L'industrie de la boxe au Québec a pris une formidable ampleur. L'implication d'Interbox et du Groupe GYM n'y est pas étrangère. Seulement, tous les boxeurs ne sont pas liés à un promoteur qui suit de près l'évolution de leur carrière. Loin s'en faut. Présentement, moins de 30 boxeurs se trouvent sous contrat avec GYM ou Interbox. Pour les autres, l'option se résume souvent à devenir de simples faire-valoir, des journeymen comme on les appelle dans le milieu.

Perçus comme de la chair à canon servant à engraisser la fiche de boxeurs en progression, les faire-valoir n'en sont pas moins des athlètes professionnels bien entraînés. «On ne sait jamais quand on va être appelé, explique Sébastien Hamel, installé entre un ring et une série de sacs au Club Underdog, tout près de la large vitrine qui offre une vue imprenable sur l'angle des rues Sainte-Catherine et Saint-Laurent. Faut toujours que tu sois au gymnase, que tu sois prêt. On peut t'appeler trois semaines ou trois jours à l'avance.»

 

En 2007, Sébastien Hamel a disputé huit combats; sept à l'extérieur de la province, dont six au États-Unis. Opposé à des boxeurs d'avenir pour la plupart invaincus, Hamel n'a récolté aucune victoire au cours de cette année qui fut néanmoins sa plus payante en carrière. «Ce qui est plate quand tu es considéré comme un jambon, quand tu es un jambon, c'est que tu n'as jamais la juste valeur de ton combat. C'est comme ça chaque fois et on le fait même ici au Québec!» Sébastien Hamel raconte sa carrière au parcours improbable avec grande passion. Malgré une fiche comptant dix victoires en vingt-cinq combats, il n'en a pas moins affronté de nombreux boxeurs de renom, dont l'Américain Ricardo Williams Jr, médaillé d'argent aux Jeux olympiques de Sydney.

Si l'argent se révèle une motivation indéniable à la pratique d'un métier pouvant prendre fin à la moindre blessure et qui cantonne l'athlète dans le rôle du négligé, tout ne s'y résume pas. «Moi, je suis un fan de boxe, explique Hamel. Je vais avoir vécu le rêve d'un fan. Je n'ai même pas gagné les gants d'argent et je me retrouve sur le ring avec des gars que je vois à la télé.»

Le poids lourd Stéphane Tessier, qu'on a vu sur le ring vendredi soir en sous-carte du combat Bute-Andrade, tient un discours similaire. «Moi, c'est le monde qui me motive. Même en Europe, les gens crient mon nom et j'aime ça. C'est un feeling incroyable». Archétype du boxeur de soutien, Tessier détient une fiche de trois victoires en 22 combats et s'est mesuré à plusieurs aspirants mondiaux. Parmi eux, l'Américain Joe Mesi , qui a été classé numéro un au monde, et le Russe Alexander Povetkin, médaillé d'or à Athènes. Un parcours qui l'a mené deux fois en Allemagne, en France, en Roumanie et sur des plateaux de tournage. «J'ai fait de la figuration dans deux productions: le film La ligne brisée et la série Le septième round. C'est le fun, moi j'aurais jamais fait ça sans la boxe. Je suis un gars super gêné.»

Des boxeurs triés avec soin

Qu'ils soient américains, mexicains ou des boxeurs locaux, les adversaires ne sont jamais choisis au hasard. Actuellement en Arizona où il supervise l'entraînement du Lavallois Jean Pascal en vue d'un combat de championnat du monde prévu en décembre, Marc Ramsay est aussi en charge de la sélection des adversaires pour le compte du Groupe Yvon Michel. Joint par téléphone, il explique la mécanique entourant le choix des adversaires, le matchmaking.

«La première chose qu'on regarde, c'est les besoins de notre boxeur selon son cheminement de carrière. S'il y a un boxeur local qui correspond à ce qu'on recherche, c'est sûr qu'on va lui faire une offre. Sinon, ça a peu d'importance que l'adversaire provienne du côté américain ou mexicain. La seule facilité avec les Mexicains, c'est qu'on n'a pas à se soucier du passeport. Les Américains, dès qu'ils viennent en avion, il faut vérifier. Parfois, on doit les faire atterrir aux États-Unis près du Canada et aller les chercher nous-mêmes afin de leur faire passer la douane par les voies terrestres. Ça nous complique la vie un petit peu. « L'attitude y est pour beaucoup. «Que ce soit dans la négociation ou la préparation physique, la qualité première du boxeur de soutien s'avère le professionnalisme. Lorsqu'ils viennent et sont prêts à tout donner, on est sûr d'avoir un bon show.»

Quant aux bourses offertes, c'est motus et bouche cousue. «Ce que je peux dire c'est qu'au Québec, autant chez GYM que chez Interbox, les adversaires sont bien payés.»