Tout est dans le détail. Chaque saut, chaque atterrissage, chaque virage est une occasion d’apprentissage. Éliot Grondin aime se compliquer la vie pour mieux la réussir. En coulisse, la facilité lui déplaît. Quand le rideau se lève, il sait comment gagner.

C’était une journée radieuse à Pékin. Dans le portillon de départ de la grande finale olympique de l’épreuve de snowboard cross, Éliot Grondin était fébrile, mais confiant. « Ça doit être la course où j’étais le plus prêt de toute ma vie. »

Les barrières sont tombées et le planchiste s’est empressé de prendre les devants. Il a été rattrapé par Alessandro Haemmerle dans la courbe précédent le deuxième intermédiaire. Le peloton s’est ensuite réuni ; Grondin a failli chuter à cause d’un contact avec son poursuivant Omar Vinsintin. Il est sorti légèrement de sa ligne, mais est resté accroché au meneur jusqu’à la toute fin.

Malgré une poussée ultime qui lui a permis d’embrasser la piste, il a mordu la poussière au photofinish.

Un homme changé

Épuisé, mais ravi, il a reçu sa médaille d’argent avec le sourire, faisant un signe de cœur avec ses mitaines à la caméra qui le présentait au monde entier. Quelques jours plus tard, il a gagné la médaille de bronze à l’épreuve d’équipes mixtes.

« Ç’a été l’une des courses les plus faciles à gérer. Le plan était tellement solide avant de commencer », explique le Beauceron en plein cœur de ses derniers préparatifs avant son départ pour l’Europe et le circuit de la Coupe du monde. Trois jours avant de s’envoler, il restait peu de choses à régler. « Mes valises sont majoritairement restées en Europe, donc je n’ai pas tant de trucs à faire ici. »

Même si Grondin n’est pas du genre à se prendre la tête, il estime que certaines choses ont changé depuis qu’il est revenu de l’Asie avec deux médailles olympiques au cou.

Des endroits qui faisaient auparavant partie de son quotidien sont devenus des lieux de rencontre où il se fait arrêter pour des signatures et des prises de photo.

« Au début, oui tu t’y attends, mais en même temps pas vraiment. Jusqu’à ce que ça arrive. C’est un changement auquel je m’attendais plus ou moins, mais c’est cool, surtout quand ça vient des jeunes. »

En 2021, Grondin a survolé la saison en terminant au deuxième rang du classement général de la Coupe du monde. L’an dernier, même s’il a gagné la dernière coupe du monde et qu’il est monté sur le podium plus souvent, il a vécu des hauts et des bas, principalement parce qu’il a tout misé sur les Jeux olympiques. Il a dû faire des choix qu’il ne regrette d’aucune manière.

« Tu apprends plus avec une course où tu n’as pas le résultat attendu qu’avec une course que tu gagnes », croit-il.

C’est pourquoi il aime se préparer au pire. Bête d’entraînement et de préparation comme il s’en fait peu, le jeune homme aime se mettre à l’épreuve.

PHOTO ERICK LABBÉ, ARCHIVES LE SOLEIL

Éliot Grondin a remporté deux médailles aux Jeux olympiques de Pékin.

À l’aise dans l’inconfortable

La préparation de Grondin détonne de celle de la plupart de ses pairs. C’est ainsi qu’il est parvenu à se faire un nom et à gravir les échelons. Il est reconnu aujourd’hui comme un athlète redoutable, en grande partie parce qu’il a décidé de faire les choses à sa manière.

« À l’entraînement, les gens essayent toujours de sortir les descentes les plus rapides. [...] »

Je fais souvent dans les meilleurs temps, mais je prends des lignes qui n’ont pas toujours de sens, je me place dans des situations plus difficiles. Comme ça, en course, quand je suis dans le pétrin, puisque je l’ai pratiqué, c’est plus facile de garder le cap.

Éliot Grondin

Infatigable travailleur, sa démarche est remarquée et bénéfique pour ses coéquipiers qui s’appuient sur l’athlète de 21 ans pour les guider.

Avant de partir pour Pékin, son amie Audrey McManiman expliquait que « si tu as une question sur le parcours, va regarder les vidéos d’Éliot. C’est le meilleur exemple que tu pourrais trouver. C’est un mélange de talent, de passion et de travail ».

Dans un sport qui appartient aux vétérans, Grondin agit comme un électron libre qui n’a que faire des tendances actuelles. « Ça peut être déroutant quand tu n’es pas habitué à ça, parce que ce n’est pas évident changer le moule », explique-t-il.

C’est sans compromis qu’il amorcera un nouveau cycle qui le mènera aux Jeux de Milan, en 2026. Il en sera à ses troisièmes Jeux. Il n’avait que 16 ans lorsqu’il a participé à ceux de PyeongChang en 2018.

À l’époque, il été connu principalement en Beauce et dans les environs de Québec. Dorénavant, le monde lui appartient et il compte le conquérir comme il a décroché toutes ses médailles : à sa manière.