Même si son rêve de participer aux premiers Jeux olympiques de l'histoire de la boxe féminine ne s'est pas réalisé; même si elle a regardé les Jeux de Londres de son appartement; même si elle a longtemps été en froid avec Boxe Canada, Ariane Fortin ne jette pas l'éponge.

La double championne du monde de boxe n'a pas tourné le dos à son rêve olympique. Elle va entamer cet été les premiers tournois qui pourraient la mener à Rio en 2016 et lors desquels elle va une nouvelle fois se mesurer à son amie devenue rivale, l'Ontarienne Mary Spencer.

«Les Jeux de Londres ont été durs à regarder, raconte Fortin, rencontrée cette semaine au gymnase montréalais UnderDog, où elle s'entraîne. Mais là, ça fait un an. Dès l'automne, j'ai recommencé à m'entraîner pour la compétition. Je regarde en avant. Ça ne sert à rien de déterrer de vieux souvenirs. Ça bouffe de l'énergie.»

Un instant, l'hiver dernier, alors qu'elle se voyait écartée de l'équipe nationale, Fortin a envisagé d'aller boxer pour un autre pays. Elle avait senti que sa fédération nationale l'avait laissée tomber. Elle estimait notamment que plusieurs des combats entre elle et Spencer avaient été jugés avec partialité.

Spencer est finalement partie pour Londres. Elle s'est fait éliminer dès son premier combat. Fortin a pour sa part mis de l'eau dans son vin et a depuis fait la paix avec Boxe Canada. «On a tous nos divergences d'opinions, mais là, on travaille ensemble et tout va super bien», dit la boxeuse de 28 ans.

L'Association internationale de boxe amateur (AIBA) a annoncé son intention d'ajouter à Rio trois catégories de poids chez les femmes aux trois déjà existantes à Londres. Le but est de réduire l'écart entre la boxe féminine et masculine, qui compte 10 catégories de poids aux Jeux.

Un moment, Fortin a espéré que cette mesure vienne mettre un terme à sa rivalité avec Spencer. «Ils rajoutent l'ancienne catégorie de Mary, 141 lb. Mais ça fait déjà un bout qu'elle est à 165, explique Fortin. On en a parlé. Ce serait vraiment merveilleux qu'elle descende. On pourrait s'entraîner ensemble. Mais bon, la réaliste en moi ne pense pas que ça va arriver. Je pense qu'on va continuer à s'affronter pendant les trois prochaines années.»

Un été chargé

La native de Lévis et Montréalaise d'adoption se résigne plutôt à vivre un nouveau cycle olympique sous le sceau de la rivalité. L'équipe nationale n'a qu'une seule place à 165 lb, et elle se jouera vraisemblablement entre Fortin et Spencer.

Fortin va commencer dès cet été la longue route qui pourrait la mener au Brésil. «J'ai un combat contre la médaillée d'or américaine Claressa Shields, le 13 juin à Ottawa. Ce sera un gros, gros challenge pour moi, note-t-elle. J'ai ensuite une grosse compétition au Venezuela en juillet et une autre au Kazakhstan en août.»

Le plus important choc Fortin-Spencer aura lieu en octobre lors des championnats nationaux. La gagnante prendra une sérieuse option sur une participation aux Mondiaux, qui vont avoir lieu au Canada en 2014.

«En octobre, je reprends ma place», lance Fortin avec confiance.

En attendant qu'elle reprenne de plus belle, leur rivalité fait l'objet d'un tout nouveau documentaire, intitulé Last Woman Standing. Le film a fait fureur au festival Hot Doc de Toronto. Il doit être présenté à Montréal cet été. Il a permis à Fortin et à Spencer de revivre ces mois intenses de l'hiver dernier, de tourner la page sur ces moments où la compétition a pris le dessus, où elles ne se s'adressaient plus la parole.

Tourner la page n'est pas clore un chapitre. Et la rivalité entre les deux boxeuses s'apprête à reprendre de plus belle.