Allemagne ou Argentine? À quelques heures de ce grand rendez-vous à Rio de Janeiro, notre journaliste Pascal Milano analyse en détail les secteurs de jeu des deux finalistes.

LES GARDIENS

Cela fait déjà quelque temps que Manuel Neuer est considéré comme le meilleur gardien du monde. Il est également le plus complet, excellant dans les airs, sur sa ligne, dans les sorties lointaines ou dans le jeu au pied. Utile quand la ligne défensive est assez haute. «Il peut être considéré comme un défenseur supplémentaire. Il a les mêmes aptitudes que les autres joueurs: une bonne qualité de passe et une bonne appréciation des distances», a résumé Joachim Löw.

Son homologue argentin, Sergio Romero, a entrepris le Mondial avec une multitude d'incertitudes. Allait-il retrouver une bonne forme et un rythme après avoir disputé seulement trois matchs à Monaco cette saison? Il a rapidement dissipé les doutes avec quelques arrêts importants lors du premier match face à la Bosnie-Herzégovine. En demi-finale, il a finalement repoussé deux tentatives lors de la séance de tirs au but. Résultat, il est passé de gardien contesté à héros national. Certains partisans argentins ont ainsi fait le rapprochement avec son compatriote Sergio Goycochea (1988-1994).

Avantage: Allemagne

LA DÉFENSE

Avant Philipp Lahm soit remplacé sur le côté droit, le quatuor allemand était entièrement composé de défenseurs centraux. À défaut d'être impliqués offensivement, les deux latéraux pouvaient se concentrer sur les tâches défensives. Il n'empêche que le droitier Benedikt Höwedes, à gauche, a connu quelques soucis, notamment face au Ghana. Le joueur de Schalke 04 est généralement considéré comme le maillon faible de la défense allemande. «Je ne suis pas Roberto Carlos qui était fantastique avec ses coups francs et ses centres. Je sais que je ne suis pas comme lui», s'est-il défendu, jeudi. La défense allemande, qui n'est pas la plus rapide, a aussi énormément souffert contre les ballons dans la profondeur de l'Algérie, en huitièmes de finale. Enfin, Mats Hummels est une réelle menace sur les coups de pied arrêtés offensifs. Comme pour Romero, la défense argentine n'était pas considérée comme la force du groupe. Et pourtant, elle n'a encaissé que trois buts durant le Mondial et a pu, avec l'aide de ses milieux défensifs, neutraliser des adversaires dangereux tel Arjen Robben. Ezequiel Garay a, par exemple, été brillant dans les duels, aériens surtout, puisqu'un seul autre défenseur - Stefan De Vrij - a gagné davantage de ballons que lui. Martin Demichelis, dont le dernier match avec l'Argentine remontait à 2011, a aussi apporté de la stabilité à la défense après avoir remplacé Federico Fernandez en quarts de finale. Moins connu que ses copains de l'axe ou que Pablo Zabaleta, Marcos Rojo, par sa vitesse et ses qualités de centreur, est l'une des révélations du tournoi. Il devrait maintenant rejoindre une grosse équipe européenne.

Avantage: aucun

LE MILIEU

Après des problèmes physiques au cours de la dernière saison et de la préparation, Bastian Schweinsteiger et Sami Khedira ont retrouvé leur forme optimale au bon moment. C'est d'ailleurs ce que Löw espérait après avoir minimisé leur temps de jeu lors de la phase de groupe et des huitièmes de finale. Aujourd'hui, il est difficile de trouver un groupe plus complémentaire et efficace avec Schweinsteiger, Khedira et Toni Kroos, le plus avancé des trois. Ils allient expérience, technique, physique et intelligence tactique. La première demi-heure contre le Brésil, où ils ont donné le tournis aux milieux défensifs et aux défenseurs, restera un modèle du genre. Kroos est d'ailleurs en lice pour le titre de meilleur joueur du Mondial. «Il apporte le ballon chaque fois là où il doit être apporté, et ça c'est une grande force», a commenté Miroslav Klose.

L'Argentine n'est pas vraiment dans le même registre avec ses milieux de terrain. Lucas Biglia, qui a remplacé Fernando Gago, est davantage réputé pour sa qualité de récupérateur et la sobriété de son jeu. Il ne s'aventure guère dans le tiers offensif. Son acolyte Javier Mascherano, qui évolue en défense à Barcelone, est le vrai patron du milieu par sa volonté de fer et la qualité de son jeu long. En demi-finale, son tacle face à Robben, dans les dernières secondes, est l'un des grands moments du Mondial. «Il est le symbole et l'emblème de notre équipe nationale. Il a pris toute la responsabilité de l'équipe sur ses épaules», s'était réjoui Alejandro Sabella.

Avantage: Allemagne

L'ATTAQUE

Sur le plan purement statistique, l'Allemagne est la meilleure attaque du tournoi et pourrait même battre le record du Brésil de 2002 (18 buts). Löw a revu sa copie après les huitièmes de finale, décalant Thomas Müller sur le côté droit, afin de faire une place à Klose dans l'axe. D'un côté, il possède un faux numéro 9, toujours en mouvement et à la recherche d'espaces, et de l'autre, un attaquant traditionnel qui ne touche pas un ballon avant de surgir au bon moment. Les trois milieux axiaux, surtout Khedira et Kroos, peuvent aussi changer les choses. Sur le banc, André Schürrle est l'option privilégiée grâce à la qualité de ses appels en profondeur. De son côté, l'Argentine n'a pas atteint des sommets offensifs dans ce Mondial en dépendant de Lionel Messi en phase de groupe. Lors des trois derniers matchs, elle n'a inscrit que deux buts grâce à Ángel Di María, forfait, et Gonzalo Higuaín, rarement convaincant. Peu importe la perspective, les chances argentines passent par un Messi des grands jours qui saura faire oublier ses deux derniers matchs. Ses ballons y ont été moins précis et ses accélérations ont été moins tranchantes face à des adversaires qui l'ont aussi bien surveillé. «Leo a dit qu'il avait l'impression que ses jambes pesaient 100 kilos. Il était très fatigué», a indiqué son père Jorge à un journal brésilien. Tout de même, Messi reste Messi avec une participation à 8 des 9 buts argentins du tournoi.

Avantage: aucun, mais avec Messi...