Du Québec au Mozambique en passant par le Portugal, le parcours de Marc Dos Santos sort de l'ordinaire. Toutes ces expériences ont contribué à forger le style et la personnalité de l'entraîneur de l'Impact, qui affrontera demain soir l'AC Milan au Stade olympique.

Il y a toujours un carnet de notes sur le comptoir de la cuisine de la famille Dos Santos. Pour la liste d'épicerie ? Peut-être, mais surtout pour permettre à l'entraîneur de l'Impact de «noter deux, trois idées à trois heures du matin».

Pour Marc Dos Santos, le métier d'entraîneur est une passion dévorante qui accapare son esprit une très grande partie de la journée et... parfois de la nuit. Une passion qui s'est développée sur trois continents au cours des trois dernières décennies.

C'est à Brossard que le jeune Marc a donné ses premiers coups de pied dans un ballon, sous la supervision d'un père passionné de ballon rond et impliqué au sein la Ligue excellence du Québec.

Puis, à l'âge de 9 ans, la famille est rentrée au Portugal. Dos Santos s'est alors imprégné de la culture du soccer omniprésente au pays d'Eusebio et de Cristiano Ronaldo. Il y a poursuivi son cheminement qui est devenu atypique à l'âge de 16 ans. L'arrière droit qu'il était est devenu l'entraîneur de son équipe à l'école secondaire. La piqûre a fait effet, mais elle ne l'a pas empêché de continuer à jouer.

«Le meilleur niveau que j'ai pu atteindre, c'était la troisième division nationale, explique-t-il. À 22 ans, j'ai suivi mon père au Mozambique, où j'ai joué en première division du pays. C'était une expérience unique et un peu folle. Puis à 26 ans, j'ai réalisé que je n'allais jamais faire mieux que du semi-pro. Comme je voulais évoluer au plus haut niveau possible, j'ai arrêté de perdre mon temps et j'ai commencé à étudier pour être entraîneur.»

Ses stages l'ont alors conduit dans les clubs portugais du Boavista FC, du SC Beira Mar et du FC Porto entre les années 2004 et 2007. Avec deux grands modèles à suivre : Rafael Benitez (Liverpool) et Jose Mourinho (Real Madrid). Le premier pour «le côté détaillé de sa préparation», le second pour «sa méthodologie».

Une méthodologie que Dos Santos partage à tous les niveaux. «Tous les professeurs de Mourinho ont été les miens lors du stage au FC Porto. C'est cette méthode que l'on utilise à l'Impact. J'y crois beaucoup et quand on a quelqu'un de notre secte méthodologique qui réussit, on est forcément content pour lui.»

Ces stages ont été une étape nécessaire à l'obtention des différentes licences auprès de l'UEFA. Il a d'abord décroché la licence UEFA-B en juillet 2006. En quoi cela consiste-t-il ? «Ils donnent la base sur le coaching, indique Dos Santos. Comment gérer les médias, créer une méthodologie ou animer une séance d'entraînement. Après, c'est à nous de trouver notre style et de créer nos exercices à l'entraînement.»

À l'Attak

Quelques mois plus tard, il a mis véritablement le pied à l'étrier en devenant le premier entraîneur de l'histoire de l'Attak de Trois-Rivières, le club-école de l'Impact. L'équipe trifluvienne, qui évoluait dans la Ligue canadienne de soccer, a surpris dès la première année en remportant la Coupe du Les méthodes du jeune instructeur ont surtout tapé dans l'oeil de Nick De Santis, alors l'entraîneur-chef de l'Impact. «On voit déjà que l'encadrement offert par Marc Dos Santos en est un professionnel, le résultat étant évident sur le terrain», déclarait-il à l'issue du premier match de l'Attak.

Les deux hommes étaient loin de se douter qu'ils allaient travailler en étroite collaboration près de deux ans plus tard.

