Entre ses insultes adressées aux médias, son rôle contesté sur le terrain et sa place singulière dans le groupe, Samir Nasri a été au centre de nombreuses polémiques durant l'Euro-2012, mettant à mal par son comportement l'entreprise de restauration de l'image de l'équipe de France.

Le Championnat d'Europe du joueur de Manchester City (24 ans, 35 sélections, 4 buts) avait débuté par des injures (+ferme ta gueule+) proférées en mondovision après son égalisation contre l'Angleterre (1-1 au 1er tour). Il s'est terminé sur un ton similaire dans la zone mixte de la Donbass Arena de Donetsk, samedi, après l'élimination des Bleus en quart de finale contre les champions du monde et d'Europe espagnols (2-0).

Après le journal L'Équipe le 11 juin, cette fois c'est un journaliste de l'AFP qui a été pris pour cible de manière véhémente. Interrogé pour savoir quel était son sentiment après la défaite, Nasri a refusé de répondre, estimant que la presse cherchait toujours «à écrire de la merde».

Le journaliste l'a alors interrompu pour lui demander de ne pas faire d'amalgame, mais le joueur est resté agressif et virulent. Pour couper court à l'échange, le rédacteur de l'AFP a répliqué: «et bien casse-toi alors si tu n'as rien à dire».

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C'est à ce moment-là que Nasri est sorti de ses gonds, usant de propos grossiers («Va te faire enculer, va niquer ta mère, sale fils de pute. Tu veux qu'on s'explique, va te faire enculer. Voilà, comme ça vous pourrez écrire que je suis mal élevé»).

La scène, devant d'autres journalistes, fait forcément tâche pour une équipe qui tente par tous les moyens d'effacer les stigmates de la grève d'entraînement des joueurs à Knysna et de redorer son blason auprès du grand public après le fiasco moral et sportif du Mondial-2010.

Elle vient surtout brouiller une nouvelle fois l'image de Nasri, déjà associé au conflit de générations qui avait pollué la vie des Bleus à l'Euro-2008. À l'époque, les «anciens» avaient déploré l'attitude hautaine de l'ancien Marseillais. Visiblement, les années ne l'ont pas assagi et il a de nouveau trouvé le moyen de se faire remarquer en dehors des terrains lors du 2e grand tournoi de sa carrière.

Plus globalement, son comportement n'a pas fait remonter une cote qui n'a jamais été au plus haut parmi ses coéquipiers. Nasri ne trouve même pas grâce auprès des trois autres illustres représentants de la génération 87 (Benzema, Ben Arfa, Ménez), pour une fois au grand complet en équipe de France A.

Détaché

Car ses insultes en public ne sont que le signe extérieur d'un malaise plus profond, Nasri s'étant senti de plus en plus isolé chez les Bleus avant de finir par perdre sa place de titulaire lors du quart de finale. Un affront que le joueur, acheté à prix d'or par Manchester City à Arsenal durant l'été 2011 (28 millions d'euros), a sans doute très mal digéré.

Laurent Blanc a pourtant tout fait pour le placer dans les meilleures dispositions, lui maintenant sa confiance malgré les critiques et en faisant l'un des éléments phares de son trident offensif. Mais la défaite contre la Suède (2-0 au 1er tour) a fait exploser l'unité de façade et Nasri a cristallisé autour de sa personne tous les maux de l'équipe de France.

Pris à partie dans le vestiaire par Ribéry et Benzema pour son côté individualiste et sa propension à ralentir le jeu, Nasri a senti ce soir-là que le vent avait tourné pour lui.

La décision de Blanc de l'exclure de son onze de départ apparaît ainsi comme une véritable sanction et il sera intéressant de voir quel sera dans ces conditions son avenir en équipe de France.

Avant le coup d'envoi du quart de finale, Nasri est apparu très détaché, bavardant longuement avec l'Espagnol Silva, son camarade en club, et Fabregas, son ancien coéquipier à Arsenal, et évitant de se mêler aux autres Bleus. Preuve que la fracture est profonde et aura du mal à être colmatée.