« C’est-tu vrai, ça ? » Valérie Maltais n’en croyait pas ses yeux quand elle a vu le temps s’afficher au tableau : 1 min 14,95 s. Deux secondes de mieux que son meilleur temps au 1000 m, réalisé deux semaines plus tôt. Six de mieux qu’à ses débuts en patinage de vitesse longue piste en 2018.

Il y avait de quoi se prendre la tête à deux mains. « J’ai surpris tout le monde, moi la première », a convenu l’athlète de 31 ans quelques jours plus tard.

Maltais a remis une copie presque parfaite aux Championnats canadiens, qui se sont terminés dimanche à Calgary. Quatre courses, quatre podiums, dont ce titre inattendu au 1000 m, épreuve qui ne devait servir que de préparation au 1500 m du lendemain, où elle a décroché le bronze.

En vertu de ces résultats, l’ancienne représentante des F-18 de La Baie, au Saguenay, pourra s’aligner dans quatre épreuves aux quatre Coupes du monde de l’automne, dont la première aura lieu en Pologne du 12 au 14 novembre. Sans compter la poursuite par équipes, où elle est vice-championne mondiale avec Ivanie Blondin et Isabelle Weidemann, les deux autres patineuses qui ont dominé la compétition.

Beau casse-tête pour Maltais à l’aube de sa quatrième saison depuis qu’elle a fait la transition du courte piste. Mercredi, elle devait d’ailleurs rencontrer ses deux entraîneurs pour déterminer comment elle jonglerait avec les cinq distances.

Les joies du 1000 m

Chose certaine, elle ne veut pas laisser tomber le 1000 m même si elle a davantage fait ses preuves sur 1500 m (13e aux Championnats du monde) et 3000 m (8e).

Je n’avais pas prévu ça, mais je suis championne canadienne sur cette distance et j’ai envie de prendre ma place. Je veux voir ce que je peux faire aussi sur le 1000 m, voir où ça peut me mener. Comme j’ai dit à mon entraîneur, si je suis capable de m’améliorer encore, ce serait génial.

Valérie Maltais

Spécialiste du 1000 m quand elle évoluait en courte piste – elle a déjà établi le record mondial et détient toujours la marque olympique –, Maltais attribue sa récente performance au travail précis qu’elle a réalisé durant l’été. En vertu de son rôle de première relayeuse à la poursuite, elle s’est particulièrement attardée aux départs et à la vitesse de pointe.

Pour ce faire, elle a profité des enseignements de Shannon Rempel, ancienne spécialiste du sprint qui s’est récemment jointe au programme national à titre d’adjointe à l’entraîneur-chef néerlandais Remmelt Eldering. Pour l’anecdote, la Québécoise s’est installée au huitième rang de tous les temps au Canada sur 1000 m, tout juste devant… Rempel, médaillée d’argent à la poursuite aux Jeux de Turin en 2006.

PHOTO DAVE HOLLAND, FOURNIE PAR PATINAGE DE VITESSE CANADA

Valérie Maltais à l’entraînement

« C’est surtout avec Shannon que j’ai beaucoup travaillé mes départs, la vitesse. Elle m’a donné beaucoup de conseils et elle était extrêmement contente. Elle m’a dit que j’avais vraiment bien patiné et qu’elle était fière. En retour, je lui ai dit qu’une grosse partie de ma performance lui était attribuable. »

Pendant la course, Maltais n’a jamais regardé le petit panneau brandi par Eldering lui indiquant ses temps au tour, se concentrant « à rester vraiment relaxe, confiante et juste pousser en utilisant [s]a puissance ».

« La meilleure version de moi-même »

Après ses succès aux Championnats du monde dans la bulle d’Heerenveen, en février, Maltais s’était inquiétée du temps dont elle disposait pour atteindre tous ses objectifs à l’aube d’une saison qui la mènera, espère-t-elle, vers ses quatrièmes Jeux.

« On a trouvé une façon de renverser ce sentiment-là. Aussi simple que ça puisse paraître, c’est de m’assurer que chaque entraînement compte, que j’aie des objectifs clairs, des intentions précises à chaque entraînement. »

Avec le recul, la médaillée d’argent au relais à Sotchi constate que sa transition d’une discipline à l’autre lui sert très bien.

Ça m’a vraiment apporté un vent de fraîcheur. Je m’en aperçois maintenant.

Valérie Maltais, à propos de la transition en longue piste

« À la fin de ma carrière en courte piste, j’allais souvent à des entraînements pour cocher une case, faire acte de présence. À un moment donné, il me manquait de défis, de désir de vraiment être la meilleure patineuse possible, la meilleure version de moi-même. »

Ce second souffle l’accompagne chaque jour à l’Ovale olympique de Calgary, même dans les moments plus gris où les jambes ne veulent pas répondre.

« C’est encore plus le cas cette année. Il m’en reste moins que j’en ai fait [en patinage de vitesse]. Je veux profiter de chaque moment avec mes coéquipiers et coéquipières, mes entraîneurs, les personnes qui m’entourent. On est tous humains, il y a des journées où ça te tente moins. Quand tu as une bonne attitude, ça aide. »

Le chrono est là pour le prouver.

Un retour au Québec

Valérie Maltais et son fiancé ontarien Jordan Belchos, quadruple médaillé aux Mondiaux et cinquième à PyeongChang au 10 000 m, ont déjà commencé à magasiner un condo à Montréal. Après quatre ans à Calgary, le couple viendra donc s’installer dans la métropole le printemps prochain. « J’y ai habité super longtemps et les deux, on adore Montréal, a expliqué la patineuse. Jordan ne sait pas s’il va prendre sa retraite. Il terminerait ses études en urbanisme à Concordia. Je ne sais pas si je vais faire un autre cycle olympique. » Le déménagement est attribuable à l’ouverture du Centre de glaces de Québec, où Maltais poursuivra l’entraînement pendant un an ou deux. « Ça se peut bien que je continue pendant quatre ans aussi ! J’ai envie d’expérimenter le nouveau centre. Je vais voir comment la transition va se passer. J’ai l’impression qu’il y aura aussi beaucoup de changements à Patinage de vitesse Canada. Plusieurs patineurs ont déjà exprimé qu’ils voulaient aller à Québec. Un changement, ça fait du bien. »