Le combat juridique qui oppose Éric Lucas au groupe Sportscene et à InterBox s'envenime. L'ancien boxeur poursuivait initialement ses anciens partenaires d'affaires pour 391 000 $. Il exige désormais 2,5 millions, selon des documents de cour obtenus par La Presse.

Cette somme pourrait même gonfler dans les prochains mois. Lucas se réserve en effet le droit de réclamer ce qu'il estime être sa part lors d'un éventuel combat entre Lucian Bute et Jean Pascal. Le recours a donc pris une tout autre ampleur pour Sportscene, propriétaire des restaurants La Cage aux Sports et d'InterBox.

Éric Lucas avait acquis InterBox en 2004. Il l'avait rachetée à son promoteur en faillite, qui lui devait 100 000 $ en bourses. Lucian Bute était déjà dans l'écurie. Son contrat était d'ailleurs l'un des principaux actifs de l'entreprise.

Dès l'année suivante, Lucas a revendu InterBox au Groupe Sportscene pour la somme de 1$. Lucas demeurait porte-parole de l'entreprise et continuait «à recevoir annuellement d'importantes sommes d'argent de Sportscene», selon la défense.

Le litige entre Lucas et ses anciens associés porte sur une clause du contrat de vente, qui stipule que le prix versé à Lucas sera ajusté «si InterBox dispose ou transfère ou cède de quelque façon que ce soit le contrat de Lucian Bute à un tiers». Dans ce cas, «une somme de 25% provenant de la vente de ce contrat devra être versée au vendeur», lit-on dans la clause litigieuse.

Selon l'ancien boxeur, ce libellé lui assure 25% des droits de télédiffusion reçus par Interbox pour les combats de Lucian Bute. Sportscene s'oppose à cette interprétation et estime que la clause se limite au cas où InterBox vendrait à un autre promoteur le contrat de Bute, ce qui ne s'est jamais produit.

Lorsque la poursuite a été déposée en août 2012, Lucas réclamait 391 000 $: 125 000 $ en droits de télédiffusion pour un combat de Lucian Bute contre Edison Miranda au Centre Bell en avril 2010, 26 175 $ pour le combat contre Jesse Brinkley au Centre Bell en octobre 2010 et 240 481 $ pour le combat contre Brian Magee au Centre Bell en mars 2011.

L'ancien boxeur demandait aussi sa part des combats récents de Bute, entre autres celui de mai 2012 contre Carl Froch. La poursuite ne disposait toutefois pas des informations quant aux revenus de télédiffusion pour les derniers combats de Bute. Elle les a obtenus dans le cadre des procédures. Les avocats de Lucas ont également fait faire une expertise par un comptable. La poursuite demande désormais 2 520 308$ à Sportscene.

Pas méfiant

Le duel qui se livre devant les tribunaux est le dernier chapitre d'une longue relation d'affaires. Lucas a notamment mené sa carrière de boxeur (39 victoires pour 8 défaites et 3 nuls) sous l'égide d'InterBox. Il a ensuite détenu des parts dans deux restaurants La Cage aux sports, à Granby et Sherbrooke, en plus d'être porte-parole de la chaîne de restaurants.

Mais Lucas a vendu ses intérêts dans les deux restaurants en 2010. Il a aussi cessé de représenter Sportscene en juillet 2012.

Que s'est-il passé pour que la relation entre Éric Lucas, Sportscene et son président, Jean Bédard, s'envenime? Selon la défense, c'est l'entrée en scène d'un nouveau conseiller auprès de Lucas qui a tout changé. «C'est peu après le combat entre Éric Lucas et Librado Andrade du 28 mai 2010 qu'Éric Lucas a, pour la première fois, mentionné à Jean Bédard que son nouveau conseiller qui s'occupait de ses affaires croyait celui-ci en droit d'obtenir des revenus additionnels en provenance d'InterBox», prétend Sportscene.

Toujours selon la défense, ce nouveau conseiller «est un entrepreneur spécialisé en toitures qui, selon toute vraisemblance, n'a aucune formation juridique».

Lors de son témoignage, Éric Lucas a expliqué qu'il ne s'était pas précipité pour faire valoir ce qu'il estime être ses droits parce qu'il avait confiance en InterBox. «J'ai pas de méfiance sur personne. Je suis pas un gars qui se méfie», a-t-il dit lorsqu'il a été interrogé par la défense.

«Je suis pas la personne qui va aller dire: Heille... Tu sais, je vais te donner vingt piastres, je vais vous prêter vingt dollars, si je te revois, je te redemanderai pas ton vingt. Je vais espérer que tu me le donnes, c'est tout. C'est pas une bonne façon de faire dans la vie, mais je suis comme ça.»

Le procès pourrait encore durer des mois. Les avocats de Sportscene doivent produire d'ici le 30 octobre leur propre contre-expertise.

Photo archives La Presse

Jean Bédard