Des représentants d’universités américaines se déplacent pour voir le talent québécois

Le parcours vers le monde du soccer professionnel peut être sinueux, mais lorsque d’autres sentiers balisés s’offrent aux jeunes, le passage s’éclaircit peu à peu.

C’est la mission de Frederico Moojen et d’Antonio Ribeiro, deux anciens porte-couleurs de l’Impact de Montréal. Depuis plus de 10 ans, les amis organisent des matchs entre certains des joueurs et joueuses les plus prometteurs de la Belle Province et invitent des formations universitaires de partout au Canada et aux États-Unis à venir s’arracher leurs pépites.

« Il y a tellement de talent ici, lance d’emblée Moojen. Quand on a commencé, on mettait en vitrine une trentaine de joueurs. Maintenant, c’est près de 300 joueurs qui participent à ces matchs. »

Si l’évènement, qui s’est déroulé tout au long du week-end, prend de l’ampleur, c’est en grande partie dû à la qualité relevée de ses participants. Selon Moojen, plus de 250 joueurs ont réussi à décrocher une bourse dans une université à la suite de l’évènement.

C’est quelque chose qui rend fier. C’est un peu le meilleur des deux mondes, car les jeunes peuvent continuer à progresser au soccer, mais ils vont également chercher un diplôme universitaire.

Frederico Moojen

Ces évènements se veulent également une solution autre que l’Académie du CF Montréal par rapport au talent masculin.

« Ils ne peuvent pas prendre tout le monde, rappelle Moojen. Il y a donc plusieurs joueurs qui passent sous le radar, mais qui méritent tout autant la possibilité d’être vus. »

Ce qui est une excellente nouvelle aux yeux de Patrice Bernier, ancien capitaine de l’Impact. La scène du soccer québécois est nettement plus en santé qu’autrefois, notamment grâce à l’effervescence de multiples tournois de ce type.

Je me souviens qu’on embarquait plusieurs gars dans une caravane et on allait jouer des matchs de la sorte partout aux États-Unis. Avant, on devait passer du premier barreau de l’échelle au dernier. Aujourd’hui, les étapes se font une à une.

Patrice Bernier

Sans équivoque, le soccer ici a grandement progressé, selon les dires de Bernier. Et il serait difficile de le contredire.

Des fruits qui arrivent déjà à maturité

Lorsque les noms de Moïse Bombito et de Charles Auguste sont mentionnés à Moojen, les yeux de ce dernier s’illuminent. Bombito, sélectionné par les Rapids du Colorado avec le troisième choix au total du plus récent MLS Superdraft, et Auguste, qui s’est entendu avec le Dynamo de Houston à l’aube de la prochaine saison, sont tous deux passés par le tournoi de Moojen et Ribeiro.

Moojen s’est même permis de relater la discussion qui a aidé Auguste à obtenir son billet pour l’Université Creighton.

J’ai reçu un appel me disant que l’université avait besoin d’un milieu de terrain complet. J’ai immédiatement pensé à Charles [Auguste]. Ils sont venus le voir jouer et après cinq minutes, ils lui ont fait une offre.

Frederico Moojen

Pour Bombito, c’est lors de l’un des tournois organisés par Moojen et Ribeiro qu’il s’est démarqué.

« Mon supérieur est venu ici et a déniché Moïse. Il m’a dit qu’on devait absolument revenir ici », note Augusto Lima, entraîneur adjoint de la formation masculine de l’Université Northeastern, en première division de la NCAA.

Nul n’est prophète en son pays

Le triomphe de l’équipe canadienne féminine aux Jeux olympiques de Tokyo en 2021 n’a pas encore eu les retombées espérées. Sans ligue professionnelle avant le printemps 2025, les jeunes Québécoises sentent que l’exil est la seule façon de progresser.

« Même s’il est peu probable que j’en vive un jour, la NCAA est la seule option pour faire avancer ma carrière, lance Chloé, qui a pris part au tournoi. Je devrais être certaine à 180 % que je vais avoir une carrière en club pour abandonner mes études. C’est pour ça que l’université, c’est un bon compromis. »

L’entraîneur-chef de l’équipe féminine de l’Université Lousiana Tech – également en première division dans la NCAA –, Steve Voltz, abonde dans le même sens.

PHOTO FOURNIE PAR LE RIBEIRO MOOJEN COMBINE

Steve Voltz, entraîneur-chef de l’équipe féminine de l’Université Lousiana Tech

« Le niveau de jeu est très élevé dans le sport universitaire canadien. Par contre, aux États-Unis, on a beaucoup plus de ressources financières et tu as de bien meilleures chances de te faire repérer par un club professionnel », admet-il, pro domo.

Sans être la panacée, ce que font Frederico Moojen, Antonio Ribeiro et les autres comme eux qui tiennent des tournois est un autre pas vers le maintien en santé de l’écosystème du soccer québécois.