Adonis Stevenson a attiré les foules hier pour sa première visite en Haïti depuis qu'il a quitté le pays avec sa famille en 1982. Le champion de boxe était particulièrement attendu à Carrefour, sa ville natale, où il a assisté à un match amical dans l'immense centre sportif de cette banlieue sud de Port-au-Prince.

Quelques minutes avant l'arrivée du boxeur, des jeunes filles mettent la dernières touches aux banderoles rouges marquées au stylo feutre: «Bienvenue Adonis». Le scintillement des confettis qui y sont accolés illumine la table.

«On l'aime parce que c'est un Haïtien, comme nous», explique à La Presse Julie Jean, membre du comité d'accueil, elle-même couverte de ces confettis brillants, un pot de colle à la main. «Il n'a pas oublié son pays.»

Devant des dizaines de jeunes enthousiastes, l'invité d'honneur de l'événement est apparu portant ses ceintures victorieuses à l'épaule et dans les bras, au grand plaisir de la foule. Avant le discours de circonstance, il se dirige sur le plancher du grand amphithéâtre pour exécuter un réchauffement avec les jeunes recrues venues se battre.

«Je suis surpris de voir qu'ils semblent très bien organisés, raconte à La Presse Adonis Stevenson avant la compétition amicale.

«Le ring est très beau, l'équipement magnifique. Je sens qu'il y a du talent. Avec du travail, on pourra sortir avec beaucoup de champions.»

Toute la journée, le boxeur de 36 ans semblait fébrile, ses yeux enregistrant tout sur son passage. Il a rencontré dans cette journée une population très chaleureuse, explique-t-il.

«Je ne connaissais rien d'Haïti et mes parents m'ont toujours parlé négativement de ce pays: dangereux, grande criminalité, etc. "Va pas là, c'est pas bon", me disaient-ils. Mais je tenais à partager mes victoires avec la communauté qui m'a vue naître.»

Entretenir le rêve

En plus de découvrir ses origines, Adonis est débarqué avec une idée en tête. Il veut permettre aux jeunes de rêver grand, même si parfois la vie est semée d'embuches.

«Je voudrais ouvrir les horizons de mes compatriotes pour qu'ils comprennent qu'avec de l'effort, rien n'est impossible, même un championnat du monde!»

Le message semble avoir été entendu par Jean-Bernard Bélizaire qui pratique la boxe depuis cinq ans.

«Avec le succès de boxeurs comme Adonis, raconte-t-il, il est envisageable d'envisager un championnat, même si on est issu d'une famille sans trop de moyens.»

Ce jeune de 22 ans fait partie de la trentaine de boxeurs amateurs de Cité Soleil qui ont accueilli le champion de WBC à son arrivée à l'aéroport. Plus de 500 jeunes pratiquent la boxe dans des clubs de Cité Soleil, selon la Fédération haïtienne de boxe amateur.

«L'Argentine a Messi comme modèle, nous avons maintenant Adonis», affirme l'un des dirigeants de cette fédération, Salomon Medina, qui les accompagnait.

«La boxe permet de sortir les jeunes de la rue et du pessimisme. Il permet aussi d'inculquer une certaine discipline», ajoute-t-il.

Adonis songe maintenant de disputer un premier combat en Haïti. «Je rêve d'amener HBO ici», lance-t-il. L'ambition est grande, les réseaux de télévision étrangers sont généralement frileux avec les projets d'envergure en Haïti, mais tout commence par un rêve, se plait à rappeler Adonis.