(Manchester) Gage de l’intérêt grandissant de la boxe féminine : le crêpage de chignon entre promoteurs ?

Le patron d’Eye of the Tiger Management (EOTTM), Camille Estephan, souhaite voir sa protégée Mary Spencer se mesurer à Marie-Ève Dicaire avant longtemps. L’Ontarienne de 37 ans a fait des débuts professionnels explosifs, se forgeant une fiche immaculée de 7-0 avec 5 K.-O., le dernier contre Cynthia Lozano, dernière adversaire de Dicaire.

Lisez l’article « Boxe féminine ? Boxe tout court… »

Au début d’octobre, EOTTM a laissé entendre que la Québécoise parlait « des deux côtés de la bouche » dans une publication Twitter qui relayait un article de RDS où Dicaire exprimait son désintérêt pour un duel contre Spencer, première aspirante à sa ceinture de l’IBF. EOTTM a continué de la houspiller en demandant si une autre championne, « elle, dira oui au défi que Spencer représente ».

Le Journal de Montréal a remis le sujet sur la table en début de semaine, citant Estephan qui n’a pas aimé la façon de Dicaire d’affirmer « qu’elle n’avait aucun intérêt et qu’il n’y avait pas d’offre sur la table ».

Eye of the Tiger en a rajouté sur Facebook mercredi, quand le WBC a confirmé à Acapulco que Spencer devenait aspirante obligatoire de la ceinture à l’enjeu ce samedi à Manchester.

Yvon Michel ne la trouve pas drôle. « Mary Spencer a toujours été très, très courtoise et très respectueuse quand elle a dit qu’elle voulait se battre avec Marie-Ève Dicaire, a-t-il affirmé lorsque nous l’avons interrogé sur le sujet vendredi. Mais je déteste le jeu auquel joue son promoteur. C’est un bully. Quand [Spencer] sera peut-être désignée aspirante obligatoire si elle gagne son prochain combat, il écrit un hashtag : “Tu peux courir, mais tu ne peux pas te cacher.” »

« Il est irrespectueux envers ce que Marie-Ève a accompli, ce qu’elle est comme athlète. Tu n’as pas besoin de faire ça. Pourquoi tu fais ça ? Tu veux que ta boxeuse se batte en championnat du monde, mais tu as essayé de raconter à tout le monde que [Dicaire] se sauve, qu’elle a peur… Mary Spencer n’a jamais dit ça. »

Michel réitère qu’il n’a jamais reçu d’offre pour un combat potentiel qu’il anticipe moins payant que d’autres affrontements qui pourraient se profiler. Surtout, il n’accepte pas qu’on laisse entendre que Dicaire craint sa compatriote : « Voyons donc, elle est allée en plein milieu de la COVID à Flint, au Michigan, chez Claressa Shields, que je considère comme la meilleure boxeuse de l’histoire ! Qu’on dise qu’elle aurait peur… C’est cheap, vraiment cheap. »

Une longue minute

PHOTO LAWRENCE LUSTIG, BOXXER

Marie-Ève Dicaire

Après l’activation physique et le tressage de ses cheveux en matinée, Marie-Ève Dicaire se rendra avec son équipe au Manchester Arena pour observer la scène et le ring, en après-midi. Quand l’endroit sera vide, elle s’assoira dans les gradins en compagnie de son préparateur mental Jean-François Ménard pour une ultime rencontre, une tradition amorcée en 2018 avant son premier combat de championnat mondial à Québec.

Préparateur de Mikaël Kingsbury, Maxence Parrot et Damian Warren, entre autres, Jean-François Ménard note deux distinctions à la boxe : la présence d’un adversaire direct et la pause d’une minute entre les rondes.

« La particularité d’un sport de combat est qu’il y a beaucoup d’impondérables avec un autre être humain, a-t-il expliqué vendredi après-midi. Tu dois bien te maîtriser, mais aussi bien t’ajuster et t’adapter en fonction de ce qui vient vers toi. Ne l’oublions pas : Marie-Ève se prépare de façon exemplaire pour affronter [Natasha] Jonas, mais Jonas se prépare aussi de façon exemplaire. Elle va faire des choses pour mettre Marie-Ève dans le pétrin. Tu dois pouvoir t’adapter. »

La minute de pause entre les assauts est un autre élément sur lequel il a travaillé depuis son association avec la pugiliste il y a cinq ans.

« J’ai toujours dit à Marie-Ève que l’important n’est pas tant ce qu’elle fait entre les rondes, mais la façon dont elle gère la minute. Ce que j’ai remarqué à la boxe – et ce que je voyais avec Marie-Ève – est que dès que l’athlète arrive dans le coin, les entraîneurs commencent à donner des rétroactions. Mais à peut-être 175 battements par minute, ne viens pas me dire que l’athlète est vraiment réceptif et toute là pour écouter. J’ai dit à son entraîneur Stéphane [Harnois] de prendre les 10, 15, 30 premières secondes, si vous en avez besoin, pour juste la calmer. Quand le rythme cardiaque baisse, elle est beaucoup plus allumée et apte à écouter. »

À surveiller, donc, pendant les neuf minutes de pause si l’affrontement se rend à la limite des 10 assauts.