Les agents de Georges St-Pierre l’avaient prévenu. Les consignes étaient claires. Garde ton téléphone près de toi entre 21 h et 22 h samedi soir. Tu vas recevoir un appel important.

St-Pierre était chez lui. Sur sa télé, le gala de l’UFC 249, présenté à Jacksonville dans un aréna vide. Un rare divertissement sportif en temps de pandémie.

Quand le téléphone a sonné, il a vu le nom du grand patron de l’UFC s’afficher : Dana White. « Je pensais qu’il m’appelait pour me parler de faire autre combat ! », rigole St-Pierre en entrevue avec La Presse.

Mais non, c’était plutôt pour lui annoncer une grande nouvelle, qui n’était en réalité qu’une formalité. St-Pierre, 38 ans, fera son entrée au Temple de la renommée de l’UFC un peu plus tard cette année.

« C’est une belle nouvelle. C’est tout un honneur », reconnaît celui qui aura défini son sport au tournant des années 2010.

Champion dans deux catégories de poids, St-Pierre est encore détenteur du record de défenses consécutives chez les mi-moyens (13 défenses).

Mais les chiffres ne disent qu’une infime partie de son histoire, celle d’un athlète hors norme, gentleman poli, travailleur acharné, qui a vengé ses deux seules défaites.

« Il est l’athlète le plus connu à provenir du Canada », a même écrit Dana White, avec une dose de provocation, dans un communiqué à propos de l’entrée de St-Pierre au Temple.

Au bout du fil, le principal intéressé se dit en paix. Il ne regrette rien de sa décision de prendre sa retraite, en partie à cause de problèmes de santé, une colite ulcéreuse qui s’est déclarée lors de son dernier combat, sa victoire contre Michael Bisping en novembre 2017.

« Pour revenir, il faudrait que ce soit à mes termes, dans quelque chose de spécial, et je ne pense pas que l’UFC soit prête à ça », note-t-il.

« C’est pas que je ne peux plus, c’est que je ne veux plus. À l’entraînement, je l’ai encore, je suis encore au top. Si tu me demandes après un entraînement, alors oui, ça me tente de compétitionner.

« Mais si tu me demandes quand je me lève le matin ou le soir avant d’aller dormir, ça ne me tente pas d’aller me remettre dans ce stress-là, ce zoo-là. Je suis bien où je suis en ce moment. »

« Je n’ai jamais aimé me battre »

GSP n’a jamais été la machine que certains ont voulu dépeindre. Il n’a jamais caché sa peur de monter dans l’octogone, les nuits d’insomnie avant ses combats.

Avec les années, le stress et la pression se sont accumulés. À un certain moment, le jeu n’en valait plus la chandelle.

Ce ne sont pas les dommages à la tête qui me font peur, c’est le stress. Le stress, on sait maintenant que c’est la cause de plusieurs maladies. Moi je suis un gars heureux dans la vie, en santé. Je suis bien où je suis.

Georges St-Pierre

PHOTO NATHAN DENETTE, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

« Je n’ai jamais aimé me battre, continue St-Pierre au bout du fil. Je le faisais parce que j’étais doté d’un talent, je faisais beaucoup d’argent, mais je n’aimais pas me battre. C’était un prix à payer pour obtenir la vie que je voulais.

« Je trouvais que c’était un bon marché. Mais je n’ai jamais aimé me battre dans la cage et au bout d’un certain temps l’intensité de cette pression, de ce stress, ça vient te chercher. »

Un projet en télévision

Cette franchise aura été un legs de St-Pierre, tout comme sa croisade contre le dopage ou sa décision tôt en carrière de soigner son image.

« Les arts martiaux mixtes étaient mal vus avant et c’est normal. Au début de ma carrière je voyais les athlètes des autres sports s’habiller en costard et cravate en conférence de presse et c’est pour ça que j’ai commencé à m’habiller comme ça, raconte-t-il. Je me disais que si on voulait être traités comme des athlètes professionnels, on devait agir comme des athlètes professionnels. »

Dans les dernières semaines, St-Pierre s’est mis à la course à pied et au vélo. Il se tient en forme. Mais à quoi cet homme intense va-t-il dédier ses énergies s’il ne remonte plus jamais dans l’octogone ? Mystérieux, St-Pierre évoque « quelque chose de très, très gros ».

« Il y a quelque chose qui s’en vient. Mais je ne peux pas en parler à cause des contrats. C’est quelque chose qui sera à la télé. Ça fait un an environ que je suis des cours intensément pour devenir meilleur », dit-il.

St-Pierre a déjà eu quelques expériences dans des films d’action. « Ce que j’ai fait auparavant, ce ne sera pas du tout pareil. Les gens vont voir une énorme différence. J’ai hâte que ça sorte. »

« Maintenant, toute la passion que je mettais dans les arts martiaux je la mets là-dedans et les gens vont voir le résultat bientôt j’espère. »

L’entrée de St-Pierre au Temple de la renommée de l’UFC doit avoir lieu plus tard cette année, lors d’une cérémonie.