(Montréal) Les sœurs Justine et Chloé Dufour-Lapointe sont rentrées au pays à la suite de l’annulation le week-end dernier de la Coupe du monde d’Idre Fjall, en Suède, en raison de la pandémie du coronavirus et elles l’admettent d’emblée : leur saison s’est terminée en queue de poisson.

Les skieuses acrobatiques québécoises sont maintenant en quarantaine préventive chez elles pour 14 jours. Elles en ont donc profité pour dresser un premier bilan de leur campagne avec La Presse canadienne.

Ainsi, même si elle n’a pu mettre la main sur le globe de cristal comme son compatriote Mikaël Kingsbury, Justine s’est signalée en terminant la saison avec quatre podiums, dont une victoire, et le quatrième rang du classement de la discipline. La cadette des sœurs Dufour-Lapointe, qui est âgée de 25 ans, retiendra surtout de cette saison tumultueuse sa victoire en bosses en parallèle à Deer Valley au début du mois de février.

PHOTO D’ARCHIVES BERNARD BRAULT, LA PRESSE

Justine Dufour-Lapointe à la Coupe du monde, tenue au Mont Tremblant, le 25 janvier 2019.

« J’ai appris cette journée-là que j’avais une force en moi. Ç’a vraiment été une belle journée, et c’est probablement ça qui me permettra de me rappeler au cours des prochaines saisons que j’ai le pouvoir de me transformer en tigresse. Quand ça s’est produit, même moi je pense que j’étais sous le choc. On dirait qu’à ce moment-là, même moi je n’y croyais plus. Et cette journée-là, j’ai cessé de penser, et j’ai laissé aller le naturel. Et ça s’est fait tout seul. C’est un cadeau que je me suis fait cette année », a-t-elle confié.

Tremplin la prochaine saison

Ces résultats, jumelés au fait qu’elle est présentement en pleine forme, lui serviront de tremplin pour la saison prochaine, a-t-elle assuré.

« On dirait vraiment que je termine la saison en étant affamée. La saison s’est terminée en queue de poisson, à cause du coronavirus, surtout que j’ai encore l’impression que j’ai du jus. Vous savez, malgré mon âge et ma maturité, c’est rassurant de voir qu’à ce stade-ci de l’année j’ai encore autant d’énergie. Ma forme physique est vraiment bonne, et ça c’est une bonne nouvelle. Et ce sera un bon tremplin pour l’entraînement de cet été, et la saison prochaine. J’ai hâte de retourner skier. »

Pour sa part, Chloé a éprouvé un peu plus de difficultés en 2019-20. Elle n’a pu faire mieux que deux huitièmes places à la Coupe du monde de Thaiwoo, en Chine, et s’est contentée du 15e échelon au classement cumulatif, son pire en carrière.

Alors que Justine savourait sa victoire à Deer Valley, Chloé était réduite au rôle de spectatrice en raison d’une blessure. Et elle n’a jamais pu retrouver son rythme par la suite.

PHOTO D’ARCHIVES PAUL CHIASSON, PRESSE CANADIENNE

Chloé Dufour-Lapointe à l’échauffement avant la Coupe du monde tenue au Mont Tremblant le 25 janvier 2019.

« Je suis retournée à la compétition (à Tazawako) au Japon, où j’ai testé le niveau de douleur, mais ma confiance était un peu ébranlée. Il a fallu que j’abaisse le niveau de difficulté de mes sauts pour regagner ma confiance, et ç’a paru dans mes résultats. Puis, les parcours au Kazakhstan et en Russie n’étaient pas nécessairement prêts, ce qui signifie que nous avons dû modifier nos plans à quelques heures d’avis, a-t-elle expliqué.

“Ç’a été difficile, mais de manière générale, je dirais que je suis satisfaite de mes résultats cette saison », a résumé celle qui compte maintenant 127 départs en carrière sur le circuit de la Coupe du monde.

Il ne lui en manque d’ailleurs que trois en Coupe du monde pour rejoindre la bosseuse canadienne qui en compte le plus en carrière, Audrey Robichaud. De plus, il ne lui en faut que 23 supplémentaires pour dépasser la détentrice du record absolu, la Norvégienne Kari Traa. Un plateau qu’elle prend avec philosophie.

‘Je ne suis pas une fille de statistiques. C’est’cool », je trouve ça le’fun », mais ce n’est pas mon objectif. Je veux être la meilleure athlète que je puisse être, en développant de nouveaux sauts notamment, même si je sais qu’à ce stade-ci de ma carrière, c’est difficile d’aller chercher le grain de sel supplémentaire. Mais la passion est encore là, et ma volonté de travailler aussi. Et si les prochains Jeux olympiques (d’hiver) ont lieu, alors j’aimerais y participer et offrir mon 110 %’, a résumé la bosseuse âgée de 28 ans.

‘Tout le monde est sur le gros nerf’

D’autre part, la situation actuelle a contraint les sœurs Dufour-Lapointe à modifier leurs plans de vacances. Elles devaient initialement quitter la Suède pour se rendre directement aux Bahamas, y rejoindre leurs parents qui y séjournent depuis quelques mois déjà.

Toutefois, en raison des nouvelles mesures décrétées par le gouvernement du Québec, et la possibilité que les frontières soient bientôt fermées, les sœurs Dufour-Lapointe sont rentrées à Montréal, tandis que leurs parents tentent présentement de trouver la meilleure façon de rentrer au pays.

La situation est d’autant plus compliquée que le système immunitaire de leur mère, Johane Dufour, est affaibli depuis qu’elle a appris qu’elle souffre d’un cancer des poumons. Ce qui entraîne son lot de préoccupations chez leurs filles – dont l’aînée, Maxime, qui se trouve au chalet familial dans les Laurentides.

‘Nous ne savons pas trop comment réagir. On vit dans l’inconnu présentement. Vous savez, ce voyage-là on l’attendait depuis un long moment déjà, a expliqué Justine. Je n’ai pas vu mes parents depuis Noël, mais là évidemment, avec les circonstances actuelles, ça ne pouvait plus se faire. Nous voulons à tout prix éviter de contaminer notre mère, qui est encore plus à risque.

‘J’ignore quand elle rentrera au pays. Mais c’est certain qu’on va attendre la fin de notre quarantaine avant d’aller la voir. C’est difficile, parce que tout le monde est sur le gros nerf », a conclu la médaillée d’or des Jeux olympiques de Sotchi en 2014.