Le respect du travail avant tout

Après avoir été nommé entraîneur-adjoint de John Limniatis l'été précédent, Dos Santos est devenu le seul maître à bord après un début de saison 2009 calamiteux. De Santis est quant à lui devenu directeur technique du club. Difficile de succéder à deux joueurs très importants dans l'histoire de l'Impact lorsque l'on n'a jamais évolué en professionnel ?

«Le fait de jouer au plus haut niveau, c'est la première impression qu'on donne, mais après, le joueur analyse notre travail. Il oublie d'où on vient, croit Dos Santos. Le plus grand mensonge, c'est de penser que les joueurs respectent la personne. Le joueur respecte le travail avant tout. Et je pense que je suis quelqu'un de très dynamique sur le terrain avec une vision très claire. C'est ça que les joueurs regardent.»

Lorsqu'il pénètre dans le vestiaire de l'Impact, Dos Santos fait face à un large éventail de joueurs : des jeunes espoirs promus de l'Attak, mais aussi des vétérans plus âgés que lui. Il devient simultanément le grand frère, le père, le psychologue, mais surtout le leader qui doit se faire entendre et comprendre. D'où le besoin de «garder une certaine distance» avec les joueurs.

«C'est l'un des secrets du métier d'entraîneur : être proche et très loin en même temps. Il y a des choses que je ne fais pas, comme sortir ou manger avec eux. C'est difficile de dire tout le temps non, car j'ai presque le même âge que Nevio (Pizzolitto), mais il faut garder cette distance-là.»

Un titre dès la première année

Son premier match à la barre de l'Impact, le 15 mai 2009, s'est soldé par un match de nul de 0-0 face au Battery de Charleston. Deux jours plus tard, il remportait sa première victoire par la marque de 4 à 0 face aux Aztex d'Austin.

La suite de la saison est dans la même veine avec des bas - la défaite 6 à 1 contre Toronto puis, cinq matchs sans victoire en juin et juillet - mais surtout des hauts, avec un parcours parfait lors des séries de fin de saison.

Sa gestion des hommes est simple. Il les traite comme les membres de sa propre famille en mettant l'accent sur la confiance et l'honnêteté. En ajoutant un ingrédient important, la transmission de la culture de la victoire.

«Tout le monde est important dans mon vestiaire. On est une famille et je dois croire en tout le monde. Si les joueurs ont signé pour l'Impact, c'est parce qu'ils vont jouer un rôle important. Savoir leur dire quels sont leurs rôles et responsabilités, c'est crucial. Si un joueur n'est pas retenu pour un match et qu'il ne sait pas pourquoi, on perd beaucoup en tant qu'entraîneur. C'est important d'être honnête avec tout le monde.»

Après la conquête du championnat, Dos Santos a signé un contrat de deux saisons qui le lie avec le club jusqu'à la fin de 2011. Sera-t-il de l'aventure montréalaise en Major League Soccer (MLS) ? Réalisera-t-il son rêve d'entraîner au Portugal ? Aussi ambitieux et optimiste soit-il, il sait que d'autres avenues moins heureuses pourraient l'attendre au détour d'une série de défaites.

«Le congédiement, ça fait partie du travail d'entraîneur. Je sais que ça peut arriver mais il faut savoir le gérer. On y pense des fois, mais on ne peut pas se concentrer sur ça, sinon, on va reculer au lieu d'avancer. La meilleure chose, c'est de tout le temps penser à un futur positif. Après, cela dépend aussi de la vision de notre club.»

À court terme, Dos Santos est sur le point d'obtenir sa licence UEFA-A et n'hésite pas à avouer qu'il en apprend sur le soccer lors de chaque rencontre de l'Impact. Sa dernière erreur ? À Austin, où il a placé Tyler Hemming comme unique milieu défensif dans un 4-3-3. Il a corrigé le tir à la mi-temps...

«Le jour où on pense tout savoir, c'est là qu'on va tomber», clame-t-il. Et le meilleur remède pour prévenir cette possible chute est de travailler sans cesse. Comme d'arriver sept heures plus tôt les jours de match ou encore de se lever la nuit pour prendre des notes.