Après une carrière de 16 ans en boxe professionnelle ponctuée de bas et de hauts, dont un titre mondial en 2007, Joachim Alcine a choisi de raccrocher ses gants.

Non pas parce qu'il ne croyait plus être en mesure de rivaliser avec ses adversaires, lui qui fêtera bientôt ses 40 ans, mais plutôt parce qu'il a choisi de privilégier sa santé.

«Des fois, dans la vie, il faut apprendre à dire non. En raison de certaines choses, je trouvais que c'était une bonne idée de raccrocher mes gants. J'ai été pas mal affecté après mon dernier combat. Ça ne valait plus la peine», explique le boxeur fraîchement retraité en entrevue avec La Presse.

Ces «certaines choses» dont il parle, c'est plus précisément une blessure à l'oeil gauche qui le tenaille depuis un bon moment.

Elle ne l'a pas empêché de monter dans le ring le 31 octobre, à Houston, pour affronter l'Américain Jermell Charlo. Combat que ce dernier a remporté par knock-out au sixième round, et qui aura été le chant du cygne d'Alcine. Mais les médecins lui avaient fait comprendre l'ampleur du risque que comportait cet affrontement pour le reste de sa carrière. Et de sa vie.

«Un coup de poing et je devenais aveugle. Je n'ai pas pu performer à cause de ça», indique Alcine.

Devant ce diagnostic sans appel, le pugiliste n'a pu que se rendre à l'évidence et accepter l'inévitable avec sérénité. «[La décision] n'a pas vraiment été difficile, dit-il. Je savais dans quelle situation je me trouvais.»

Rien à faire des critiques

Alcine termine donc son parcours avec une fiche de 35-8-2, dont 21 gains par knock-out. Le moment fort de sa carrière est sans contredit sa victoire par décision unanime face à Travis Simms le 7 juillet 2007, qui lui a permis de s'emparer de la ceinture WBA des mi-moyens. Il l'a toutefois perdue l'année suivante aux mains de Daniel Santos.

Dès lors, sa route a emprunté un sombre virage. Exception faite d'une victoire-surprise aux dépens d'un jeune David Lemieux, Alcine n'a plus jamais été le même dans un ring. Sur les 14 combats qu'il a livrés après son duel contre Santos, il n'en a remporté que cinq. Il a de plus subi cinq revers consécutifs entre septembre 2012 et décembre 2013.

Nombreux, d'ailleurs, sont ceux qui lui ont reproché d'avoir prolongé indûment sa carrière, devant ces insuccès répétés. Mais Alcine, lui, n'a que faire de ces critiques.

«Les gens peuvent penser ce qu'ils veulent, lance-t-il. Je suis quand même allé jusque-là malgré mon âge. Contre David Lemieux, on m'a fait comprendre que j'étais trop vieux pour l'affronter, mais j'ai quand même gagné. Durant mon dernier combat [contre Charlo], j'ai ressenti l'énergie de ma vingtaine.»

En fait, si Alcine a un seul regret, c'est de ne pas avoir réussi à redonner au public québécois le titre mondial qu'il a échappé.

«J'ai fait tout ce que je pouvais faire, mais ma santé ne m'a pas permis d'être à 100%. Ce sont des choses qui arrivent, et on doit les accepter», résume-t-il.

Joachim l'entraîneur

Sa carrière de boxeur est peut-être terminée, mais Alcine ne s'éloignera pas de son sport pour autant. Il a désormais l'intention de se consacrer à temps plein à l'entraînement de jeunes espoirs, dont plusieurs Québécois.

«Je sais comment les entraîner en raison de mon expérience, fait-il valoir. J'aime pouvoir leur dire ce qu'il faut faire et ce qu'il ne faut pas faire. Je suis à l'aise sur le plan technique et j'ai un côté bagarreur [comme entraîneur], même si je ne l'étais pas comme boxeur.»

Pour le reste, il continuera de vivre sa vie en Californie, où il réside depuis quatre ans, en compagnie de sa femme et de ses deux filles, âgées de 10 et 12 ans. Il confie cependant vouloir se garder un petit pied-à-terre au Québec, question de conserver une proximité avec ceux qui l'ont soutenu pendant toutes ces années.

«De ne pas entendre les gens crier, ça va me manquer, avoue-t-il. Mais ils auront l'occasion de crier pour moi différemment, car je vais faire monter des gars du Québec.»