En octobre, Mikaël Kingsbury s’était préparé à la saison en tirant une analogie de l’un de ses sports favoris, le baseball : « Il faut être prêt à se faire lancer des balles courbes. »

Trois mois plus tard, le médaillé d’or olympique de ski acrobatique doit légèrement réviser ses prévisions. « Ce n’est plus des balles courbes, mais des balles papillon… », a-t-il confié à La Presse jeudi matin.

Avant même l’annulation de nombreuse épreuves et les chambardements de calendrier, le bosseur de Deux-Montagnes a dû composer avec la première blessure de sa carrière. Le 29 novembre, il s’est fracturé deux vertèbres dorsales après un mauvais atterrissage lors d’un entraînement en prévision de la Coupe du monde de Ruka, en Finlande.

Moins de deux mois plus tard, Kingsbury prépare déjà son retour. À moins d’un revirement, il s’alignera aux deux épreuves prévues les 4 et 5 février prochains à Deer Valley.

Le double champion mondial vient de terminer un stage d’entraînement avec l’équipe canadienne à Val-Saint-Côme, où il a passé 10 journées sur les bosses sans éprouver de douleur significative.

Samedi, il s’envolera pour Calgary, où il participera à un autre camp d’une semaine avant de prendre la direction de l’Utah. Un simple et un duel sont au programme.

Il faut que les choses se passent bien [à Calgary], mais de la manière dont cela s’est déroulé à Val-Saint-Côme, j’ai bon espoir d’être dans le portillon de départ à Deer Valley.

Mikaël Kingsbury

Six semaines pile-poil après sa blessure, Kingbury a passé des radiographies qui ont démontré que les vertèbres T4 et T5 s’étaient parfaitement ressoudées, signal qu’il pouvait remettre les skis.

Après trois jours tout en douceur sur le plat à Saint-Sauveur et Val-Saint-Côme, il a graduellement repris sur les bosses, d’abord à 40 % de sa vitesse habituelle. Il a réintégré les sauts après quelques jours, sans jamais forcer la note.

« J’ai repris ma touche, l’absorption, le timing. C’était le fun de faire ça ; je n’avais jamais pris autant mon temps dans un camp à refaire les bases. Chaque jour, j’avais un petit objectif que je cochais. »

Le plus important : « Je n’ai presque rien senti dans mon dos. »

Kingsbury n’a cependant pas encore mis toute la gomme, en particulier dans les sauts. Il compte sur les six jours prévus à Calgary pour y parvenir. « On a plus travaillé mes virages dans les bosses, ce qui est probablement le plus important. Les sauts, c’est comme ma force. Ça m’inquiète un peu moins. »

Lundi, l’athlète de 28 ans a publié sur ses réseaux une vidéo où il exécute un « double cork 720 truck driver », comme quoi il n’est pas si loin de son meilleur niveau dans les airs.

https://twitter.com/MikaelKingsbury/status/1351301977569976320

En plus de l’étape initiale de Ruka, Kingsbury a raté deux courses en Suède, si bien qu’il accuse un retard de 172 points sur les deux comeneurs, le Suédois Ludvig Fjällström et le Japonais Ikuma Horishima.

Avec l’annulation de nombreuses épreuves en raison de la pandémie, l’homme aux neuf globes de cristal consécutifs constate que son objectif de rattraper son retard sera très difficile à réaliser, voire impossible. Une victoire équivaut à 100 points, une deuxième place, à 80.

Encore jeudi, la Fédération internationale de ski a annoncé l’annulation de l’escale de Tazawako, au Japon, programmée les 6 et 7 mars.

« Mon objectif sera d’être celui qui fait le plus de points à partir du moment de mon retour et jusqu’à la fin de la saison », a précisé le Québécois, qui surfait sur une vague de 107 départs de suite avant sa blessure. « On verra où ça me mène. »

Kingsbury a également appris avec déception l’avortement du projet de Championnats du monde à Calgary, à la fin de février, qui devaient remplacer ceux prévus sur la piste olympique de Pékin.

« C’est plate parce que ma motivation pour revenir était un peu de me dire que cette année, c’était pas mal le seul titre que je pouvais aller chercher. »

Le double médaillé d’or de Deer Valley, en 2019, se faisait réaliste. « Ce n’est pas comme si mes attentes étaient élevées. Je savais aussi que ce serait compliqué à organiser. Je ne peux rien faire contre ça. Ça fait juste en sorte que je vais être champion du monde deux années de plus. Ce n’est pas un problème. »

Pour l’heure, Kingsbury souhaite seulement être en mesure de s’installer en haut de l’exigeant parcours de Deer Valley, le 4 février, sans éprouver la moindre crainte pour son dos.

« Ce sera faisable de gagner, oui, mais je ne me mets pas de pression », a assuré le skieur aux 63 victoires. « J’ai travaillé fort ces dernières semaines pour remonter la pente, pour être capable d’être compétitif. Je ne reviens pas non plus pour finir 10e ou 20e. »

Chose certaine, il va encore viser le coup de circuit.