(New York) La mise aux enchères du maillot mythique que portait Diego Maradona quand il a crucifié l’Angleterre à la Coupe du monde de football de 1986 a déjà un goût de controverse : une des filles du virtuose argentin a mis en doute son authenticité mercredi, malgré les assurances de Sotheby’s, qui gère la vente.

« Ce n’est pas celui-là. Je ne peux pas révéler qui le détient », mais « ce n’est pas cet homme », a affirmé Dalma Maradona dans la presse argentine, faisant allusion à l’ancien milieu de terrain anglais Steve Hodge, censé être le propriétaire de cette tunique bleue portant le numéro 10 depuis que le Pibe de Oro la lui avait offerte après le fameux quart de finale de Mexico.

Selon la fille de Maradona, l’une des deux qu’il a eues avec son épouse Claudia Villafane sur un total de cinq enfants reconnus, le maillot détenu par Hodge et mis en vente par Sotheby’s serait en réalité celui de la première mi-temps du quart de finale joué par l’Argentine contre l’Angleterre à Mexico, le 22 juin 1986.

Or le génie argentin, mort d’une crise cardiaque à Buenos Aires le 25 novembre 2020 à l’âge de 60 ans, a changé de tenue à la mi-temps et endossait un autre maillot lorsqu’il a inscrit ses deux buts de légende, l’un en s’aidant de la main — « la main de Dieu », avait dit Maradona —, l’autre, « le but du siècle », marqué quatre minutes plus tard après une chevauchée incroyable entre les défenseurs anglais.

D’après Dalma Maradona, c’est son père lui-même qui lui aurait confié le secret : « Comment je vais lui donner le maillot de ma vie ? », lui aurait-il dit.

« Nous souhaitons clarifier cela pour que les gens qui souhaitent l’acheter connaissent la vérité », a ajouté Dalma Maradona mercredi soir sur la chaîne de télévision Canal 13.

Livres

L’enjeu est de taille pour Sotheby’s, qui a placé la barre très haut, en estimant la pièce entre 4 et 6 millions de livres (entre 5,2 et 7,8 millions de dollars), avec un prix de départ de 4 millions de livres, juste en-dessous du record de 2019 (5,6 millions de dollars) établi aux enchères pour un maillot de la légende américaine du base-ball Babe Ruth. La vente aura lieu sur l’internet du 20 avril au 4 mai.

La maison de vente a immédiatement contre-attaqué jeudi en se disant sûre de son coup, expertise à l’appui.

« Personne n’a jamais dit que ce n’était pas le bon maillot », a déclaré dans un courriel à l’AFP une porte-parole de Sotheby’s, en rappelant que le t-shirt a toujours été présenté comme tel, notamment par le National Football Museum de Manchester à qui Steve Hodge l’avait prêté pour qu’il soit exposé.

L’ancien milieu anglais raconte l’épisode dans son autobiographie, intitulée The Man with Maradona’s shirt, en situant l’échange dans le couloir menant aux vestiaires après le match.

De son côté, Maradona raconte une histoire similaire dans son livre, Touched by dog (Ma vérité, selon l’édition française) : « Sur le chemin des vestiaires, l’un des gars de l’équipe anglaise — qui s’est avéré être Hodge, mais je n’en étais pas sûr à ce moment-là-m’a demandé d’échanger mon maillot avec lui. J’ai dit oui et nous l’avons fait. »

L’Argentin ajoute que dans un second temps, « quelques autres joueurs anglais sont entrés dans le vestiaire échanger des maillots et quelqu’un leur a donné quelques-uns des miens »

Sur son site internet, Sotheby’s met aussi en avant une garantie apportée par la société Resolution Photomatching, spécialisée dans l’authentification des maillots de sport grâce à l’image.

Zidane

Selon une lettre de son fondateur John Robinson, le maillot « a été associé de manière concluante au moment exact du but de la “main de Dieu”, et l’analyse de l’image a confirmé que Maradona n’a pas changé de maillot entre les deux buts ». Ce sont notamment des détails sur le badge de la Fédération argentine de football (AFA) brodé sur le maillot qui permettraient de l’affirmer.

La controverse n’est pas une première pour le monde des enchères et des collectionneurs, où l’authenticité est un gage de valeur. Et elle a déjà touché le secteur des maillots de football de légende.

En octobre 2018, une société d’enchères parisienne, Coutau-Bégarie, avait dû retirer à quelques jours de la vente un maillot présenté comme celui porté par Zinédine Zidane durant la finale de la Coupe du monde 1998 remportée par la France contre le Brésil, grâce à deux buts de son chef d’orchestre, en raison de doutes sur son authenticité.