À l'époque où elle était la « Swiss Miss », Martina Hingis trônait au sommet du classement mondial et empilait les victoires en Grand Chelem. Dans la seule année 1997, elle en a remporté trois. Chaque fois, elle jouait devant les plus grandes foules, dans les plus grands stades.

Le contraste était donc frappant, hier, quand elle se produisait sur le terrain numéro 9, une modeste installation où peuvent s'entasser au maximum près de 2000 spectateurs. Ils étaient environ 200 dans les gradins quand Hingis et sa partenaire Sania Mirza ont infligé une bastonnade de 6-1 et 6-1 à l'Américaine Shelby Rogers et à la Britannique Naomi Broady.

En un sens, pourtant, c'est comme si rien n'avait changé en près de 20 ans. Hingis a gagné trois tournois de Grand Chelem depuis juin 2015. Elle occupe encore le premier rang mondial.

Mais tout ça, c'est en double. Ses succès, elle les partage désormais avec Mirza, avec qui elle forme un redoutable duo qui a déjà gagné 41 matchs de suite !

« Nous pensions bien que nous aurions de bons résultats ensemble, mais gagner 41 matchs d'affilée, personne n'aurait pu le prévoir », admet Mirza.

« Nos forces se sont conjuguées dans notre équipe, ce qui explique nos résultats depuis presque deux ans, ajoute l'Indienne de 29 ans. Ce que je ne fais pas bien, ma partenaire le fait très bien, et ce qu'elle ne fait pas si bien, je le fais très bien. »

DEUX VISAGES

Après leur victoire, Hingis et Mirza ont vite été entourées de spectateurs qui tentaient de leur arracher des autographes, un jeu auquel Mirza semblait plus encline à se prêter. « Une chance que sa partenaire était là pour sourire », a d'ailleurs lancé une spectatrice, visiblement déçue par l'attitude de Hingis.

En point de presse, sa personnalité était tout aussi difficile à saisir. Tantôt, elle pousse une blague sur son âge. Puis la femme de 35 ans semble s'impatienter entre les questions. Avant la conférence, un relationniste annonce qu'elle ne répondra pas aux questions sur les Jeux de Rio. Une journaliste tente tout de même sa chance. « Tout ce que j'avais à dire, je l'ai dit sur Instagram et sur Facebook », répond-elle, un brin irritée.

À l'inverse, sur le terrain, un sourire était imprimé en permanence sur son visage. Montréal n'avait peut-être jamais vu un athlète aussi jovial depuis Lyle Odelein.

Il faut dire que les succès que Hingis connaît avec Mirza ont de quoi la mettre de bonne humeur. Ça, et une certaine légèreté qui vient avec le jeu en double.

« C'est différent, c'est moins stressant, explique l'Helvète. La routine est différente. Nous nous entendons très bien sur le terrain. C'est très amusant de jouer avec Sania. Nous faisons aussi d'autres choses ensemble. Nous aimons bien sortir, voir des gens. Cela contribue à souder l'équipe. Les émotions ne sont pas seulement sur le court. Il est important d'être sur le court ce que l'on est en dehors des courts. Le double est notre priorité à toutes les deux. Avant, nous avons eu des partenaires qui jouaient en simple, c'était plus difficile. »

En fait, le double n'est pas seulement la priorité de Hingis, elle a carrément abandonné le simple ! Depuis qu'elle est sortie de sa deuxième retraite, en 2013, elle a disputé un seul tournoi en simple, et c'était en Fed Cup, en avril 2015, sous les couleurs de la Suisse. Deux matchs, deux défaites.

LA LONGÉVITÉ

Les amateurs canadiens de tennis sont bien conscients de la longévité que peut avoir un joueur de double. Daniel Nestor a 43 ans, sa carrière tire à sa fin, mais en janvier dernier, il a atteint la finale des Internationaux d'Australie.

Hingis fêtera son 36e anniversaire en septembre. Se voit-elle jouer jusque dans la quarantaine ? La question a mené à un échange rigolo entre elle et sa partenaire.

« Il ne faut jamais dire jamais, lance Hingis. Je suis déjà revenue deux fois, alors... »

« C'est facile quand on n'a pas d'enfants ! », d'ajouter Mirza. « [Nestor] en a déjà », rétorque Hingis.

« Mais c'est un homme, il n'est pas obligé [d'accoucher] », rappelle Mirza.

« Il peut amener toute sa famille, conclut Hingis. Mais si l'une de nous doit s'arrêter, ce sera fini. Je ne pense pas que l'une ou l'autre revienne encore ! »