C’est avec une médaille olympique au cou que Marion Thénault a conclu la dernière saison. Elle veut entamer la prochaine non pas en volant plus haut, mais en volant mieux.

Lorsqu’elle est en haut de la piste, les skis perpendiculaires et le bras qui pointe vers le ciel, Marion Thénault ne souhaite qu’une seule chose. Faire un saut à la hauteur de sa préparation et de ses propres exigences. La place au classement qui lui sera attribuée est presque secondaire si son exécution a répondu à ses attentes.

Avec la manière dont s’est conclue la dernière campagne, la skieuse acrobatique spécialiste des sauts devra s’habituer au fait d’obtenir des résultats qui traduisent l’exemplarité de ses sauts.

Ses qualités d’ancienne gymnaste sont indéniables, et la grâce avec laquelle elle saute, tourne et atterrit dépasse l’entendement pour une athlète qui, il y a cinq ans à peine, ignorait l’existence de la discipline qui l’a rendue célèbre.

Avant les Jeux olympiques de Pékin, Thénault connaissait une belle progression sur le circuit de la Coupe du monde, en janvier. Elle a d’ailleurs remporté la médaille d’argent au Relais, à Lac-Beauport. Il s’agissait de son troisième podium en Coupe du monde.

Jointe en pleine séance de révision, l’étudiante en génie aérospatial à l’Université Concordia estime que l’opinion de ses rivales à son égard a évolué pendant l’année 2022 : « C’est quand même plaisant, mais ça me met aussi de la pression. »

Une pression qui pèse encore plus lourd depuis qu’elle traîne avec elle une médaille de bronze gagnée à l’épreuve des sauts par équipe aux derniers Jeux.

C’est en baissant la voix, par gêne ou par modestie, qu’elle avoue être maintenant consciente de son potentiel. « Je pense que je suis reconnue comme étant l’une des meilleures au monde. On le sait, entre nous, qui a le potentiel d’être sur le podium et je crois que j’en fais partie. »

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, ARCHIVES LA PRESSE

Marion Thénault

Une démarche réinventée

La skieuse de 22 ans a profité d’un été « un peu tumultueux » pour revenir aux bases, en quelque sorte.

Entre des camps d’entraînement en Suisse, aux États-Unis et au Chili et des douleurs au dos qui sont récurrentes depuis des années, elle en est venue à une conclusion qui sera bénéfique, croit-elle, pour obtenir plus de constance en Coupe du monde.

Je ne vais pas faire de sauts plus difficiles que l’année dernière, mais je prévois mieux les faire.

Marion Thénault

Elle a aussi envie d’établir une routine et des habitudes qui lui permettront de traverser ce nouveau cycle olympique sans tracas. Elle veut se concentrer davantage sur ses méthodes d’entraînement, la répartition de son temps et l’organisation de son quotidien pour mieux performer, mais aussi « pour rester en santé physiquement et mentalement ».

Retour aux sources

Il y a quelques semaines, Thénault était de passage à Ottawa pour encourager les héros de demain lors de la finale du Camp des recrues RBC. Les athlètes de 14 à 25 ans y sont invités depuis 2016 pour tenter de se tailler une place parmi l’une des équipes nationales dans leur quête du rêve olympique.

« Ce programme a littéralement changé ma vie », précise Thénault qui s’était inscrite lors de la deuxième édition du Camp.

Neuf médaillés étaient aussi présents : Kelsey Mitchell, Sarah Nurse, Penny Oleksiak, Justin Kripps, Avalon Wasteneys, Marie-Philip Poulin, Justine et Chloé Dufour-Lapointe et Valérie Maltais.

Un orpailleur aurait été en extase devant autant de prestige. La cohorte a décroché en tout 23 médailles olympiques. De quoi inspirer les jeunes qui souhaiteraient un jour faire partie du club. Comme Thénault à une certaine époque. Elle n’a jamais perdu sa faculté d’émerveillement depuis.

PHOTO SEAN KILPATRICK, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

Marion Thénault, Miha Fontaine et Lewis Irving ont remporté la médaille de bronze en grande finale du saut par équipe mixte aux Jeux olympiques de Pékin, en février dernier.

Médailles au cou, décoration avec laquelle Thénault a encore de la difficulté à s’habituer, ils ont partagé leur expérience unique entre eux et avec les espoirs.

« C’était drôle d’être parmi ces athlètes, parce qu’on dirait que dans ma tête, je suis encore la personne qui les regarde et je n’en fais pas partie. Alors c’était un peu bizarre par moments. J’étais fière, mais en même temps, je me demandais ce que je faisais là », lance la skieuse dans un éclat de rire.

Une situation tout aussi surréaliste que lorsque les olympiens en devenir la reconnaissaient et venaient lui demander conseil pour savoir comment lancer leur carrière. « C’est tellement possible que la personne qui est venue me féliciter soit à côté de moi aux prochains Jeux. C’était un environnement qui donnait envie à tout le monde de se dépasser. Je n’ai jamais vu des athlètes se forcer autant. »

Grâce à ses sauts, Thénault est parvenue, et parviendra à nouveau, à jouer parmi les étoiles. Dorénavant, elle peut en mettre dans les yeux des futurs champions qui croisent son chemin.