Un tremblement de terre a secoué Roland-Garros dimanche avec l'élimination dès les 8e de finale du maître des lieux, Rafael Nadal, quadruple tenant du titre, mis au martyre par le Suédois Robin Soderling lors des quatre sets les pires de sa carrière, 6-2, 6-7 (2/7), 6-4, 7-6 (7/2).

Non seulement le Majorquin a été battu, ce qui aura été un coup de tonnerre quel que soit l'auteur du crime de lèse-majesté, mais il l'a en plus été par un adversaire de second plan, classé 25e mondial, à qui il venait d'infliger un 6-1, 6-0 il y a à peine un mois à Rome.

Cette défaite, la première de Nadal sur la terre battue parisienne, est une des plus énormes surprises de l'histoire du tennis moderne. Même l'échec de Pete Sampras à Wimbledon en 2001, lui aussi en huitièmes de finale alors qu'il était en quête d'un quintuplé historique, ne peut lui être comparé car le vainqueur se nommait alors Roger Federer, grand champion en devenir.

Le vaincu a «pris la défaite avec calme», en se disant que «cela devait bien finir par arriver». «Ce n'est pas une tragédie. Maintenant il faut avoir assez d'ouverture d'esprit pour voir ce qui s'est mal passé et travailler», a-t-il réagi.

Nadal arrivait plus favori que jamais et personne ne s'était risqué à imaginer un échec. Pour la première fois, il se présentait en tant que N.1 mondial et détenteur de trois des quatre titres du Grand Chelem (Roland-Garros, Wimbledon, Australie) et sa préparation sur terre battue avait été tout à fait conforme à ses habitudes, avec trois titres à Monte Carlo, Barcelone et Rome.

Bras engourdi

Certes il venait de perdre en finale de Madrid contre Federer, mais cet incident avait été mis sur le compte de l'altitude et d'un marathon de quatre heures disputé la veille face à Novak Djokovic.

Il faut croire que le mal était en fait plus profond, car l'Espagnol a été méconnaissable sur le Central.

Le bras gauche comme engourdi, il n'a jamais pu faire sortir de sa raquette les coups extraordinaires qui l'ont porté à la tête du tennis mondial. Les passings et les coups droits d'attaque qui écoeurent d'ordinaire ses adversaires ont fait place à une multitude de balles mal centrées ou carrément boisées.

Mis en permanence sur la défensive, le Majorquin a systématiquement été dominé dans l'échange. Cette fois-ci, il n'a pas pu compenser par sa débauche d'énergie habituelle car il est apparu étonnamment lent et pataud, perdant même à plusieurs reprises l'équilibre.

C'est Soderling qui l'a agressé avec son redoutable coup droit et sa grosse première balle de service. Le Suédois a connu une réussite exceptionnelle au premier set. Par la suite, il est revenu à un niveau un peu plus conforme à son standing habituel (59 fautes directes), mais Nadal, qu'on n'avait jamais vu aussi faible sur terre battue, n'a pas su en profiter.

Boulevard pour Federer

«Ce n'est pas son jeu qui m'a surpris, c'est plutôt le mien. Je n'ai pas joué mon meilleur tennis, je n'ai même pas joué mon tennis du tout. Je n'ai pas attaqué, j'ai joué très court, je lui ai rendu les choses faciles», a reconnu Nadal, qui restait sur une série de 31 victoires à Roland-Garros et sur 32 sets remportés d'affilée.

Face à un public hostile, même son fameux mental ne lui a pas permis de refaire surface. Il a ainsi eu le break dans le troisième set, mais n'a pas été capable de le conserver. Et c'est lui qui a sombré dans le tie-break final, se retrouvant rapidement mené 6 points à 1.

Sa défaite ouvre un boulevard à Roger Federer, d'autant qu'elle survient au lendemain de celle du Serbe Novak Djokovic, qui faisait figure de N.2 de la saison sur terre battue.

A moins qu'elle ne fasse le bonheur d'un outsider, car la pression a d'un seul coup augmenté sur les épaules du Suisse, pour qui c'est désormais l'année où jamais de remporter le seul titre majeur qui lui manque.

Pour ajouter encore à la dimension historique de la journée, la tenante du titre féminin, la Serbe Ana Ivanovic, a aussi quitté le tournoi en huitièmes de finale, battue par la jeune Bélarusse Victoria Azarenka 6-2, 6-3.