Marie-Jeanne Parent n’a pas encore « sa classe » à elle, mais elle a terminé les cours de son baccalauréat en enseignement au primaire il y a quelques jours.

Au cours de son dernier stage, elle a eu un gros faible pour la maternelle. « Ils prennent pour de l’or tout ce que tu leur dis. Ils te regardent avec des grands yeux. »

Et que peut-elle leur dire, justement ? Pourquoi ne pas aborder, en des mots simples, son rêve olympique en boxe et la façon dont elle l’a jumelé avec des études universitaires ? Ou comment elle a surmonté une année 2018 marquée par les blessures ? En filigrane, elle peut surtout puiser dans le sport pour inculquer quelques valeurs importantes, croit-elle.

Tous mes élèves savent que je fais de la boxe. Quelqu’un qui ne fait pas de sport aura peut-être plus de difficulté à expliquer ce qu’est la persévérance et le fait d’atteindre ses limites pour se dépasser.

Marie-Jeanne Parent

En ce moment, elle met ce postulat à l’épreuve dans le cadre du processus de qualification olympique. La semaine prochaine, à Montréal, elle tentera de devenir championne canadienne et ainsi de gagner sa place pour le tournoi continental qui se tiendra du 26 mars au 3 avril en Argentine. Des billets pour les Jeux de Tokyo seront accordés au top 3 de sa catégorie (moins de 69 kg). Les autres pourront encore passer par un tournoi mondial de la dernière chance, à Paris, au mois de mai.

« Tu n’as pas le choix d’être confiante pour te qualifier pour les Jeux olympiques. Si tu as un doute, ça ne marchera pas, martèle la championne canadienne de 2017. Chaque athlète de haut niveau rêve des Jeux olympiques, c’est le but ultime. Mais pour moi, ce n’est pas tout et la vie ne s’arrête pas là. Il y a aussi les Championnats du monde, les Jeux panaméricains et les Jeux du Commonwealth. »

Pour l’instant, le palmarès de la jeune femme de 24 ans n’inclut qu’une présence à ces Jeux du Commonwealth, en 2018, en Australie. Retenue à la dernière minute après le désistement d’une autre boxeuse, elle est parvenue à remporter la médaille de bronze.

« C’était le rêve d’une vie. C’était ma première compétition internationale parce que, même si j’ai commencé très jeune, ça m’a pris du temps à faire des combats. Juste d’y aller, c’était gros. De monter sur le podium, c’était l’extase. Je suis contente d’avoir vu ça avant les qualifications olympiques. Je sais à quoi ressemble le niveau international. »

PHOTO MARCO CAMPANOZZI, LA PRESSE

Marie-Jeanne Parent à l’entraînement

Voilà donc le grand moment de la dernière année et demie. Disons que la suite est moins joyeuse. Quatre mois après son expérience australienne, elle a subi une déchirure des ligaments croisés antérieurs (LCA) du genou droit lors d’un entraînement. Elle souhaitait disputer les Championnats du monde peu après.

« C’est un arrêt de presque un an. J’ai manqué les qualifications pour les Championnats du monde et les Jeux panaméricains, peste-t-elle avant d’y trouver du positif. Je me suis beaucoup entraînée, mais différemment. J’ai fait beaucoup de nage et je passais trois heures, chaque jour, en réadaptation. J’ai mis l’accent sur le haut du corps et j’ai travaillé sur mes lacunes. La clé du succès après une telle chirurgie, c’est de bien faire ses exercices à fond tous les jours. Je l’avais déjà vécu avec mon genou gauche il y a six ans. »

La guigne s’est poursuivie après cet épisode. Un accident dans le gymnase a contraint les médecins à amputer une phalange de l’un de ses petits doigts. « J’étais découragée, mais ça n’a été que trois semaines d’arrêt. J’ai pu vite reboxer. »

Aujourd’hui, avec ces deux blessures dans le rétroviseur, elle dit ne ressentir aucune gêne sur le ring. Quels atouts pourraient alors lui permettre de se rendre aux Jeux de Tokyo ?

« Je suis une boxeuse avec une très bonne défensive. J’essaie de me faire toucher le moins possible et je crois que ça paraît bien aux yeux des juges. Je suis aussi très technique. Chacun de mes combats est comme un jeu d’échecs, j’essaie de trouver la faille chez l’adversaire. Je ne suis pas une bagarreuse dans l’âme. »

Le bon équilibre

En parallèle à sa carrière sportive, qui comprend de cinq à dix combats par année, Marie-Jeanne Parent a poursuivi ses études à l’Université Laval. Malgré les exigences et les horaires chargés, elle n’a eu aucun problème à concilier les deux aspects.

« Je suis quelqu’un qui aime avoir un rythme de vie assez actif. J’ai beaucoup d’énergie et je n’aime pas avoir trop de temps libre. Je me suis toujours dit que, dans la vie, pour me réaliser complètement, il fallait que je fasse du sport et les études. C’est facile de dérailler, et la boxe m’a permis d’aller dans la bonne direction. »

Pour payer le loyer et les factures, elle a également, dans les dernières années, travaillé dans un café et fait de la suppléance. Elle l’avoue : une carrière en boxe amateur n’est « vraiment pas payante », même lorsqu’on est membre de l’équipe canadienne.

« On a beaucoup de misère à amasser de l’argent pour participer aux compétitions. J’ai déjà dû refuser plein de compétitions parce que je ne pouvais pas y aller. […] Quand tu t’entraînes deux fois chaque jour, tu ne peux pas travailler à temps plein. Sinon, tu ne vois pas la fin. Je travaillais une à deux journées par semaine. »

Le jeu en vaudra peut-être la chandelle. Une participation aux Jeux olympiques : voilà une belle histoire à raconter aux élèves.