Dans une autre vie, Georges St-Pierre avait l'habitude de courir le monde. Le champion de l'UFC s'entraînait un peu partout sur la planète pour affûter son art et parfaire ses techniques de combat. Mais la routine éreintante avait toujours raison de ses forces et GSP arrivait à la fin de ses séances d'entraînement «brûlé» et démotivé.

À la faveur d'une blessure au genou droit qui l'a tenu éloigné de l'octogone pendant un an et demi, St-Pierre a décidé de changer les choses. Pour préparer son combat-retour du 17 novembre au Centre Bell, St-Pierre a tranché: les spécialistes des arts martiaux allaient désormais venir à lui. Pas l'inverse.

Lors d'une séance d'entraînement public jeudi au gymnase Tristar, la nouvelle philosophie était à l'oeuvre: deux Thaïlandais champions de muay thaï faisaient suer à grosses gouttes le Québécois. L'été dernier, St-Pierre a aussi accueilli un spécialiste français du muay thaï, puis un multiple champion du monde de ju-jitsu est venu du Brésil.

«Avant ma blessure, j'étais surentraîné. Il faut comprendre que j'ai commencé la compétition en arts martiaux à l'âge de 9 ans. Ça fait 23 ans, et je n'ai pas arrêté. Je commençais à être brûlé un peu, a expliqué Georges St-Pierre, qui a rencontré les médias, jeudi, à deux semaines de son retour. Ça m'a permis de changer beaucoup de choses dans ma vie personnelle et mon entraînement.»

«Maintenant, au lieu de voyager pour m'entraîner, j'essaye d'amener mes partenaires d'entraînement à Montréal. Ça m'évite de voyager et de perdre beaucoup d'énergie», juge-t-il.

Une grande partie de son entraînement se déroule dans un gymnase tout près de l'autoroute Décarie, le Tristar, où le supervise son entraîneur-chef, Firas Zahabi. Puis St-Pierre se rend au Centre Claude-Robillard pour suivre les conseils de son nouvel entraîneur de boxe, Stéphan Larouche. Il fréquente aussi un club de lutte olympique dans l'ouest de la ville.

«Les gens croient que j'habite aux États-Unis, mais je suis ici 95% du temps. J'adore vivre ici et je ne pense jamais déménager. Je suis très attaché à ma famille, à mes racines», explique l'athlète originaire de Saint-Isidore.

St-Pierre avait par exemple l'habitude de fréquenter le gymnase du célèbre entraîneur Greg Jackson, au Nouveau-Mexique. Ou de se rendre à Los Angeles auprès du légendaire entraîneur de boxe Freddy Roach. Il a préféré mettre un terme à ces pratiques. Le champion de l'UFC quitte désormais Montréal pour se rendre à New York, mais pour brasser des affaires plutôt que pour suer sur un tatami.

L'occasion d'une blessure

GSP a subi l'hiver dernier une grave déchirure du ligament croisé antérieur. Opéré le 13 décembre 2011 par un spécialiste américain réputé, il a passé des mois en réhabilitation. Tenu loin des gymnases qui sont son quotidien depuis des années, St-Pierre a trouvé le temps de repenser sa routine d'entraînement.

«C'est sûr que j'aurais aimé mieux ne pas être blessé, puisque j'ai quand même perdu un an et demi de ma vie, remarque l'athlète de 31 ans. Mais ça m'a permis de faire des changements que je n'aurais pas pu faire en temps normal. Ça m'a fait du bien. Je suis un nouvel athlète.»

Paradoxalement, c'est grâce à sa blessure que St-Pierre a pu se réinventer. Il se sent maintenant prêt comme jamais pour son combat contre l'Américain Carlos Condit. «Normalement, à la fin de mes séances d'entraînement, j'étais brûlé, dit-il. J'avais juste hâte que ça finisse. Là, je savoure chaque moment. Je suis content de venir m'entraîner.»

Le Québécois va mettre sa ceinture de champion du monde de l'UFC en jeu contre Condit. St-Pierre n'a rien pris à la légère. Comme avant chacun de ses combats, il s'est offert une préparation sur mesure pour son adversaire.

«À chaque combat, la dynamique change parce que l'adversaire change, explique le gérant de St-Pierre, Rodolphe Beaulieu. Carlos Condit est très fort debout en muay thaï, avec les coups de poing, de pied, de coude, de genou. Les deux gars qui sont là avec Georges sont de Thaïlande, ce sont deux champions du monde. Ils le préparent exactement pour Condit.»

On peut tout préparer de fond en comble, mais St-Pierre est-il remis de sa blessure? «Mes jambes sont plus fortes qu'avant», lance l'athlète, dont le genou droit a été reconstruit par une greffe de tendon rotulien.

Puis lorsqu'un journaliste, qui manifestement doute de la réponse, lui demande ce qu'il fera si Condit l'attaque justement au genou droit, St-Pierre sourit : «J'espère qu'il va essayer... Je l'attendrai avec une petite surprise!»

Une surprise qui, pour la première fois, aura été entièrement pensée et répétée à Montréal.

Photo: Alain Roberge, La Presse

Georges St-Pierre discute avec son nouvel entraîneur de boxe - le même que Lucian Bute - Stéphan Larouche.