Dans un couloir de l’aréna Maurice-Richard, en route vers la zone mixte, Antoine Valois-Fortier croise le chemin de plusieurs judokas en herbe. Chacun d’entre eux veut prendre sa petite photo et voir d’un peu plus près la médaille qui pend à son cou. Elle est en argent.

« J’aurais vraiment aimé gagner une médaille d’or lors de ce premier Grand Prix devant toute ma gang, reconnaît celui qui se bat chez les moins de 81 kg. Le conte de fées aurait été parfait, mais je garde de grands souvenirs de ma journée. »

En finale, il est tombé sur le Japonais Takanori Nagase, qui, pour reprendre l’expression de Valois-Fortier, est loin d’être « un deux de pique ». Nagase est un ancien champion du monde (2015) et un médaillé de bronze aux Jeux de Rio (2016). Il est, accessoirement, l’une des bêtes noires de Valois-Fortier. Depuis 2014, le Japonais avait remporté leurs trois affrontements.

« Je n’ai pas trouvé la recette pour le battre et, la dernière fois, c’était aux Jeux de Rio, a rappelé Valois-Fortier. Je trouve que j’ai fait un excellent combat. Je contrôlais bien le rythme et le positionnement des mains. Malheureusement, on est arrivés en coin de bordure et j’ai tenté de le pousser vers l’extérieur pour qu’il écope d’une autre pénalité. Il a utilisé ça pour me projeter et l’emporter par ippon. »

Hormis cette séquence qui a mené à sa défaite, Valois-Fortier s’est dit particulièrement satisfait de sa journée. Devant une foule acquise à sa cause, il pense avoir de nouveau montré qu’il faisait partie de l’élite mondiale. La journée d’hier a d’ailleurs été un bon baromètre de sa forme actuelle, à plus d’un mois et demi des Championnats du monde à Tokyo.

J’ai commis quelques petites erreurs [hier], mais rien qui ne puisse pas se corriger d’ici les Championnats du monde. Ça me donne une idée d’où j’en suis par rapport à l’événement le plus important de la saison. Je suis très satisfait de voir que je suis en pleine progression depuis mon retour en février.

Antoine Valois-Fortier

Valois-Fortier a démarré sa journée en l’emportant par ippon devant le Sud-Coréen Lee Seung-su. Au tour suivant, il a eu le dessus face à un autre Québécois, Étienne Briand. En remportant l’argent, il a récolté des points intéressants en vue d’une qualification olympique.

« Si je réussis à rentrer dans le top 8, ça va faire de moi une tête de série aux Jeux. C’est très important, car ça va me permettre de m’éloigner des autres meilleurs de la catégorie. » Et notamment de Nagase…

Le bronze pour Beauchemin-Pinard

Comme pour Valois-Fortier, les prestations de Catherine Beauchemin-Pinard étaient particulièrement suivies, hier, chez les 63 kg.

Après un bon début de journée marqué par deux victoires par ippon, la judoka de 25 ans s’est fait surprendre par la Britannique Amy Livesey en demi-finale. Entre cette défaite et la finale pour le bronze contre l’Australienne Katharina Haecker, trois heures plus tard, elle a dû se livrer à un petit exercice mental.

« Ça peut être dur de se remotiver et j’ai d’ailleurs eu un petit down après ma défaite. Dans les couloirs après, j’ai croisé beaucoup de gens qui me disaient : “Allez, let’s go pour ta finale de bronze. On a hâte de te voir.” Ça aurait été encore pire si j’avais perdu le bronze en plus. Une double défaite [hier], je ne l’aurais pas pris. »

Au bout du compte, elle juge donc que son tournoi est une belle préparation pour les grosses échéances à venir.

Ça me donne une erre d’aller pour les Championnats du monde et les Jeux olympiques. Je commence à ramasser des points. Si je continue à avoir des médailles, je vais atteindre mes objectifs.

Catherine Beauchemin-Pinard

Une médaille avant une opération

Le Canada a remporté deux autres médailles, outre celles de Valois-Fortier et de Beauchemin-Pinard.

Antoine Bouchard a ainsi obtenu le bronze en l’emportant par ippon face au Brésilien Eduardo Barbosa chez les moins de 73 kg. « C’est un adversaire que je connaissais plus ou moins. Je savais qu’il fallait que je lui mette plus de pression que lui allait en mettre. Finalement, j’ai vu une occasion au sol et j’en ai profité. »

La médaille a une saveur bien particulière pour Bouchard. Elle a en effet été remportée 10 jours avant une opération pour soigner son épaule gauche. Blessé au mois d’octobre, il a repris les compétitions au tout début de l’année 2019. Pour ne pas hypothéquer ses chances de se rendre aux Jeux olympiques de Tokyo, il jugeait le moment particulièrement opportun.

« C’est presque rendu une obligation. J’ai eu une préparation assez difficile durant laquelle je me suis luxé une épaule la semaine dernière. Je n’ai pas pu faire le moindre combat depuis. C’est la première fois que je fais des combats en deux semaines. »

« C’était vraiment important pour moi d’aller chercher le plus de points possible avant mon opération. Quand je vais revenir, je ne veux pas être sous la pression de devoir accumuler beaucoup de points. »

Finalement, l’Ontarienne Kelita Zupancic s’est inclinée en grande finale de la catégorie des moins de 70 kg. C’est la cinquième fois qu’elle atteignait la finale lors d’un Grand Prix.

« Mon objectif a toujours été les Jeux olympiques l’an prochain. C’était un bon test, [hier], devant une foule locale, où étaient mes parents et mes amis. J’ai pu essayer de nouvelles techniques et, si je n’ai pas gagné cette fois, je gagnerai dans un an. »

La journée en images

En bref

Margelidon rate le bronze Chez les moins de 73 kg, le Québécois Arthur Margelidon s’est incliné lors de sa finale pour la médaille de bronze face à l’Allemand Anthony Zingg. « Je l’ai un peu déstabilisé au début, j’ai failli le projeter à une reprise, mais j’en ai peut-être trop fait sur une séquence. Je n’ai pas pensé à la transition au sol, ce qui lui a permis de m’étrangler. »

Valois-Fortier ravi du rayonnement Il n’a pas fallu tordre le bras de Valois-Fortier pour qu’il louange la foule de l’aréna Maurice-Richard. Il s’est dit surpris par la réaction et l’ambiance. « Cet événement fait rayonner le judo au Canada, ce qui n’arrive pratiquement jamais, à part lors des Jeux tous les quatre ans, a-t-il ajouté. Faire connaître les visages du judo canadien, faire briller le sport et montrer qu’on est capable de gagner ses médailles, c’est merveilleux. »

Place à Teddy Riner Le Grand Prix de Montréal se poursuit aujourd’hui avec cinq catégories au programme. On verra notamment le Français Teddy Riner, double champion olympique (+ 100 kg), qui fera son retour après s’être accordé une pause de 20 mois. Aussi au menu : les moins de 90 kg et les moins de 100 kg chez les hommes, mais aussi les moins de 78 kg et les plus de 78 kg chez les femmes.