Quelqu'un ment. Qui? Ce sera vraisemblablement aux tribunaux de trancher.

Yvon Michel et le clan du boxeur Artur Beterbiev ont livré des points de vue complètement opposés, jeudi, quant aux événements qui ont mené à l'annulation du combat éliminatoire qui devait opposer Beterbiev à l'Allemand Enrico Koelling, le 29 juillet prochain, à New York.

Une chose est certaine: Beterbiev n'a pas obtenu l'autorisation des autorités américaines de se rendre à New York pour disputer ce combat. Ce refus est dû au fait qu'elles accusent le boxeur de s'être battu sans le visa nécessaire aux États-Unis, en 2015. De là, tout diffère, ou presque.

Du côté du Groupe Yvon Michel (GYM), on estime qu'un simple visa de tourisme aurait permis à Beterbiev d'aller disputer un combat aux États-Unis, puisqu'il est payé par un promoteur canadien. Beterbiev, croit-on, aurait expliqué par erreur qu'il avait été payé par un promoteur américain pour son combat de 2015, ce qui le plaçait en situation d'illégalité.

GYM explique avoir mandaté des avocats pour faire appel de ce refus, sans succès, avant d'être forcée d'annuler le combat.

Pour l'avocat de Beterbiev, Karim Renno, le portrait est beaucoup plus sombre.

«Pour faire une histoire courte, le combat n'a pas été annulé parce qu'Artur n'était pas capable d'avoir un visa américain, il a été annulé parce qu'Artur refuse de laisser tomber ses poursuites civiles contre GYM», a-t-il résumé jeudi en conférence de presse.

Beterbiev a déposé début mai une demande afin d'obtenir un jugement déclaratoire confirmant la résiliation de son contrat avec GYM, qui n'est pas respecté selon lui.

D'après Me Renno, GYM a maintes fois fait savoir au clan Beterbiev, que ce soit par l'entremise de ses avocats ou de ses proches, que le combat serait annulé s'il n'abandonnait pas ces poursuites. GYM aurait fait valoir qu'il lui était impossible de rentabiliser les combats de Beterbiev avant que celui-ci ne soit champion du monde, compte tenu de la bourse minimale de 250 000 $ US (320 000 $ CAN) que son contrat prévoyait.

Ce combat contre Koelling s'annonçait lui aussi déficitaire. Selon Me Renno, GYM aurait explicitement indiqué qu'elle n'était pas prête à organiser un combat à perte tout en courant le risque de voir son contrat annulé par les tribunaux par la suite, avant d'avoir la chance de recouvrir ses coûts.

De Québec à New York

Beterbiev et ses conseillers jugent qu'un visa de tourisme n'était pas suffisant et qu'il leur fallait demander un visa de travail pour entrer aux États-Unis. La procédure est facile, dit-on, à condition de pouvoir présenter aux autorités américaines un contrat prévoyant la tenue du combat aux États-Unis. Or le seul contrat signé entre GYM et Beterbiev pour ce combat prévoyait qu'il se tiendrait à Québec. L'impossibilité de rentabiliser l'événement au Centre Vidéotron aurait mené à son déplacement à New York.

Jamais GYM n'aurait fourni à Beterbiev une version amendée du contrat qui lui aurait permis d'obtenir son visa. Joint par La Presse, Yvon Michel a plutôt indiqué qu'il n'avait jamais reçu de demande à cet effet.

Fait important, ni le passeport russe de M. Beterbiev ni sa foi musulmane ne seraient en cause dans le refus des autorités américaines, conviennent les deux parties.

Nouveau combat à l'automne

L'IBF a déjà annoncé la tenue d'un nouvel appel d'offres à la fin de juillet pour une reprise qui devra avoir lieu dans un délai de 90 jours. Tous les promoteurs du monde seront autorisés à y participer, y compris GYM.

En conférence de presse, jeudi, Me Renno a laissé entendre qu'il demanderait à l'IBF de disqualifier GYM. Il a toutefois assuré que si cette procédure devait échouer et que GYM l'emportait, Beterbiev participerait au combat.

«Je doute fortement que [GYM] respecte son contrat s'il gagne les enchères, a dit Me Renno. S'il n'a pas été capable d'organiser le combat à Québec comme prévu, je ne vois pas comment il serait capable de l'organiser si on lui donne plus de temps.»