(Québec) La ministre de la Sécurité publique, Geneviève Guilbault, confirme que le Bureau du coroner mènera une enquête sur « les causes probables et les circonstances ayant mené au décès » de la boxeuse mexicaine Jeanette Zacarias Zapata, morte jeudi à l’âge de 18 ans.

L’athlète a succombé aux blessures à la tête qu’elle avait subies lors de son combat au stade IGA, samedi dernier, contre la Québécoise Marie-Pier Houle. Cette dernière s’est exprimée sur Facebook, en français et en espagnol, se disant « dévastée » par la triste nouvelle.

« À la suite de l’annonce de la terrible nouvelle du décès de Jeanette Zacarias Zapata, je suis dévastée. J’offre mes plus sincères condoléances à sa famille et à son conjoint Jovanni Martinez », a écrit Mme Houle. Vendredi après-midi, le compte Facebook de la boxeuse québécoise était désactivé.

Dans le cas d’une mort comme celle de Mme Zapata, le coroner intervient systématiquement puisqu’il s’agit d’une mort survenue « dans des circonstances violentes, obscures ou à la suite de négligences », explique-t-on au Bureau du coroner.

Le président de GYM, Yvon Michel, qui a organisé le combat, a affirmé vendredi sur Twitter que le coroner aurait son « entière collaboration et complète transparence […] concernant l’investigation sur la triste tragédie dont nous sommes tous affligés ».

L’enquête sera un processus privé. Le rapport définitif sera cependant de nature publique. La durée de l’enquête varie d’un cas à l’autre, mais peut être de plusieurs mois.

Faut-il mieux encadrer la boxe ?

Ce dénouement tragique suscite des débats dans le monde du sport, mais aussi dans la sphère politique, où des commentateurs et des politiciens exigent un meilleur encadrement de la boxe. Au Québec, les sports de combat sont encadrés par la Régie des alcools, des courses et des jeux (RACJ). Plus tôt cette semaine, la ministre responsable du Sport, Isabelle Charest, avait affirmé que l’organisme gouvernemental menait une enquête pour évaluer si les protocoles en vigueur avaient été respectés.

« Ce qu’on entend particulièrement du milieu de la boxe, c’est qu’au Québec, avec la RACJ, on a des procédures qui sont probablement les plus strictes dans le monde. Je pense que c’est déjà un pas en avant », avait-elle dit au moment où Mme Zapata était toujours dans le coma.

La responsable des relations médias de la Régie, MJoyce Tremblay, a affirmé à La Presse que l’organisme allait « participer activement avec le Bureau du coroner [dans son enquête] ».

« On continue de regarder tout ce qui s’est fait [dans ce cas précis]. La Régie est là pour protéger les boxeurs », a-t-elle assuré.

Une loi à revoir

Le député libéral Enrico Ciccone a commenté jeudi sur Twitter la mort de l’athlète mexicaine. « Quelle tristesse ! Il faut absolument des consultations avec les partenaires du milieu de la boxe et les intervenants pour une meilleure sécurité dans les sports. De nouveaux critères s’imposent, tout comme une enquête du coroner », a-t-il écrit.

En entrevue avec La Presse, vendredi, M. Ciccone a pressé la ministre de la Sécurité publique, Geneviève Guilbault, de réunir le milieu de la boxe pour déterminer si des mesures pouvaient être rapidement mises en place. Il souhaite également qu’elle soulève l’enjeu de la révision de la loi encadrant la RACJ au Conseil des ministres.

« La loi sur la Régie n’a pas été modifiée ou presque depuis les années 1990. [Depuis], la science du sport a progressé. Les façons de s’entraîner sont de plus en plus sophistiquées », a-t-il dit.

On a des rapports scientifiques sur les commotions cérébrales, mais on est encore à l’ère de la réglementation des années 1990. Ça ne fonctionne pas.

Enrico Ciccone, député

Le député de Marquette demande aussi à Québec de recueillir des données sur les commotions cérébrales dans le monde de la boxe.

Au cabinet de Mme Guilbault, on affirme que la ministre ne fera pas de commentaires pour l’instant, le temps que le Bureau du coroner fasse enquête.

« Qui accepte de risquer sa vie pour 1800 $ ? »

Dans une longue enfilade de messages sur Twitter, le chef parlementaire de Québec solidaire, Gabriel Nadeau-Dubois, a affirmé que de « sérieuses questions » devaient être posées aux promoteurs du combat entre Jeanette Zacarias Zapata et Marie-Pier Houle.

« Qui accepte de risquer sa vie pour 1800 $ ? Poser la question, c’est y répondre. On laisse des athlètes moins fortunés venir d’ailleurs prendre des risques à répétition pour nous divertir », a écrit M. Nadeau-Dubois.

Je suis content que le coroner mène une enquête. On a de sérieuses questions à poser aux promoteurs de ce match. Eux autres, ils ont empoché pas mal plus que les 1800 $ qu’espérait gagner madame Zapata.

Gabriel Nadeau-Dubois, chef parlementaire de Québec solidaire

Pour sa part, la députée du Parti québécois Méganne Perry Mélançon a déclaré vendredi qu’il était « nécessaire de tout faire pour mieux encadrer le sport et le rendre le plus sécuritaire possible ».

« Il faut aussi rapidement récolter toutes les informations et les données sur les commotions cérébrales et les blessures graves pour que nos jeunes athlètes puissent pratiquer [leur sport] en sécurité. Ce décès tragique doit minimalement mener à une enquête et à des actions concrètes pour sécuriser la pratique. La Régie devrait être modernisée en fonction des recommandations », a-t-elle ajouté.