« C’était une température suédoise aujourd’hui », lance Evelyne Viens en souriant de l’autre côté de l’écran. « Il fait froid, il pleut. Un genre de fin octobre, au Québec. »

Il est environ 17 h 20 là-bas, en milieu de semaine de la fin de septembre. L’attaquante native de L’Ancienne-Lorette revient tout juste de son entraînement avec le Kristianstads DFF, club de première division suédoise. Elle nous parle au chaud, du confort de son logis.

Malgré la météo actuelle, Viens file le parfait bonheur à Kristianstad, ville d’environ 40 000 âmes du sud de la Suède. Aussi bien dans sa vie de tous les jours que sur le terrain.

Surtout ces derniers temps. Parce que sur la pelouse, son jeu s’est embrasé.

Quatre buts le 10 septembre. Deux le 13. Un tour du chapeau le 24. Et puis un de plus dimanche. Ce qui lui en fait 10 à ses 5 derniers matchs, et 21 en 2022, toutes compétitions confondues. Elle est co-meneuse du championnat suédois avec 18 filets.

Viens a ainsi aidé son club à monter au deuxième rang après 22 matchs, à cinq points du premier. Sa position actuelle lui permet d’espérer une qualification pour la Ligue des champions l’an prochain. Il reste quatre rencontres à la saison.

Pas mal pour une joueuse qui revenait d’une année de misère en NWSL, avec le Gotham FC du New Jersey. Et même d’une entame de calendrier compliquée en 2022.

« Au début de l’année, j’aurais acheté des buts, explique Viens. Je créais beaucoup de passes, mais je n’arrivais pas à marquer. Ça m’a pris du temps pour retrouver ma touche d’attaquante, me mettre dans de bonnes positions. »

Depuis juin, ça va mieux. L’artilleuse a profité de son retour de la pause estivale pour « retourner à la base, faire de l’extra, des frappes au but, se mettre dans des situations de match ».

PHOTO FOURNIE PAR ISSA SJÖSTEDT

L’attaquante québécoise Evelyne Viens (18) est la co-meneuse pour le nombre de buts marqués dans le championnat suédois.

Et elle a aussi appliqué les conseils de son entraîneuse-chef, l’Islandaise Elísabet Gunnarsdóttir.

« C’est une des très bonnes coachs avec qui j’ai travaillé, estime Viens. J’apprécie vraiment sa méthode. »

Gunnarsdóttir est épaulée par un entraîneur adjoint « très perfectionniste ». « Pour lui, les détails, c’est très important. »

Viens avoue en riant que « des fois, ça ne [la] dérange pas de couper un petit coin » rond.

« Mais lui, il va s’assurer que je ne le coupe pas. »

Elle dit avoir « compris récemment » que le succès ne se résume pas à ce qui se retrouve sur la feuille de match.

« C’est le processus qui est important. Avant de faire les quatre buts, pour la première fois de ma vie, j’avais dit que j’étais fière de la manière dont je m’étais entraînée. […] J’ai toujours été impliquée pendant les entraînements. Mais là, je suis en train d’en sortir plus de détails qui me permettent de performer la fin de semaine. »

« Honneur »

Ces efforts supplémentaires, et les résultats qui en ont découlé, lui ont finalement permis d’être rappelée à nouveau par Bev Priestman en sélection canadienne, la semaine dernière.

Viens était de l’équipe championne aux Jeux olympiques de Tokyo. Mais depuis, ses présences sous le maillot de l’unifolié ont été rares et peu fructueuses. Elle dit être « honorée » d’avoir la chance de représenter son pays.

Ça fait longtemps que j’ai été appelée à jouer un match, et je pense que je me suis améliorée, que j’ai trouvé mon rythme. C’est un bon moment.

Evelyne Viens

Lorsqu’elle a vu ses compatriotes s’envoler pour l’Australie, à la fin d’août, elle est restée en Suède. La Québécoise évoque, sans vraiment le nommer, un petit pincement au cœur ressenti à ce moment. Mais elle en a profité pour « mettre les bouchées doubles et travailler encore plus ».

Ce qui l’a propulsée vers un mois de septembre à tout casser.

« Ralentir mon rythme de vie »

On vous parlait de son bonheur à Kristianstad. Viens a d’ailleurs récemment signé un contrat la liant au club jusqu’en 2024. Laissons-la maintenant vous expliquer pourquoi elle s’y plaît tant.

« Je ne cacherai pas que j’aime vraiment la vie européenne. C’est beau de bien se sentir dans un club, mais c’est aussi important de bien se sentir à l’extérieur. C’est une petite ville. Je me promène à vélo. Il y a un côté nature. Ça me permet de ralentir mon rythme de vie. »

Kristianstad est une ville « très centrée sur le sport ». Il y a aussi des équipes de hockey et de handball. Donc la passion pour son club, Evelyne Viens la ressent.

« Quand je vais au gym le lundi matin, il y a un des messieurs qui vient à nos matchs. On a toujours une discussion. […] On se fait reconnaître, on jase avec les fans. C’est un couteau à double tranchant, parce que tout se sait dans la ville ! Mais je trouve ça le fun d’avoir un support local. »