Même si elle est la plus jeune joueuse du top 10 mondial, même si elle a déjà réussi une saison au-delà de tous les espoirs, même si la suite de sa carrière est pleine de promesses, Eugenie Bouchard aborde l'Omnium des États-Unis avec une immense pression sur les épaules.

La Montréalaise de 20 ans va jouer à New York bien plus que des matchs de tennis.

Le US Open est LE grand tournoi de l'année pour les commanditaires et les réseaux de télévision américains, le seul qui est diffusé aux heures de grande écoute dans les marchés les plus lucratifs.

Avant même d'avoir disputé son premier match, Eugenie a déjà marqué plusieurs points. Le New York Times Magazine lui a consacré un long reportage dans son numéro spécial consacré à l'Omnium, et la Québécoise y est présentée comme la «tennis's next big shot». Par ailleurs, Bouchard est toujours mentionnée dans la courte liste des favorites du tournoi, aux côtés de vedettes établies comme Serena Williams et Maria Sharapova, même si elle n'est que la huitième tête de série.

L'Américaine Pam Shriver, une ancienne championne de doubles en Grand Chelem aujourd'hui analyste au réseau ESPN, a répété cette semaine en entrevue que Bouchard était «The Real Thing» (une authentique grande vedette): «Ce qu'elle a accompli cette saison en Grand Chelem est vraiment remarquable. C'est rare qu'une joueuse soit ainsi capable de se dépasser dans les grandes occasions, surtout à son âge.»

Selon Shriver, les récentes contre-performances de Bouchard n'ont rien d'inquiétant et même une défaite rapide à New York ne ternirait pas sa réputation de gagnante. «Le plus difficile pour elle sera sans doute de rejouer en Australie, à Roland-Garros ou à Wimbledon dans la peau d'une favorite, un peu comme elle le fait déjà ici.

«Mais les gens comprennent que même les meilleures ne gagnent pas toujours. C'est aussi la personnalité des vedettes qui les intéresse et «Genie» semble déjà l'avoir très bien compris...»

Jeux de coulisses

Dans les coulisses du tournoi, le clan Bouchard va tenter de monnayer cette popularité. Le contrat qui lie la jeune athlète à l'agence Lagardère Unlimited prend fin dans quelques semaines et plusieurs grandes agences ont déjà contacté Julie Leclair, la mère d'Eugenie, pour discuter affaires.

Même si elle a 20 ans et demi, Bouchard s'appuie encore beaucoup sur sa mère. Cette dernière est toujours dans son ombre, parfois même à ses côtés sur les courts, comme on l'a vu pendant les entraînements de la Coupe Rogers au stade Uniprix. Mme Leclair est ainsi directement impliquée dans toutes les négociations avec les agences, mais aussi les commanditaires, les médias et même aussi les entraîneurs, même si sa fille et elle ont développé une relation très solide avec Nick Saviano depuis qu'elles ont déménagé en Floride il y a huit ans.

Sharapova - le modèle de Bouchard - disait il y a quelques semaines à Montréal combien il est important d'être bien entouré quand on atteint un certain niveau. «Il faut vraiment avoir une équipe solide autour de nous, des gens en qui on a pleine confiance et qui nous libèrent de tous les tracas extérieurs au tennis.»

C'est une telle équipe qui a permis à Sharapova de devenir l'athlète féminine la plus riche du monde et ce n'est probablement pas un hasard si Max Eisenbud, l'agent de la Russe, est régulièrement vu dans l'entourage de Bouchard depuis quelques mois.

Une occasion à saisir

La qualification de Bouchard pour la finale de Wimbledon lui a offert une formidable visibilité et des revenus importants. Sa défaite l'a toutefois privée de l'opportunité en or d'accéder d'un coup à un statut rarement atteint au tennis féminin.

D'une certaine façon, l'Omnium des États-Unis est une autre de ces opportunités. Sharapova rappelait l'autre jour: «Dans une carrière, on n'a pas beaucoup d'occasions de jouer des grandes finales. Quand j'ai gagné à Wimbledon [à 17 ans!], j'ai pensé que je reviendrais en finale très vite en Grand Chelem. Ça m'a pris plus de deux ans avant d'en jouer une autre...»

Personne ne pourra tenir rigueur à Bouchard d'une performance ordinaire à New York, d'autant plus qu'elle n'est visiblement pas dans sa meilleure forme physique. Mais le grand public - qui ne s'intéresse qu'aux tournois du Grand Chelem et se moque des «bobos» des athlètes - s'attend à beaucoup d'elle.

Après tout, n'est-elle pas «la prochaine grande» du tennis?

Les Canadiens

Raonic aux portes de la gloire

Joueur canadien le mieux classé de l'histoire - il est actuellement sixième mondial -, Milos Raonic progresse lentement vers le sommet de la hiérarchie du tennis masculin. À 23 ans, le colosse de 6'5'' aux services de feu a acquis cette saison une constance qui lui permet d'inquiéter régulièrement les meilleurs. Reste à confirmer tout cela en Grand Chelem et Milos semble près du but. Après une demi-finale à Wimbledon, un titre à Washington et de bonnes performances en Masters 1000 à Toronto et Cincinnati, Raonic est cinquième favori à New York avec un parcours à sa portée jusqu'en quart de finale. Et comme Roger Federer - sa Némésis des derniers tournois - est dans l'autre partie du tableau, qui sait jusqu'où il ira? En principe, on va parler de lui souvent au cours des deux prochaines semaines...

Françoise Abanda dans le tableau principal

Françoise Abanda a franchi une autre étape importante de sa carrière, hier à New York, en se qualifiant pour le tableau principal de l'Omnium des États-Unis. La 205e joueuse mondiale a facilement vaincu la Japonaise Misa Eguchi (152e) en 2 manches de 6-0 et 6-2. La Montréalaise de 17 ans, qui aurait pu jouer le tournoi junior, va plutôt disputer son premier tournoi du Grand Chelem avec les meilleures joueuses du monde.

Des chances en double

Traditionnellement la chasse gardée de Daniel Nestor, vainqueur de huit titres en Grand Chelem, les doubles masculins pourraient couronner un autre Canadien, Vasek Pospisil, qui a déjà triomphé à Wimbledon avec l'Américain Jack Sock. Le duo a aussi remporté le tournoi d'Atlanta, en plus d'aller en finale à Cincinnati. Et il ne faudrait pas enterrer Nestor trop vite! Même s'il aura 42 ans pendant le tournoi, il reste un redoutable spécialiste, quel que soit son partenaire.

Polansky ne peut se qualifier

Chez les hommes, le Torontois Peter Polansky a échoué de justesse dans son dernier match des qualifications. Le 126e mondial, 10e favori des qualifications, a été surpris par le Japonais Taro Daniel (186e), 6-4, 5-7 et 3-6, non sans avoir eu plusieurs chances de prendre l'avantage. Polansky a souligné après le match sur Twitter que l'arbitre avait infirmé six décisions contre lui dans la manche décisive...

PHOTO DAVID BOILY, ARCHIVES LA PRESSE

Françoise Abanda