena se fera une place, aussi, dans le cercle très fermé des joueuses victorieuses en Grand Chelem après être devenues mères. La dernière à avoir réussi cette prouesse, c'est Kim Clijsters, sacrée à Flushing Meadows en 2009, dix-neuf mois après avoir mis au monde sa fille Jada. La Belge n'a alors que 26 ans.

« Aussi loin, aussi vite... »

Avant elle, ça n'était plus arrivé depuis 1980, quand l'Australienne Evonne Goolagong s'était imposée à Wimbledon, à presque 29 ans, trois ans après la naissance de son premier enfant. En 1973, l'année suivant sa première maternité, et celle de ses 31 ans, Court avait elle été jusqu'à s'offrir un « petit Chelem » (Open d'Australie, Roland-Garros, US Open).

Une victoire et Serena s'emparera seule, enfin, du record de titres remportés à l'US Open dans l'ère Open. Six fois victorieuse à New York (1999, 2002, 2008, 2012, 2013 et 2014), elle le partage pour l'instant avec sa compatriote Chris Evert.

Toucher du doigt ce chapelet de jalons historiques, douze mois seulement après sa maternité suivie de complications, la reine américaine du tennis ne l'aurait pas imaginé.

« Arriver aussi loin, aussi vite... », s'est-elle étonnée jeudi. « Je n'aurais pas du tout pu prédire cela.»

« Revenir de si loin seulement un an après, pas seulement m'entraîner, mais être en finale ici, et même atteindre deux finales d'affilée, alors que j'étais dans un lit d'hôpital, que je ne pouvais ni bouger ni marcher, ni rien faire d'autre... »

À la même époque en 2017, « j'en étais à ma troisième opération, il m'en restait encore une », s'est souvenue la cadette des soeurs Williams.

Alitée six semaines

Car après son accouchement, « tout a mal tourné », résume-t-elle en janvier dans une interview au magazine Vogue, en s'exposant sur la couverture avec sa fille Olympia. Découverte de caillots de sang dans les poumons alors qu'elle avait déjà fait une embolie pulmonaire en 2011-, cicatrice de césarienne rouverte à cause de fortes quintes de toux, hématome à l'abdomen : la joueuse aux 23 couronnes en Grand Chelem reste alitée six semaines.

Son retour sur le circuit, repoussé de janvier à mars, est poussif. Jusqu'à Wimbledon, où l'ex-N.1 mondiale se hisse en finale mi-juillet. Mais l'Allemande Angelique Kerber, N.4 mondiale, l'empêche alors de couronner de succès son courageux retour (6-4, 6-4).

À Flushing Meadows, Serena tient une deuxième occasion d'y parvenir. Face à elle, une joueuse qui a remporté leur unique face-à-face (6-3, 6-2), à Miami alors qu'elle entamait à peine son retour, mais encore inexpérimentée. À 20 ans, Osaka n'avait jamais dépassé les huitièmes de finale en Grand Chelem avant la quinzaine new-yorkaise.

La joueuse nippone, dont la mère est japonaise et le père né en Haïti, mais qui a grandi aux États-Unis, vit un rêve éveillé.

« Quand j'étais enfant, je rêvais que je jouais Serena en finale d'un tournoi du Grand Chelem, a-t-elle confié de sa voix fluette, désarmante de sincérité. Ca m'a l'air un peu surréaliste.»

« Il ne faut pas que je la voie comme mon idole, mais juste comme une adversaire », a souligné Osaka.

La réalité ressemblera-t-elle jusqu'au bout à ses rêveries ? « Dans mon rêve, je ne perds pas... »