Un seul point peut tout changer. L’une savourait une médaille d’or qu’elle n’attendait nullement, l’autre en regrettait une perdue par cette infime marge.

Laurie Blouin et Maxence Parrot ont bien manœuvré dans des conditions météorologiques instables pour monter sur le podium à l’épreuve de grand saut aux Championnats du monde de surf des neiges d’Aspen, mardi.

Après une chute à son deuxième saut, Blouin ne pensait pas en avoir fait assez à son dernier essai pour améliorer la troisième place qu’elle détenait. Mais la chute de la Néo-Zélandaise Zoi Sadowksi Synnott, dernière concurrente à s’élancer, a permis à la planchiste de Stoneham de décrocher un deuxième titre mondial.

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La planchiste québécoise Laurie Blouin

« Je suis sans mots », a confié Blouin, qui en tremblait devant la caméra quelques secondes après la confirmation de sa victoire.

« Je suis comme : OK, ça vient de se passer, je viens de gagner ? Je suis juste vraiment contente de la façon dont j’ai ridé. La première marche du podium, je ne m’y attendais pas du tout. »

Avec 177,75 points, la Canadienne a devancé Sadowski Synnott par un seul point pour obtenir un deuxième sacre après celui en descente acrobatique en Espagne en 2017.

Légèrement blessée à une cheville avant son arrivée dans le Colorado, Blouin a joué de prudence pour sa dernière manœuvre, s’abstenant de tenter les trois rotations et demie (1260) que les plus jeunes commencent à intégrer.

« Je ne pensais pas que ça allait déloger Zoi. Je sais qu’elle va souvent haut et je ne suis pas allée très haut. Je suis juste vraiment contente de finir première. »

La Japonaise Miyabi Onitsuka, auteure d’un 1260 en première ronde, a gagné le bronze, avec 174,75 points.

Médaillée de bronze en slopestyle et quatrième au grand saut aux X Games, disputés au même endroit en janvier, Blouin s’enlève un poids en fonction de la qualification pour les Jeux olympiques de Pékin, qui s’ouvrent dans moins d’un an.

« Avec la COVID-19, plein de compétitions ont été annulées et remises. C’était difficile de se concentrer. On est chanceux de faire ce qu’on fait en ce moment pendant que le monde est sur pause. Nous, on voyage à travers le monde. C’est un peu ironique. Je suis juste heureuse de pouvoir compétitionner pendant cette année bizarre. »

Morris devance Parrot

Justement, Parrot a dû faire une croix sur les X Games après avoir reçu un diagnostic positif à la COVID-19, qui s’est plus tard révélé négatif. Une semaine plus tôt, il avait dû déclarer forfait pour une Coupe du monde en Suisse après la découverte de deux cas positifs dans l’entourage de l’équipe canadienne masculine.

Ces Championnats du monde de la FIS, les premiers de sa carrière, représentaient donc sa deuxième compétition de la saison. « Mon but initial était certainement d’aller chercher la médaille d’or », a exprimé Parrot, qui a dû s’avouer vaincu par un point derrière son compatriote Mark McMorris, premier Canadien sacré à cette épreuve.

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Maxence Parrot

Le Norvégien Marcus Kleveland, auteur du meilleur saut de la compétition en troisième ronde (un « cork » 1800), a complété le podium.

Troisième à l’issue de la première ronde – la faute à un « petit coup de talon » à l’atterrissage, selon son analyse –, le planchiste de Bromont a tenté le grand coup au deuxième tour. Il n’a cependant pas été en mesure de stopper sa rotation à l’atterrissage de son 1800, côté non naturel. « Si j’avais atterri ça, j’avais de très fortes chances de gagner », a-t-il affirmé.

Constatant de nombreuses erreurs chez ses rivaux, Parrot a décidé de réduire le niveau de difficulté de sa figure ultime, la ramenant à 1620.

« J’aurais aimé le faire un peu plus gros, aller un peu plus loin dans l’aire d’atterrissage. Malheureusement, je n’ai pas pu. Ça m’a donné la deuxième position, un point derrière Mark. Si j’avais été plus haut, j’aurais probablement pu déloger Mark, mais je suis content de la façon dont j’ai abordé la compétition. »

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Mark McMorris

Parrot a souligné les conditions changeantes à partir de l’échauffement (neige, pluie, vent, soleil), qui ont grandement compliqué la capacité des compétiteurs de moduler leur vitesse. « C’était très difficile de s’adapter, je suis content d’avoir réussi l’atterrissage de deux de mes trois sauts aujourd’hui. »

Un concours de circonstances a fait en sorte que Parrot, sixième en slopestyle vendredi, n’avait jamais disputé les Mondiaux FIS. Il privilégie les Jeux olympiques (argent en slopestyle en 2018) et les X Games (huit or). « Je vais être très franc, les Championnats du monde FIS, je ne vois pas ça plus prestigieux qu’une Coupe du monde. »

N’empêche, en comptant sa victoire à Kreichberg, l’athlète de 26 ans a maintenant aligné six podiums en grand saut. « Ça montre une belle constance. En ce moment, je sais que je suis dans une très bonne position en vue de la qualification olympique. Il n’y a encore rien de confirmé, mais avec mes résultats, je n’ai pas trop à m’inquiéter. »

Blouin et Parrot restent à Aspen pour une Coupe du monde de slopestyle, dont les qualifications commenceront vendredi. Parrot prendra ensuite la direction de la Suisse pour la dernière étape du circuit, tandis que Blouin rentrera chez elle pour préparer son déménagement dans une nouvelle maison. Une boîte sera un poil plus pesante.