Martin St-Louis ne mentira pas: il n'a pas apprécié le fait d'être laissé de côté par Équipe Canada en janvier. Lorsqu'une place s'est finalement libérée in extremis, il y a quelques jours, le hockeyeur n'a pas accepté sur-le-champ.

Le Québécois n'a pas sauté sur l'offre, n'a pas fait dans la seconde ses valises pour Sotchi. Il a plutôt demandé du temps pour réfléchir, une nuit pour lui porter conseil.

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Bien sûr, il voulait d'abord en parler avec les siens. St-Louis avait déjà planifié ses vacances. Pendant la pause olympique, pendant que les meilleurs joueurs canadiens disputeraient en Russie un tournoi aux dimensions planétaires, Martin St-Louis avait prévu de partir en famille dans les montagnes du Vermont.

Mais sa réflexion allait bien au-delà des montagnes du Vermont. Hier, dans la zone mixte du palais des glaces Bolchoï, bondée de joueurs et de journalistes canadiens, Martin St-Louis a livré le fond de sa pensée.

«Ça ne m'a pas traversé l'esprit de dire non. Mais je voulais m'assurer, si je venais, de venir à 100%. Je ne voulais pas venir ici avec le mauvais état d'esprit», a expliqué St-Louis, qui est arrivé en Russie hier avec toute l'équipe canadienne.

Le mauvais état d'esprit. Manifestement, St-Louis a mal digéré le fait d'avoir été laissé de côté par Steve Yzerman, son directeur général à Tampa Bay et le grand patron de la sélection canadienne. La décision avait tous les airs d'un désaveu. Le joueur en veut-il à Yzerman?

«Ce qui se passe entre Steve et moi se passe entre Steve et moi. Personne n'a besoin d'être au courant», a répondu St-Louis d'un ton cassant. S'il voulait désamorcer l'affaire par cette phrase sibylline, c'est raté...

Mais St-Louis a passé 10 heures dans l'avion qui le menait à Sotchi. C'est peut-être suffisant pour faire la paix avec la manière dont il est arrivé jusqu'en Russie, par la petite porte après la blessure de Steven Stamkos.

De toute manière, il est habitué aux petites portes. Le joueur non repêché de 38 ans en a défoncé quelques-unes. «Je ne sais pas pourquoi ça a pris tant de temps avant d'avoir ma chance. Des fois, des choses arrivent dans la vie qui nous forcent à nous dépasser. Si les choses avaient été plus faciles dans ma carrière, peut-être que je ne serais même pas ici aujourd'hui.»

Jouera-t-il?

La question est maintenant de savoir si le joueur de 5'8 aura la chance de jouer. Tout indique qu'il pourrait être attaquant réserviste. Sera-t-il en uniforme jeudi à l'occasion du premier match, contre la Norvège? Peu importe, il entend bien faire sa place.

«Je dois laisser mon ego à la porte et donner le meilleur de moi-même pour l'équipe. Je ne sais pas combien de minutes je vais jouer par match. Je ne connais pas le rôle que je vais avoir. Ça va se préciser au cours des jours.

«Si je suis laissé de côté pour un match, alors je suis laissé de côté pour un match, enchaîne St-Louis. Je ne peux pas contrôler ça. Mais je contrôle ce qui se passe sur la glace, et mon but est de jouer le dernier match.»

Le dernier match, que les joueurs canadiens espèrent disputer pour l'or. Laissé de côté par Équipe Canada en 2010, St-Louis avait trouvé difficile de regarder la finale à la télé. La médaille d'or de ses compatriotes à Vancouver avait un goût amer.

À Turin, quatre ans plus tôt, le Québécois était de l'équipe canadienne rentrée bredouille. «À Turin, j'étais comme dépassé par l'ampleur de l'événement. Ça a nui à mon jeu, je pense. Aujourd'hui, j'ai acquis de l'expérience, je suis pas mal plus vieux et je ne me sens pas dépassé.»

À 38 ans, ces Jeux sont sûrement sa dernière chance de remporter une médaille olympique. Il s'en est fallu de peu pour qu'il passe les prochains jours dans les montagnes du Vermont plutôt qu'à l'ombre de celles du Caucase. Mais Martin St-Louis a eu sa chance. Et il n'entend pas la laisser passer.

«J'ai toujours dû me battre pour mériter ce que j'ai eu dans ma carrière, lance St-Louis avec aplomb. Les Jeux, pour moi, c'est juste une autre de ces batailles-là.»