À deux mois de son 50e anniversaire, Bernard Hopkins devrait songer à retrouver les autres baby-boomers en Floride. Au lieu de cela, il regardera de haut sa chaise berçante et poursuivra sa quête amorcée il y a près de 30 ans, passant de nouveau le K.-O. au temps qui passe pour livrer un autre combat de championnat du monde.

Hopkins, «The Executioner» («Le Bourreau»), est le vétéran incontesté de l'histoire de la boxe. Il fait paraître des boxeurs comme Jersey Joe Walcott ou Joe Louis pour des amateurs, eux qui ne se sont battus «que» jusqu'à la fin de la trentaine.

Et Hopkins ne compte pas se retirer. Celui qui maîtrise autant l'art de l'entrevue que du direct s'est récemment amusé avec les journalistes. S'assurant qu'un enregistreur était bien en fonction, il s'est penché avant de débiter les questions qu'il a si souvent entendues au cours des 10 dernières années.

«Bernard, comment te sens-tu? Bernard, pendant combien de temps comptes-tu encore te battre? Bernard, pourquoi n'es-tu pas à la retraite?»

Hopkins s'est redressé, tout sourire, satisfait de son trait d'humour.

«Je ne fais qu'apprécier le voyage», a-t-il ajouté.

Le prochain arrêt de ce voyage surviendra samedi, à Atlantic City, quand il affrontera l'artiste du knock-out russe Sergey Kovalev pour l'unification des titres WBA, IBF et WBO des mi-lourds. Kovalev a une fiche de 25-0-1 avec 23 K.-O.. Il fait figure de favori à 3 contre 1 pour ce combat qui sera présenté sur les ondes de RDS au Québec.

Ce combat ferait un excellent film: un vieillissant boxeur de Philadelphie contre une machine de boxe russe. Tout ce qui manque, c'est James Brown.

«Nous avons une statue de Rocky et ce n'est même pas un vrai type, a dit Hopkins du champion fictif de Philadelphie. Ce que je fais, ils ne pourraient pas l'écrire dans un scénario. Personne ne le croirait. «Ce gars-là? Ce vieux-là? Voyons! Il ne peut pas gagner!» Cette statue est un symbole, mais moi, je suis un champion en chair et en os.»

Il procure toujours beaucoup d'énergie à un sport qui a un besoin criant de personnalités et de combats importants. À sa manière.

Hopkins (55-6-2, 32 K.-O.), qui aura 50 ans le 15 janvier, s'est imposé d'énormes sacrifices pour pouvoir se battre jusqu'à un âge aussi vénérable. Il s'est interdit toute boisson, tout dessert et se tient loin de la restauration rapide.

«Je n'allais pas laisser des livres en trop me passer le K.-O.», dit-il.

Hopkins, le plus vieux champion de l'histoire de la boxe, a subi deux revers contre Jermain Taylor et n'a pas été en mesure de battre Chad Dawson en deux combat. Mais si vous lui demandez qui est l'adversaire le plus difficile qu'il a affronté, ces deux noms ne seront pas mentionnés. Pas plus que ceux d'Oscar De La Hoya, Felix Trinidad ou Antonio Tarver.

«Antwun Echols était vraiment un dur de dur, indique Hopkins. Un cogneur solide.»

«Et il vous frappait une fois que l'arbitre avait demandé d'arrêter», ajoute son entraîneur, Naazim Richardson.

«Tavoris Cloud n'était pas un vilain cogneur, indique Hopkins. C'est simplement qu'il n'a jamais pu m'atteindre comme il faut.»

Sans douter de la victoire de son poulain, Richardson, associé à Hopkins depuis les années 1990, craint Kovalev. Il dit du Russe de 31 ans qu'il «est gros et intimidé par personne».

Hopkins et Richardson ont parlé d'un plan de retraite en privé, mais jamais ils ne laisseront transpirer quoi que ce soit de cette conversation. De toute façon, ce n'est pas pour bientôt. Hopkins veut se battre à 50 ans, avec une ceinture à la taille.

«La seule chose qu'il n'a pas faite dans ce sport, c'est d'être déclassé, note Richardson. Je lui ai suggéré de quitter avant que ça ne lui arrive.»

Peu importe quand ce moment viendra, c'est la boxe qui sera la grande perdante.