Ce clin d'oeil de l'histoire n'avait échappé à personne lors du tirage au sort. À la barre des États-Unis, Jürgen Klinsmann allait retrouver son ancienne sélection de l'Allemagne dirigée par son ex-adjoint, Joachim Löw. Le contexte actuel du groupe G élargit cependant le débat autour de ce match réunissant de très bonnes connaissances.

Retrouvailles

Si les institutions allemandes ont fait le bon choix d'investir dans la formation, après un Euro 2000 raté, Klinsmann et Löw ont, quant à eux, repensé le style de la sélection. Plus offensive et moins prévisible, la Nationalmannschaft avait terminé à la troisième place du Mondial 2006. À l'image de leur carrière de joueur respective, Klinsmann était dans la lumière alors que Löw se retrouvait plutôt dans l'ombre. Critiqué pour résider aux États-Unis et pour son utilisation de méthodes dites à «l'américaine», le premier était le visage de l'équipe alors que le second, son bras droit, était perçu comme le tacticien.

Même si leurs chemins se sont séparés après l'épopée de 2006, les deux hommes sont restés en contact. «Nous avons toujours échangé nos idées sur une base régulière, mais cela va certainement changer avant le match de Coupe du monde», expliquait Löw après le tirage au sort.

Double nationalité

Klinsmann n'a pas initié le mouvement mais, depuis son arrivée, les États-Unis misent sur un fort contingent de joueurs nés ou ayant grandi en Allemagne. Cinq des 23 joueurs présentent, aujourd'hui, le même profil avec un père américain, militaire, et une mère allemande. Cette tendance ne s'est pas fait sans heurt auprès du public, qui a déploré la présence du jeune Julian Green aux dépens de Landon Donovan.

D'anciens joueurs ont également remis en doute l'attachement des cinq joueurs au maillot américain. Le débat s'est quelque peu calmé lors des deux derniers matchs puisque John Brooks et Jermaine Jones ont inscrit deux des quatre buts des États-Unis dans cette Coupe du monde. Seuls Jones et Fabian Johnson sont, par ailleurs, titulaires. Plus largement, Klinsmann n'a pas hésité à faire appel à des joueurs possédant la double nationalité, peu importe leurs horizons. Et pour l'instant, cela fonctionne.

Collusion

Les références au «match de la honte» ont fleuri, ces derniers jours. En 1982, l'Allemagne et l'Autriche avaient livré un simulacre de match dont l'issue (1-0) leur avait été profitable aux dépens de l'Algérie. Dénonçant la supercherie, le public espagnol s'était mis à scander «Algérie! Algérie!» et à sortir les mouchoirs blancs. Or, 32 ans plus tard, l'Allemagne et les États-Unis, avec leur lien évident, pourraient se contenter d'un match nul pour aller en huitièmes de finale. Du coup, le Portugal et le Ghana, autres membres du groupe G, sont à l'affût d'une possible entente germano-américaine. Inutile, ont clamé les membres de deux camps qui espèrent terminer en tête du groupe. «En tant que joueurs, on ne joue pas pour un nul ou pour ne pas marquer. On fait le maximum pour gagner et c'est ce qu'on va faire», a expliqué Mesut Ozil.

En qualifications, les États-Unis avaient, par ailleurs, permis au Mexique de participer aux barrages en passant la vitesse supérieure contre le Panama. Avec un peu plus de malice, les Américains, déjà qualifiés, auraient profité de ce match sans intérêt pour éliminer leur grand rival de la CONCACAF. Ajoutons qu'un «nouveau match de la honte» serait catastrophique pour l'image du soccer aux États-Unis alors que tous les regards sont braqués sur le Brésil.

«Effet Coupe du monde»

La Coupe du monde bat des records d'audience à la télévision américaine. Ainsi, le match nul des États-Unis contre le Portugal, dimanche, a été regardé, en moyenne, par 18,2 millions de téléspectateurs à ESPN. Déjà supérieur à la moyenne d'auditoire de la dernière finale de la NBA, ce chiffre gonfle encore davantage si on prend en compte le diffuseur hispanophone, Univision (6,5 millions). Il y a fort à parier que les fidèles seront tout aussi nombreux, aujourd'hui, pour le match décisif entre les États-Unis et l'Allemagne.

En cas de qualification, ce succès peut-il rejaillir sur la MLS? Si la moyenne d'assistance est en hausse depuis plusieurs saisons, la ligue, avec la MLS Cup notamment, reste dans un certain anonymat télévisuel. Selon le commissaire Don Garber, «l'effet Coupe du monde» passera par la promotion des joueurs de la sélection qui évoluent, de plus en plus, dans la MLS. Il faisait notamment allusion au retour de Clint Dempsey et de Michael Bradley, respectivement à Seattle et Toronto. Huit des 14 joueurs participant au match contre le Portugal évoluaient d'ailleurs dans la MLS.