Aux Jeux olympiques de Vancouver, il y a quatre ans, Erik Guay avait filé à l'anglaise après la première manche d'entraînement. Crispé, il ne voulait pas laisser les questions des médias perturber sa préparation. Tout un contraste avec son comportement aux JO de Sotchi, où il rayonnait presque autant que le soleil à cette première journée des épreuves de ski alpin, jeudi matin.

Septième de la première descente chronométrée, une référence plus ou moins significative, Guay avait envie de parler, s'arrêtant ici à la radio de la BBC, là devant les journalistes autrichiens. Il a même sorti un accent français qu'on ne lui connaissait pas pour bien se faire comprendre des confrères helvètes et de l'Hexagone... avant de terminer le tout en bon vieux québécois.

«Je suis bien, je m'amuse et je me sens dans le beat des Jeux olympiques», a confirmé Guay à la fin de sa tournée médiatique. «J'ai hâte au challenge de la course.»

À sa deuxième sortie seulement depuis une blessure à un genou survenue à la Coupe du monde de Wengen, le 18 janvier, le skieur de Mont-Tremblant était soulagé. Le parcours de la station Rosa Khutor est exigeant, plutôt long (plus de deux minutes), bosselé et glacé par endroits. Bref, un vrai test pour un skieur convalescent.

«J'étais un peu craintif, je n'étais pas sûr que mon genou allait être à 100%, a reconnu Guay. Plus je descendais, mieux je me sentais. Rendu en bas, je n'avais pas mal au genou. Ça m'a vraiment mis en confiance. Je peux mettre (la blessure) de côté et passer à autre chose.»

Les conditions de neige variables annoncent un casse-tête pour les techniciens. Le sommet offre une neige très mordante de style Colorado. Le milieu est très glacé en raison des injections d'eau. Et les derniers virages se faisaient jeudi sur une surface printanière qui a particulièrement souri à Guay, le plus rapide dans la section finale. Il prévoit d'ailleurs mettre l'accent sur ce secteur quand viendra le temps de déterminer le type de fartage.

Sur une lancée depuis plusieurs semaines, l'Américain Bode Miller s'est annoncé comme le grand favori en établissant le temps de référence malgré quelques erreurs de trajectoire flagrantes selon sa propre évaluation.

Guay lui a concédé 91 centièmes, un écart encourageant pour l'ancien champion mondial. «Neuf dixièmes, il n'y a rien là. En plus, il y a quelques gars devant moi qui ont manqué des portes, dont Kueng (2e), Mayer (3e) et Sullivan (4e). Je suis à un bon endroit.»

Le ton était moins joyeux chez ses collègues canadiens. Jan Hudec, qui doit composer avec une (autre) douleur au dos, s'en est le mieux tiré avec le 24e temps. Grippé, Manuel Osborne-Paradis a fini 42e, à plus de cinq secondes de Miller.

Benjamin Thomsen, surprenant deuxième de l'épreuve-test de Sotchi, il y a deux ans, s'est positionné 38e. Il faut dire que le parcours a été modifié depuis, en particulier la partie du haut qui a été élargie au grand plaisir de Guay, qui avait exprimé son mécontentement en 2012.

«Tout a changé en haut, a affirmé le Québécois de 32 ans. Ça ressemble beaucoup plus à une descente de calibre. C'est un vrai champion qui va gagner.»

Lire ici qu'il n'y aura pas de vainqueur-surprise, un scénario souvent vu à la descente olympique. Selon Guay, une dizaine de coureurs peuvent prétendre à la victoire. Dont lui, bien sûr. «Je suis ici pour ça... Ce sera celui qui a le plus faim et qui pourra skier avec le plus de finesse la journée de la course.»

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Faux départ pour Marie-Michèle Gagnon

Marie-Michèle Gagnon s'est fait dire de ne pas aborder les Jeux olympiques comme une autre compétition. De s'attendre à tout et surtout au pire. Le conseil lui a été utile à son entrée en scène à la station Rosa Khutor, jeudi midi.

Le premier entraînement de la descente féminine a d'abord été retardé de deux bonnes heures, le temps de raboter le saut final, un peu trop agressif au goût des organisateurs. Jusqu'ici, rien d'exceptionnel pour un nouveau parcours.

Quand est venu le tour de Gagnon d'aborder le saut modifié, elle a vu un signaleur lui intimer de ralentir d'un geste de la main. À ses côtés, un autre signaleur tenait un drapeau jaune, celui qui oblige les coureuses à s'arrêter pour danger imminent. Perplexe, la skieuse de Lac-Etchemin s'est immobilisée complètement avant d'arriver dans le mur.

Ce n'est qu'après avoir franchi la ligne qu'elle a compris sa méprise: les officiels avaient annoncé avant la reprise que toutes les coureuses recevraient le signal de ralentir. Apparemment, l'information ne s'était pas rendue à l'équipe canadienne. «Il y a eu de la confusion sur la radio», a expliqué Gagnon, visiblement contrariée par la situation.

L'événement n'est pas dramatique (sa 46e place ne signifie strictement rien), mais la skieuse de Lac-Etchemin aurait bien aimé faire toute la descente à fond et négocier ce saut final. Son expérience dans la discipline est limitée et cet entraînement lui servait de préparation pour le super-combiné de lundi, première épreuve à Sotchi. Le mois dernier, Gagnon a remporté le seul super-combiné cette saison, sa première victoire en Coupe du monde. La manche de vitesse était toutefois un super-G, dans lequel la Québécoise est plus à l'aise.

Elle compte bien se reprendre aujourd'hui et demain, alors que deux autres descentes d'entraînement sont programmées.

Photo Alessandro Trovati, AP

Marie-Michèle Gagnon